Financement de l’AVS: NON à l’augmentation de la TVA

Financement de l’AVS: NON à l’augmentation de la TVA

La TVA, impôt sur la consommation, est socialement injuste car il pèse proportionnellement davantage sur les bas revenus que sur les revenus élevés, malgré les taux différents. Même le Conseil fédéral dans son message sur la 11ème révision de l’AVS/AI de février 2000 le reconnaît: «L’existence du taux réduit de TVA pour les biens de consommation courante diminue l’effet dégressif de la TVA sur les revenus, sans parvenir toutefois à l’éliminer» (pp 1825-1826). Ainsi, chaque élévation du taux TVA creuse davantage les inégalités devant l’impôt en privilégiant les plus fortunés. La nouvelle hausse prévue par le Conseil fédéral consiste à élever de 1,0 point la TVA pour l’AVS et de 0,8 pour l’AI selon un relèvement linéaire. Suite à son introduction en 1995, une première hausse de la TVA a déjà été introduite en 1999 («pour-cent démographique») pour l’AVS/AI.

Non à une politique fiscale au bénéfice des nantis

Après plusieurs refus populaires, la bourgeoisie helvétique a réussi à imposer l’introduction de la TVA, avec l’appui de la social-démocratie. Celle-ci a en effet cédé aux pressions de la droite, sous les prétextes d’une eurcompatibilité et de l’affectation de cet impôt au financement des assurances sociales. Plusieurs dirigeants du PSS ont même plaidé pour une TVA à 15%! L’introduction de la TVA dans l’initiative du PSS et de l’USS «la santé à un prix abordable», même si elle était moins régressive qu’une prime indépendante du revenu, a très probablement contribué à son large échec en votation populaire. Du côté bourgeois, la couleur a toujours été annoncée: progressivement, la TVA doit remplacer l’IFD (impôt fédéral direct).

Depuis des lustres, toute la politique fiscale de la droite cherche à déplacer la charge fiscale des hauts revenus sur les revenus plus bas. L’augmentation de la TVA s’inscrit dans ce mouvement global. Mais plus fondamentalement, les partis bourgeois cherchent à diminuer la pression fiscale globale, en en faisant bien sûr profiter leur clientèle électorale, à savoir les milieux privilégiés. Tout récemment, désavouant ses conseillers fédéraux, le parti radical a rejoint l’UDC pour faire campagne contre la nouvelle augmentation de la TVA. Manifestement, ces partis ont privilégié une stratégie de baisse des prestations, en imposant des baisses de recettes fiscales (politique des «caisses vides»).

Non au chantage du Conseil fédéral

Avec la crise économique et sociale de ces dernières années, les comptes de l’AI sont devenus déficitaires, mais les résultats financiers de l’AVS sont satisfaisants avec un bénéfice en 2003. Pour l’avenir, les projections financières restent très aléatoires, malgré les prévisions de la commission interdépartementale (IDA FiSo). Rappelons ici que la 11ème révision s’inscrit clairement dans une politique globale de réduction de la charge de l’AVS sur la Confédération, comme l’a précisé le Conseil fédéral dans sa conférence de presse du 2 février 2000: «Le Conseil fédéral propose une révision de l’AVS qui devrait réduire à long terme d’environ 1,2 milliard la facture du compte AVS».

Dans la même perspective d’augmentation de la charge sur les salarié-e-s, le président provocateur Couchepin, après avoir fait campagne pour un relèvement de l’âge de la retraite, en fait actuellement une menace concrète en cas de refus populaire de la 11ème révision et de son financement par la TVA.

Pour un financement solidaire

Nous devons nous battre pour un autre financement, sur une base clairement redistributive, à partir de la fiscalité directe et non pas sur la base d’impôts indirects ou de taxes liées à la consommation. Seule la fiscalité directe permettrait d’assurer un financement stable et solidaire de la sécurité sociale.

Deux pistes prioritaires doivent être explorées: une augmentation de l’IFD (impôt fédéral direct) et l’introduction d’un impôt spécifique pour la sécurité sociale, comme la contribution sociale généralisée de type français, permettant de remplacer aventageusement le patchwork actuel.

Un rapide calcul nous montre que pour toutes les prestations de sécurité sociale confondues, la dépense annuelle actuelle est de l’ordre de 100 milliards de francs, dont les trois quarts sont assurés par les employeurs et les employés, le quart restant par les pouvoirs publics. Il faudrait donc assurer un financement de 75 milliards par an, en remplacement des divers prélèvements actuels. Exception faite du 2ème pilier, cela pourrait être réalisé par une échelle progressive d’imposition de l’ordre de grandeur suivante: 2% pour les revenus en dessous de 4000 Frs mensuels, 3% en dessous de 6000, 4 à 7% en dessous de 10000, 8 à 10% en dessous de 15000, et 10 à 15% entre 15000 et 30000, etc. Cette première approximation permet de montrer qu’avec une logique de financement progressif, donc solidaire, la sécurité sociale peut également être garantie sur des bases solides. La question du remplacement de la capitalisation du 2ème pilier par le système de redistribution de l’AVS doit évidemment s’inscrire dans une même logique, mais cela nécessite une phase de transition.

Cette orientation doit être proposée comme alternative au mode de financement actuel, qui non seulement perpétue, mais renforce les inégalités. Le débat doit se poursuivre au sein du mouvement pour l’adoption d’une position commune. A cette fin, la commission sécurité sociale de Genève a produit un documment de réflexion disponnible sur notre site internet ou directement au secrétariat.

Gilles GODINAT