25e féminicide de l’année en Suisse : INSUPPORTABLE !
Jeudi 21 octobre, les médias nous apprennent qu’un féminicide de plus a été commis en Suisse. Un mari a tué son épouse dans une luxueuse villa de Vandoeuvres à Genève. Trois mois plus tôt, en juillet, c’était dans le quartier très populaire des Charmilles qu’un autre conjoint exécutait une femme dans ce canton.
Chiffrer pour visibiliser
Les féminicides sont systémiques, non des faits divers. Les violences et crimes contre les femmes et les personnes LGBTQIA+ ont lieu partout : dans les villes comme dans les campagnes, en Suisse comme dans tous les pays, dans les milieux riches comme dans les milieux populaires, c’est une violence structurelle.
Le nombre de féminicides recensés en 2021 est dramatiquement en hausse, ce qui place la Suisse parmi les pays avec le plus haut taux de meurtres commis contre des femmes dans la sphère intime en Europe. Il y a plus d’une victime de féminicide toutes les deux semaines dans ce pays. Ces chiffres révèlent la dimension de la tragédie, mais pour le moment ces statistiques ne sont pas tenues systématiquement et ce sont les associations féministes qui doivent s’en charger.
Pour visibiliser le caractère systémique et l’ampleur des crimes commis, il est urgent qu’un recensement officiel soit mis en place aussi bien en ce qui concerne les féminicides que l’ensemble des violences sexistes et sexuelles perpétrées par des maris, des conjoints, des amis, des pères, des ex., des oncles ou des compagnons dans cette société de domination de genre. Depuis le mouvement #Meetoo, les révélations ne cessent de faire la une des journaux, il faut maintenant que des mesures sérieuses soient prises car nul ne peut, aujourd’hui, en nier la gravité ni son étendue. Le terme féminicide est maintenant dans les dictionnaires de la langue française, il doit entrer dans la loi.
Un problème structurel
Systémique, en effet, l’horreur des féminicides est la pointe de l’iceberg du continuum des violences sexistes et sexuelles, incestes, viols, coups, emprises et dénigrement psychologique, humiliations, harcèlement au travail, dans la rue, à l’école ou ailleurs. C’est encore beaucoup trop dans l’ombre des silences, de la honte et des complicités que se jouent ces drames quotidiens, produits par les rapports genrés de force et domination sur lesquels repose notre société patriarcale et capitaliste. Il suffit de voir que dès l’enfance, les garçons apprennent à mettre en veilleuse leurs émotions car ils ne sont pas des filles : force, culture du viol, manque de mots, manque de partages, sentiments de domination accompagnés de ses privilèges font partie du cocktail destructeur, néfaste et morbide qui engendre ces violences.
Il est urgent et indispensable d’attaquer le problème dans sa globalité. Des moyens doivent être débloqués pour développer un plan national, ainsi que des plans cantonaux et municipaux. C’est dans les écoles qu’il faut agir à la racine et combattre les stéréotypes de genre qui s’y développent. Il faut donc former sérieusement les enseignant·e·s à enseigner le respect, à apprendre à parler, à s’écouter et à écouter. Le consentement comme base des interrelations doit être diffusé et la culture du viol bannie. Non, les vêtements des filles ne doivent pas être jugés « provocants », leur corps ne doit plus être systématiquement sexualisé !
On vous croit, on lâche pas
Les victimes doivent être protégées, des moyens financiers et humains doivent être mis en place, les associations doivent être soutenues. Des campagnes d’information, de responsabilisation du voisinage et de l’entourage afin qu’ielles sachent comment intervenir, doivent être largement diffusées. Celleux qui subissent des violences sexistes et sexuelles doivent être écouté·e·s et accueilli·e·s avec bienveillance par des personnes formées quand ielles parlent et dénoncent leurs bourreaux. On les croit !
Les hommes violents doivent être systématiquement éloignés de leurs victimes. Un suivi sérieux doit être imposé à ces « violenteurs » pour qu’ils travaillent sur cette violence. Certes la prison valide le caractère illégal et illégitime de la violence envers les femmes et les personnes LGBTIQ+, mais ne résout pas le problème systémique et global de cette société sexiste et patriarcale.
Brisons le continuum de la violence qui alimente la domination patriarcale. La honte doit changer de camp, brisons les silences et les complicités ! Ce sont les luttes féministes collectives qui forceront les politiques publiques à prendre des mesures : les mobilisations sont essentielles, soyons nombreux·ses dans la rue le 25 novembre !
Françoise Nyffeler