Syrie

Erdogan est un ennemi du peuple syrien

De vastes manifestations ont récemment eu lieu dans le nord-ouest de la Syrie, tant dans les zones contrôlées par le groupe djihadiste Hay’at Tahrir Sham (HTS) que dans celles gérées par l’armée turque, pour protester contre les déclarations du ministre turc des affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, appelant à la réconciliation entre le régime syrien et l’opposition.

Manifestante pour le Rojava
Manifestation pour les 10 ans du Rojava, Saarbrücken, 23 juillet 2022

L e principal slogan des manifestant·e·s syrien·ne·s était « pas de réconciliation avec le boucher ». Deux manifestants ont été arrêtés et remis à la garde de la Turquie pour avoir brûlé le drapeau turc.
Ankara n’a en effet aucune intention de défier le régime syrien et cela depuis bien longtemps. Le 19 août 2002, le président Erdogan a déclaré qu’« Ankara ne lorgne pas sur la Syrie et l’intégrité territoriale de la Syrie est importante pour la Turquie ». Tout en ajoutant que leur « principal différend est la lutte contre le terrorisme dans le nord de la Syrie ». En d’autres termes, Erdogan n’a aucune envie de s’opposer, et encore moins de menacer, le régime syrien.
Quelques jours plus tard, le ministre des affaires étrangères, Mevlut Cavusoglu, a déclaré que « la Turquie n’a pas de conditions préalables au dialogue avec la Syrie, mais que tout entretien doit porter sur la sécurité à la frontière ».

Erdogan, les élections 2023 en ligne de mire

La démarche d’Ankara vers une normalisation avec Damas est motivée par deux objectifs principaux. Premièrement, Erdogan cherche à gagner des voix avant les élections présidentielles de 2023, notamment en accélérant le retour forcé des réfugié·e·s syrien·ne·s en Syrie.
Au cours des deux dernières années, des signes d’une augmentation des attaques racistes et xénophobes contre les Syrien·ne·s en Turquie ont été observés. Des milliers de Syrien·ne·s ont déjà été expulsés, tandis qu’Erdogan a annoncé en mai que le gouvernement travaillait au retour d’un million de réfugié·e·s syrien·ne·s dans les zones sous contrôle sécuritaire turc dans le nord de la Syrie.
Deuxièmement, Erdogan espère saper les aspirations kurdes à l’autonomie en Syrie par des interventions militaires, tout en poursuivant sa répression à l’intérieur du pays. Ses récentes, déclarations selon lesquelles « il est nécessaire de terminer ce qui a été commencé », font référence à une extension de la « zone de sécurité » de trente kilomètres de large conquise à plusieurs reprises par l’armée turque et ses mandataires armés syriens en 2016, 2018 et 2019.
Il ne faut pas se faire d’illusion sur les politiques d’Ankara ; elles ont constamment servi les intérêts politiques de la Turquie, qui vont à l’encontre de ceux du soulèvement syrien.

Joseph Daher