Agence télégraphique suisse (ATS)

Agence télégraphique suisse (ATS) : Une grève contre une usine à dividendes

L’ATS et Keystone ont annoncé leur fusion au mois d’octobre 2017 en promettant un avenir radieux. La direction de l’ATS annonce aujourd’hui qu’environ 60 personnes seront licenciées, verront leur temps de travail réduit ou seront mises en préretraite. Le tiers du personnel est touché par ces mesures d’économie visant la suppression de 40 postes équivalent plein temps. La direction montre qu’elle veut aller vite et ne pas s’embarrasser de la consultation du personnel. En réponse, ce dernier a déclenché une grève le mardi 23 janvier. Entretien avec Gilles d’Andrès, membre de la commission de rédaction.


«L’ATS, c’est pas pour les profits»

Après l’annonce du mois d’octobre, le personnel a-t-il reçu des informations sur cette restructuration?

Non, on a été dans le flou jusqu’au 8 janvier. La direction a convoqué les cadres puis la commission de rédaction, et enfin elle a envoyé un communiqué interne à l’ensemble des journalistes. Elle a annoncé que des entretiens individuels étaient prévus dès le 22 janvier afin d’imposer des réductions de temps de travail, des pré-retraites ou des licenciements avant la fin du mois. Nous avons l’impression que la direction et le conseil d’administration n’ont pas de stratégie et de vision à moyen terme.

Comment le personnel s’est organisé face à cette attaque?

Au départ, il y a eu un certain affolement. Nous imaginions qu’il y aurait des mesures mais pas de cette ampleur. Derrière ces décisions, il y a des drames humains qui se jouent. Certains journalistes travaillent ici depuis plus de 20 ans. A la commission de rédaction, l’un de nos objectifs a été de rendre la situation des collègues transparente car la direction insistait sur des éléments financiers. La direction voulait aller le plus vite possible pour assainir les caisses avant la fusion. Elle a imposé une période de consultation de seulement 10 jours.

Après le choc et la peur, les journalistes ont montré leur détermination à ne pas se laisser faire. Nous avons donc convoqué une assemblée générale, lors de laquelle les collègues ont adopté une liste de revendications avec un mandat très clair. Nous avons exigé le maintien des postes de travail, la prolongation de la période de consultation et la présentation d’un véritable plan à moyen terme pour un service de qualité. Nous avons également diffusé une lettre ouverte. Comme la direction a rejeté nos principales revendications, nous avons déclenché la grève.

Quel est votre bilan de cette grève?

La grève visait à mettre la pression sur la direction. Elle a été largement suivie par plus de 150 journalistes qui ont manifesté à Berne. Cette étape a été un succès. La direction fait face à des demandes de justification et le soutien, notamment politique, s’élargit. Aujourd’hui, parallèlement à ces mesures, une proposition de plan social a été posée sur la table et nous allons l’étudier avec syndicom et Impressum. Mais le personnel maintient ses revendications. Les journalistes refusent que l’ATS soit transformée en usine à dividendes pour payer des actionnaires au détriment des journalistes et des services qu’ils et elles fournissent.

Propos recueillis par SéS


Les journalistes de l’ATS se mettent à nouveau en grève

Au moment où nous mettons ce journal sous presse, les travailleurs et les travailleuses de l’ATS se sont à nouveau mis en grève, cette fois pour une durée illimitée. Dans une lettre ouverte, ils et elles soulignent que la restructuration annoncée vise autre chose que la viabilité financière de l’entreprise.

La direction a effectivement décidé d’octroyer un rabais général sur les services fournis aux clients, qui a engendré les pertes justifiant aujourd’hui la suppression de ces postes. L’objectif est bien d’inféoder l’ATS à la logique de la nouvelle entreprise: dégager des profits et octroyer des dividendes. Cette grève constitue bien la seule réponse à donner aux appétits des actionnaires. SéS


Non à No Billag, mais…

D’un côté, l’initiative No Billag attaque de front le service public de l’audiovisuel en affirmant que le privé pourrait remplir la tâche d’information indispensable au fonctionnement démocratique. Après la dramaturgie orchestrée l’automne passé, voilà que la tendance s’est inversée et que l’initiative serait rejetée en votation populaire. Heureusement.

De l’autre, la concentration des médias privés se renforce au profit des actionnaires. Les restructurations se suivent avec la valse de suppressions de postes de travail, de licenciements ou de départs forcés à la retraite au détriment du travail d’information. Dans ces luttes légitimes des travailleurs·euses, il s’agit pourtant de ne pas taire la critique contre un traitement de l’information qui constitue trop souvent le relai du pouvoir et contre la logique du profit qui attaquent frontalement les conditions de production de cette information. SéS