Une exposition sur les « enfants du placard »

Du 11 juin 2022 au 19 mars 2023, le Musée d’histoire de La Chaux-de-Fonds présente une exposition temporaire, intitulée Enfants du placard. À l’école de la clandestinité. Elle se base sur une recherche menée à l’Université de Neuchâtel, « Une socio-histoire des gens qui migrent : les enfants du placard (1946–2002) ».

Image de l'exposition Enfants du placard
Vue de l’exposition Enfants du placard. À l’école de la clandestinité.

Durant la seconde moitié du 20e siècle, des milliers d’enfants de travailleuses et de travailleurs saisonniers·ères, pour qui le regroupement familial n’était pas autorisé, ont vécu clandestinement en Suisse. Selon la présentation du Musée d’histoire de La Chaux-de-Fonds, « c’est avant tout la voix de ces enfants aujourd’hui devenus adultes que l’exposition vous invite à entendre ; des témoignages qui permettent de donner la parole à celles et ceux qui en ont été privé·e·s, mais aussi de découvrir une histoire qui, par sa nature, n’a laissé que peu de traces, si ce n’est à travers les archives des ‹ écoles clandestines › ». 

Parmi ces écoles, citons Mosaïque, au début des années 1980 (La Chaux-de-Fonds), fondée par l’institutrice Denyse Reymond ; La Petite Ecole (Genève), où enseigna notre regrettée camarade Aimée Stitelmann ; une école à Renens (VD), fondée en 1971 par les associations de migrant·e·s.

L’exposition retrace les témoignages de personnes telles que Massimo Lorenzi (journaliste à la TSR) ou Maria Belo (ancienne présidente du Conseil général de La Chaux-de-Fonds) : « C’était des jours et des jours enfermés, regardant par la fenêtre les enfants qui jouaient dans la cour du collège. Mon frère avait treize ans. C’était difficile pour lui de ne pas aller à l’école et de rester caché à la maison sans pouvoir sortir ».

De 1931 à 2002, des dizaines de milliers d’étrangers·ères ont fait l’objet d’un statut discriminatoire : obligation de quitter la Suisse après neuf mois, pas de liberté de changer d’emploi, logements souvent insalubles (cf. le film d’Alvaro Bizzarri, « Lo stagionale »). Ils·elles faisaient l’objet d’une xénophobie pouvant aller parfois jusqu’au lynchage, comme le rappelle la dédicace – dans un ouvrage de la regrettée Anne Cuneo, La vermine (Lausanne, Cedips, 1970) – à un jeune immigré assassiné par trois détenteurs du passeport suisse.

Dans ce contexte, relevons la fondation en 1972 d’un Comité pour l’abolition du statut de saisonnier. En 1990, les cantons de Neuchâtel et Genève prirent l’initiative (suivie par d’autres cantons) d’admettre tous les enfants sans statut légal dans leurs écoles. Ce n’est qu’en 2002 que le statut de saisonnier fut aboli grâce aux accords de libre circulation entre la Suisse et l’Union européenne.

 Hans-Peter Renk