Fukushima
Fukushima : Le scandale d'un retour forcé
Alors que même TEPCO, l’exploitant des centrales nucléaires de Fukushima, admet qu’il lui faudra des décennies pour reprendre le contrôle du site, les autorités japonaises poussent au retour des réfugié·e·s dans les zones contaminées. Voici ce qu’en dit Ruiko Muto, des «Femmes de Fukushima contre le nucléaire».
« Les autorités de Fukushima envisagent le retour de tous les réfugiés dans leur commune d’origine avant 2020. Ainsi, le long de la côte, la ligne ferroviaire Jôban, très endommagée, sera bientôt entièrement rouverte.
Or, derrière toutes ces mesures de façade, les droits humains les plus fondamentaux sont gravement bafoués: la politique de retour prônée actuellement ne permet pas aux habitants de retrouver, dans des endroits sûrs, les conditions de vie d’avant l’accident. En effet, dans les zones où le niveau de contamination radioactive est encore très élevé, les autorités ont fixé à 20 millisieverts par an la dose maximale d’exposition autorisée, soit 20 fois plus que la dose qui avait cours avant 2011, 1 millisievert étant la norme adoptée par la plupart des pays. Ce qui revient à exiger des habitants qu’ils supportent de vivre irradiés.
Car aucune mesure de protection contre l’irradiation n’est prévue après leur retour. En particulier, les séjours réguliers en milieu sain, comme cela se pratique pour les enfants de Tchernobyl, ne sont pas envisagés. En outre, une fois levées les directives d’évacuation, les indemnités pour ‹ dommages psychologiques › ainsi que la gratuité des logements servant de refuge seront supprimées, même pour ceux qui ne souhaitent plus retourner dans leur commune d’origine. Ces personnes se heurtent donc, d’emblée, à des situations très difficiles: certaines, se sentant acculées, acceptent à contrecœur de revenir chez elles, d’autres en sont réduites à devenir des SDF, et l’on observe même une recrudescence des suicides. Dans le pire des cas, les familles qui refusent de quitter leurs habitations provisoires sont poursuivies en justice.
En novembre 2017, à l’issue de l’Examen périodique universel (l’EPU) mené par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, quatre pays membres (l’Allemagne, l’Autriche, le Mexique et le Portugal) ont adressé au gouvernement japonais des recommandations, afin que celui-ci s’attache à améliorer la situation des victimes de l’accident de Fukushima, en termes de droits humains.»