Derrière l’arbre de Mancy, la forêt d’un système dysfonctionnel

Ces dernières semaines, les médias ont fait état de plusieurs « affaires » concernant des institutions placées sous la responsabilité du Département de l’instruction publique (DIP) de Genève, dont celle, emblématique, du foyer de Mancy. 

Manifestants avec une pancarte "Pas d'éducation sans pognon"
Manifestation des employé·e·s de l’État, Genève, octobre 2020

Le dévoilement médiatique de la violence dont sont victimes à la fois les résident·e·s et le personnel n’est pas à considérer comme un cas isolé sordide, mais bien comme le produit de dysfonctionnements au sein de l’Office médico-pédagogique (OMP). La fragilité des institutions médico-­sociales ne date pas d’hier. Depuis des années, les salarié·e·s ainsi que les personnes concernées et leurs familles demandent davantage de moyens et de vrais choix politiques s’agissant d’enfants et de jeunes à besoins spécifiques.

Lorsque la gestion prend le pas sur le projet

Le déploiement de la nouvelle gestion publique qui se concentre, comme l’indique son nom, sur la gestion et non sur le projet politique, a des effets délétères sur le fonctionnement des structures d’accueil par le biais d’une activité permanente d’évaluation des prestations et de surveillance budgétaire « par le haut », en totale déconnection du terrain. À cela s’ajoute le manque de places d’accueil qui conduit à ouvrir des lieux en urgence, entassant des jeunes dans des espaces inadaptés et un personnel d’encadrement qui doit « faire avec ». 

Ainsi, la violence institutionnelle s’installe durablement dans certaines structures, engendrant un turn-over important et un manque de personnel qualifié. De plus, l’actuel projet de rééquilibrage entre le pôle médical et le pôle pédagogique est voué à l’échec : ce projet n’a bénéficié d’aucun pilotage ni de moyens adaptés, le condamnant à être à la fois incompris et inefficace. 

À l’OMP, l’expertise de terrain du personnel mais aussi les besoins et critiques des usagers et usagères sont systématiquement ignorés et, lorsqu’une crise est déclenchée, la seule réponse donnée prend la forme d’une mise à l’écart d’un·e cadre, selon l’ancestrale méthode du fusible. 

Il est temps d’accorder les moyens nécessaires à un véritable accueil de qualité. Ces moyens doivent notamment financer, outre l’engagement de personnel qualifié, les formations nécessaires à l’accueil de publics spécifiques, du temps de supervision indispensable, ainsi que la revalorisation salariale des professionnel·le·s de terrain.

Un projet, des moyens, un changement de gouvernance !

Aussi, nous soutenons la demande de protection votée par les salarié·e·s afin de ne plus être, provisoirement, sous la tutelle du DIP. Nous réclamons la tenue d’assises médico-pédagogiques afin de redéfinir un projet politique conçu et porté par celles et ceux qui sont sur le terrain. 

La gouvernance des institutions exerçant des tâches publiques doit être ouverte à l’expression des besoins de la population et des professionnel·le·s, et intégrer systématiquement des représentant·e·s des usagers·ères et du personnel dans leurs instances. Plus largement, nous demandons que cesse la guerre budgétaire qui fait tant de victimes parmi les plus fragiles et parmi celles et ceux qui les accompagnent. 

Groupe de travail Social-Santé de solidaritéS Genève.