Israël

Menace sur la «démocratie israélienne» ?

Comme lors de chaque élection israélienne depuis maintenant 20 ans, les médias nous annoncent qu’il s’agit du gouvernement « le plus à droite de l’histoire d’Israël ».

Des manifestantes portent une pancarte «Jews against Jewish supremacy»
Plus de 80 000 personnes ont manifesté contre un projet de contre-réforme de la justice, Tel Aviv, 14 janvier 2023

Cela ne fait aucun doute. Formé à la fin décembre de l’année passée, le nouveau gouvernement dirigé par le premier ministre Netanyahou, accorde un pouvoir sans précédent à des personnalités extrémistes et intégristes issues d’organisations comme le Parti du Sionisme religieux de Betsalel Smotrich et Force juive d’Itamar Ben Gvir, connus pour leurs propos racistes contre les Palestinien·ne·s et pour leurs positions en faveur de l’annexion d’une partie de la Cisjordanie, ainsi que de Noam d’Avi Maoz, ouvertement anti-LGBTQ.

Dans ce nouveau gouvernement, Smotrich et Ben Gvir sont respectivement en charge des colonies et de leur administration en Cisjordanie et de la police israélienne, dont des unités opèrent aussi dans ce territoire palestinien occupé depuis 1967 par Israël. 

Ben-Gvir a annoncé qu’il avait l’intention de publier des directives autorisant la police à étendre largement les arrestations contre les manifestant·e·s s’opposant aux politiques gouvernementales, y compris israélien·ne·s. 

De son côté, Smotrich a appelé à cibler davantage les groupes de défense des droits humains sur le plan juridique et sécuritaire – les qualifiant de « menace existentielle pour l’État d’Israël » Des plans sont en cours pour taxer les dons des gouvernements étrangers aux ONG de gauche. 

Nouvelles sanctions contre les Palestinien·ne·s

Le nouveau gouvernement israélien n’a pas tardé à prendre de nouvelles mesures contre les Palestinien·ne·s. Dès le 6 janvier, le gouvernement israélien a décrété une série de sanctions, notamment la confiscation de plus de 37 millions d’euros sur les taxes et revenus douaniers prélevés pour le compte de l’Autorité palestinienne afin de les reverser à 15 familles israéliennes de victimes d’attaques palestiniennes ; le gel de projets de construction palestiniens dans la zone C de Cisjordanie, dont l’État d’Israël a le contrôle sécuritaire et administratif exclusif ; l’application en toutes circonstances de l’interdiction de faire flotter tout drapeau palestinien dans l’espace public israélien. 

Le problème principal ne réside cependant pas dans la couleur plus extrémiste de ce gouvernement, mais dans la nature raciste et colonial de l’État d’apartheid israélien. Rappelons que des partis d’extrême droite, comme Yamina dirigé par l’ancien premier ministre Naftali Bennett, étaient déjà présents dans les précédents gouvernements. 

C’est en effet la même politique de judaïsation de Jérusalem et de colonisation des territoires occupés. Les violences contre les Palestinien·ne·s sont permanentes, quelle que soit la couleur du gouvernement. Pour preuve, selon de récentes données publiées par l’ONU et compilées par plusieurs médias, jamais autant de Palestinien·ne·s de Cisjordanie n’ont été tué·e·s en 2022 que depuis la seconde intifada (2000-2005). Le nombre total d’assassinats s’élève à 173, y compris 39 enfants âgés de moins de 17 ans. Cela s’est produit sous un gouvernement soutenu par le soi-disant parti de « gauche » du Meretz, et qui n’a pu exister que grâce au soutien du parti de l’islamiste palestinien Mansour Abbas. 

Pas de démocratie sans libération des Palestinien·ne·s

Il ne s’agit donc pas de sauver une fausse et inexistante « démocratie israélienne ». Étant donné la nature totalement réactionnaire d’Israël, l’hégémonie politique croissante de l’extrême droite ne devrait pas surprendre. Il s’agit en quelque sorte du prolongement logique du mouvement sioniste, de son ethnonationalisme, du racisme institutionnel d’Israël et de plus de sept décennies d’oppression et de dépossession des Palestinien·ne·s.

Aucune lutte pour la démocratie ne peut avoir lieu sans une libération des Palestinien·ne·s et la destruction des structures et institutions de l’État d’apartheid, colonial et raciste d’Israël. 

L’établissement d’un État démocratique, socialiste et laïc dans la Palestine historique, avec des droits égaux pour les peuples palestinien et juif, au sein d’une fédération socialiste à travers le Moyen Orient et l’Afrique du Nord représenterait une alternative progressiste. Dans le nouvel État réunissant Palestinien·ne·s et Israélien·ne·s, toutes et tous les Palestinien·ne·s auraient le droit de retourner sur leurs terres et dans leurs maisons d’où ils·elles ont été chassé·e·s de force depuis 1948. 

En outre, la libération de la Palestine doit également inclure un projet global de développement économique et de reconstruction pour garantir aux Palestinien·ne·s leurs droits sociaux et économiques.

Joseph Daher