Urgence sociale

Fin avril, deux structures d’accueil destinées aux sans-abris fermeront. Dans une lettre ouverte à Rebecca Ruiz, les acteurs·ices de l’accueil tirent la sonnette d’alarme. Personne ne doit dormir dehors ! Dans la foulée, le collectif 43 m2 ouvrira un lieu autogéré pour pallier l’urgence.

Lits de camps à Lausanne
Installation lors de la fermeture du Répit, structure d’accueil hivernal soutenue par la Ville de Lausanne, mai 2021
Fondation Mère Sofia

Lausanne dispose de 160 places « d’hiver », complétant le dispositif cantonal par deux sites qui fermeront fin avril malgré une fréquentation débordante. Le système sature et ce n’est pas nouveau : ce qui motive au fond l’inaction des autorités c’est une politique raciste et discriminatoire. 

Cela fait dix ans au moins que le dispositif est saturé et que les quelques aménagements consentis ne suffisent pas à réduire les risques liés au sans-abrisme, car apparemment, toutes les vies ne se valent pas. Alors à l’aube du problème 10 ans plus tôt, la ville avait répondu en introduisant la réservation obligatoire, permettant de faire le tri des « ayants-droits » et des autres. Pratique pour éviter de justifier l’emploi de deniers publics à destination de personnes sans statut légal. 

Le système a pourtant atteint ses limites et le silence de nos responsables politiques face à l’urgence d’augmenter les places à l’année n’est pas nouvelle. Si le discours officiel a évolué c’est au fond la même soupe : sur ces places indispensables aussi l’été il faudrait encore « examiner les besoins », autrement dit, pas question de mettre sur un pied d’égalité les ayants-droits jouissant de critères d’intégration à celleux qui ne sont finalement que des viennent-­ensuite. À noter que pour ces premiers·ères la sortie de rue n’est pas aisée, faute de réelles solutions de relogement qui permettrait de désengorger les lieux d’accueil.

Le canton finance donc une offre insuffisante. À Lausanne ce dispositif est administré par la ville qui ne semble pas prompte à mettre fin à la logique saisonnière. Bien qu’elle ne manque pas d’arguments pour ce faire : les statistiques de fréquentations étant en sa possession. La ville fait « sa » part sans volonté d’investir plus pour répondre à l’urgence soulevée par les acteurs·ices de l’accueil nocturne. Un projet de financement à même d’y répondre dignement a-t-il seulement été adressé par la ville à la conseillère d’État ? Rien n’est moins sûr, car difficile d’en faire plus au risque de justifier l’existence dans nos rues de personnes qui n’ont rien à faire sur le sol helvétique selon la doxa raciste de nos institutions. Un projet trop ambitieux pour la gauche de gouvernement ?

Il n’y a rien à attendre de décideurs·euses sourd·e·s et muet·te·s face aux revendications du terrain : le rapport de force qu’il est possible d’engager aujourd’hui aux cotés des bénéficiaires et des travailleureuses changera la donne. Mobilisons-nous sans réserve aux côtés du collectif 43 m2 !

Nicolas Mercier