France

Victoire pour les femmes de chambre de l'hôtel Ibis

Il a fallu 22 mois de lutte acharnée, dont 8 de grève, pour que les femmes de ménage de l’hôtel Ibis Batignolles à Paris obtiennent gain de cause.

Les femmes de chambre de l'hôel Ibis fêtent leur victoire

Employées par le sous-traitant STN, elles ont obtenu des augmentations de salaires allant de 100 à 250 euros, l’annulation des mutations, la baisse des cadences, un panier repas à 7,30 euros, des pointeuses pour compter les heures supplémentaires, ainsi que l’égalité de traitement avec les salarié·e·s du groupe Accor. 

Leur objectif était de mettre fin à la logique de la sous-traitance, qui est un moyen pour ces entreprises de surexploiter et d’intimider une main d’œuvre migrante et non blanche. Rachel Keke, une gouvernante, explique ainsi : « on nous exploite parce que nous sommes noires ». Le niveau de maltraitance et d’exploitation salariale avait atteint un tel niveau, que cette lutte était devenue vitale pour elles. Les femmes de chambres avaient 30, 40 chambres, voire 50 chambres à faire par jour pour un salaire allant de 700 à 1000 euros. Et si une femme se plaint, elle est mutée. 

  Leur lutte, leur mode d’organisation et d’action ont rendu visibles les effets matériels du sexisme et du racisme. La syndicalisation a été une étape importante pour les protéger dans leurs actions et éviter la pression judiciaire et la fragmentation des employées. Trouver le bon syndicat, et des syndicalistes engagées avec une vision politique du racisme et du sexisme n’était pas évident: elles sont passées de Force Ouvrière à la Cgt propreté sans succès, jusqu’à rencontrer la Cgt Hotel de Prestige et économiques qui a déjà réussi à internaliser des employées de ménage des hôtels. C’est un syndicat qui a une vraie orientation lutte de classe, et qui a su entraîner une solidarité large, avec des organisations politiques, des groupes antiracistes et surtout des groupes féministes.  

Refus de l’ubérisation 

La sous-traitance et le travail ubérisé sont devenus la norme dans tous les lieux que nous fréquentons, ils divisent en hiérarchisant sur une base raciale. La crise sanitaire a mis en lumière l’importance économique du travail effectué par les agent·e·s de nettoyage, et le manque de reconnaissance sociale et économique de ces emplois. C’est dans ce manque de reconnaissance et de surexploitation que se nichent le racisme, le sexisme, mais aussi le validisme. Les enjeux de cette lutte sont multiples et vitaux, d’abord pour les concernées mais aussi pour l’ensemble de la société, parce que le ménage est aussi un enjeu de santé publique.

Selma Oumari