Nicaragua
Vague d’arrestation de candidat·e·s de l’opposition
Daniel Ortega, qui brigue son quatrième mandat consécutif à la présidence du Nicaragua – son cinquième au total – a jugé nécessaire d’arrêter cinq des candidats présidentiels les plus en vue de l’opposition et un certain nombre d’autres dirigeants de l’opposition, y compris de gauche, plusieurs étant d’anciens camarades du parti d’Ortega, le Front sandiniste de libération nationale (FSLN).
Ortega et la crise nicaraguayenne
Alors que depuis des décennies, Daniel Ortega et le FSLN n’ont rien eu de progressistes ou de démocrates, la vague actuelle d’arrestations de ses opposants politiques représente une nouvelle évolution encore plus autoritaire. Le gouvernement affirme que ses opposants tentent de saper la souveraineté du pays et « incitent à l’ingérence étrangère dans les affaires intérieures, demandent des interventions militaires et s’organisent avec des financements étrangers ».
La répression d’Ortega contre l’opposition intervient alors que le Nicaragua traverse une série de crises économiques, politiques et de santé publique. En 2018, une rébellion politique nationale a impliqué des centaines de milliers de Nicaraguayen·ne·s de tous horizons qui ont protesté contre la violente répression d’Ortega, plus tôt cette année-là, de manifestations de personnes âgées et d’étudiant·e·s opposé·e·s à un nouveau plan de retraite. Pour réprimer la rébellion qui en a résulté, la police et les voyous du FSLN d’Ortega ont assassiné 300 personnes, en ont blessé 2000, arrêté et torturé des centaines d’autres, et ont empêché efficacement toute manifestation de l’opposition dans le pays. Les médias d’opposition ont été fermés et les ONG harcelées. Tout cela a conduit quelque 100 000 Nicaraguayen·ne·s à fuir le pays.
Puis, en 2020, est survenue la crise pandémique du Covid. Le gouvernement Ortega bafouant de manière flagrante les recommandations internationales en matière de santé en ignorant la distanciation sociale et en organisant des événements publics de masse à à l’extérieur comme à l’intérieur. Le Nicaragua n’a pas non plus vacciné sa population. « Le Nicaragua a administré jusqu’à présent au moins 167 500 doses de vaccins Covid. En supposant que chaque personne ait besoin de 2 doses, cela suffit pour environ 1,3 % de la population. Le pays devrait désormais recevoir suffisamment de vaccins via Covax pour couvrir 20 % de sa population ».
Comme dans d’autres pays, la pandémie de Covid a également entraîné une crise économique. En 2020, le Nicaragua, déjà le deuxième pays le plus pauvre de l’hémisphère (après Haïti) avec un PIB par habitant·e inférieur à 2000 dollars, a vu son économie reculer de 4 %.
La réponse étasunienne
Pendant la majeure partie de la présidence d’Ortega dans les années 2000, les États-Unis et le Nicaragua ont entretenu des relations amicales. La raison de la tolérance étasunienne du régime d’Ortega, et vice versa, était qu’il était bon pour les affaires étasuniennes et pour la classe capitaliste nicaraguayenne. 60 % du commerce nicaraguayen se fait avec les États-Unis.
Maintenant, cependant, le Nicaragua est devenu un problème. Les États-Unis préfèrent les pays avec au moins un vernis d’institutions et de procédures démocratiques et veulent la paix sociale. À la suite de la violente répression du soulèvement national de juillet 2018, le gouvernement étasunien a imposé des sanctions à Daniel Ortega, à son épouse et vice-présidente Rosario Murillo, ainsi qu’aux plus hauts responsables de la police du pays.
Depuis son élection en 2007, Ortega a cherché un contrepoids au pouvoir étasunien en renforçant les liens avec la Russie, en soutenant l’occupation de la Crimée par la Russie en mars 2014 et en accueillant le président russe Vladimir Poutine en juillet de la même année. La Russie a également réarmé le Nicaragua et entraîné l’armée nicaraguayenne dans les écoles militaires russes et au Nicaragua.
Que doit faire la gauche ?
Nous devons rejeter l’argument avancé par certain·e·s à gauche selon lequel nous devrions soutenir le dictateur Ortega et son gouvernement parce que les États-Unis s’opposent désormais à lui. Nous, à gauche, devons être opposé·e·s à la fois aux États-Unis et à la dictature d’Ortega. En tant que socialistes internationalistes, nous sommes solidaires de tous les mouvements pour la démocratie, les droits civiques et pour le socialisme.
Dan la Botz
Traduction par Arguments pour la Lutte Sociale. Article original publié par Against the Current/Solidarity et New Politics.