Liste noire de l'OIT
La Suisse en sursis

On célèbre les 100 ans de l’OIT, dont la Conférence 2019 se tient à Genève jusqu’au 21 juin. Des milliers de délégué·e·s syndicaux, patronaux et des États y débattent du renforcement des droits des travailleurs et travailleuses relevant des normes de l’OIT, dont la liberté syndicale.
Or la Suisse est un pays arriéré en matière de protection contre les licenciements de syndicalistes, membres de commissions du personnel, etc. La convention n° 98 de l’OIT est violée. La loi prévoit pour de tels licenciements une indemnité maximum de 6 mois de salaire, mais ne permet pas qu’un tribunal puisse réintégrer un salarié abusivement licencié!
Le licenciement antisyndical est donc de facto autorisé, ce qui a fait l’objet dès 2004 d’observations de l’OIT à la Suisse et de plaintes de syndicats helvétiques (USS en 2003 et SSP en 2013).
À la veille de sa Conférence, l’OIT a mis la Suisse sur « liste noire » avec 40 États mis en cause pour violation grave de conventions de l’OIT. « Nous n’aimons pas tellement ces listes… » a dit le 10 juin Alain Berset, après avoir ouvert la Conférence au nom de la Suisse, annonçant dans la foulée que le ministre de l’Économie Parmelin allait ouvrir des tractations entre l’USS et les organisations patronales pour « trouver des solutions ».
La Suisse a ainsi été retirée, avec accord de l’USS, de la liste noire, réduite à 25 États, dont les turpitudes antisyndicales seront abordées en conférence. Un rapport viendra l’an prochain clore la « médiation » Parmelin. Si la démarche « n’apporte aucune amélioration concrète », l’USS – présidée par Pierre-Yves Maillard – dit qu’elle « remettra la pression sur la Suisse par le biais de l’OIT ». L’idée que la pression aurait dû être maintenue jusqu’à ce que la Suisse respecte le droit international n’a pas été retenue par l’USS. Surprenant? Pas vraiment…
Pierre Vanek