Vers la grève

Vers la grève : Parcours de vie, parcours d'embûches

Réunies le 30 août, plusieurs travailleuses et militantes syndicales ont débattu entre femmes de leurs expériences comme femmes sur leur lieu de travail.


Chez les horlogères, les ateliers sont majoritairement féminins. Et les chefs d’ateliers sont quasiment toujours des hommes.

«Quand tu travailles dans la vente, on te demande d’être jeune, mince et d’avoir de belles fesses. C’est aussi contre ça que je veux me battre.» À tour de rôle, ces femmes ont raconté leur parcours de vie. Bien qu’elles viennent d’horizons différents, les embûches qu’elles rencontrent sur leur route sont sensiblement les mêmes.

«Lorsque mes enfants sont nés, j’ai arrêté de travailler. Plus tard, lorsque j’ai recommencé, j’ai pris des petits jobs.» Téléphoniste pour un institut de sondage, vendeuse dans une grande chaîne de distribution, assistante administrative en intérim, toutes évoquent des conditions contractuelles pas vraiment idéales.

Le cas des horlogères

Même son de cloche chez les horlogères, qui ont créé leur propre collectif à la Vallée de Joux. «Il y a des ateliers qui sont majoritairement féminins. Cependant, le chef d’atelier est quasiment toujours un homme.» C’est dans ces secteurs des manufactures horlogères qu’on trouve le plus de contrats temporaires et les salaires les plus bas. «Dans mon atelier, c’est la foire d’empoigne pour avoir les faveurs du chef. C’est lui qui décide celles qui pourront prendre les vacances pendant les vacances scolaires, c’est lui qui décide de tout dans l’atelier, alors tu penses…». Les déléguées syndicales enragent: les cas de harcèlement sexuel existent, mais sont trop souvent tus par peur de perdre son travail et par honte que toute l’usine en parle. Pourtant les dispositifs mis en place par les entreprises pour les prévenir ne manquent pas. Ils sont simplement inopérants. «C’est décourageant de voir qu’on est souvent dans notre bon droit, mais qu’on n’arrive pas à obtenir gain de cause.»

Certaines relèvent qu’au moment de leur embauche, on leur a clairement interdit de communiquer leur salaire. Une entreprise va même jusqu’à le préciser dans le contrat de travail. «Pour pouvoir utiliser la Loi sur l’égalité, il faudrait déjà qu’on puisse parler ouvertement de nos salaires. Aujourd’hui, c’est l’omerta totale.»

Avec ces réunions, l’objectif premier des travailleuses est de réfléchir aux difficultés qu’elles rencontrent sur leur lieu de travail, auxquelles les hommes ne sont pas ou différemment confrontés. Après débat, elles ont choisi de poursuivre leurs réunions en non-mixité: «l’idée est que chacune se sente libre de parler, mais aussi que chaque participante puisse prendre la parole, car dans nos réunions syndicales, c’est quelques fois dur d’en placer une parmi tous ces hommes!»

Isabelle Smekens