Turquie

Turquie : «Vous avez peut-être volé l'urne, mais l'avenir nous appartient»

L’AKP, allié du parti d’extrême droite fascisant MHP, a remporté les élections présidentielles avec 52% des suffrages. Des fraudes et des irrégularités électorales ont également eu lieu en faveur de l’AKP et d’Erdogan.

L’AKP n’a cependant pas gagné la majorité qualifiée tant convoitée qui lui aurait permis de modifier la Constitution pour accroître encore son pouvoir. Le parti d’Erdogan n’a obtenu que 42% des voix aux élections législatives; il dépend donc du MHP pour avoir une majorité simple au Parlement. Le Parti républicain du peuple (CHP) a quant à lui conquis 22% des citoyen·ne·s et son candidat à l’élection présidentielle, Muharrem Ince, a obtenu 30,6% des voix.

Malgré les obstacles et la répression terrible qui s’abat sur ses membres, le Parti démocratique des peuples (HDP) a réussi à dépasser le seuil des 10%, lui permettant non seulement d’entrer au Parlement, mais même d’améliorer son précedent score en passant de 59 à 68 député·e·s. Une véritable victoire dans un pays qui a notamment mis sous tutelle la grande majorité des communes kurdes et qui a démis (et souvent emprisonné) les maires élus. Le candidat du HDP à la présidentielle, Selahattin Demirtas, a mené une campagne très limitée depuis sa cellule d’Edirne, où il est incarcéré injustement. Il a néanmoins remporté 8,4% des voix.

À la suite des éléctions, les attaques du gouvernement turc d’Erdogan et de son parti se sont poursuivies contre le HDP. Le ministre de l’intérieur turc a par exemple menacé de mort la co-présidente du HDP, Pervin Buldan. En même temps, le gouvernement turc continue ses agressions militaires en Iraq et en Syrie contre les forces kurdes affiliées au PKK.

Erdogan bénéficiera désormais de pouvoirs considérablement renforcés en vertu d’une nouvelle constitution approuvée par référendum le 16 avril 2017, tandis que l’AKP continue de consolider sa domination sur l’écrasante majorité des pouvoirs et institutions publiques. L’autoritarisme du régime turc va très certainement encore se renforcer, de même que la répression qui l’accompagne contre toute voix dissidente. Mais les forces progressistes et démocratiques du pays, avec à leur tête le HDP, n’ont pas dit leur dernier mot, comme le symbolise ce slogan apparu sur les murs dans les régions kurdes après les éléctions: «Vous avez peut-être volé l’urne mais l’avenir nous appartient».

Joseph Daher