Ni Trump ni Biden ne représentent les intérêts des grévistes

Le 26 septembre, Joe Biden s’est rendu au Michigan pour soutenir les grévistes de l’UAW (United Auto Workers). Un jour plus tard, Donald Trump s’est également rendu sur place. L’enjeu est de gagner de l’influence au sein de la classe ouvrière avant les élections de 2024.

Shawn Fain accueille Joe Biden qui vient soutenir les grévistes de l'industrie automobile
Joe Biden salue le dirigeant du syndicat UAW Shawn Fain lors de son arrivée dans le Michigan

Le fait que le Parti démocrate ait perdu un soutien important au sein de la classe ouvrière a permis à Trump de gagner la présidentielle en 2016. Le soutien de centaines de milliers de travailleurs·euses, qui ont vu leurs conditions de vie s’effondrer et qui sont tombé·es dans la pauvreté des causes de la désindustrialisation, a fait basculer l’élection. Ce soutien s’est particulièrement manifesté dans le Midwest, qui est l’un des cœurs de la classe ouvrière industrielle et un soutien historique du Parti démocrate, créant ainsi ce qu’on appelle le «Mur bleu» des États démocrates. Ces secteurs, point pivot des élections, sont désormais de nouveau « à gagner ».

Gagner le Midwest à tout prix

La lutte de l’UAW est donc une bataille existentielle pour Trump et Biden, car celui qui sera capable de sortir le plus fort, ragaillardi du soutien des grévistes, sera dans une bien meilleure position pour remporter le Michigan, un État incontournable pour les deux candidats. Bien qu’il ait déjà critiqué les dirigeant·es syndicaux·les, Trump a insisté sur le fait que «vos dirigeant·es devraient me soutenir et je ne dirai plus rien de mal à leur sujet». Cette approbation semble peu probable étant donné que le président du syndicat, Shawn Fain, a qualifié ce discours prononcé dans une usine non syndiquée d’«ironie pathétique». Il a également traité Trump de serviteur de la « classe milliardaire » et a refusé de le rencontrer. 

Cependant, les sondages à la sortie des urnes de 2020 ont montré que 40% des membres du syndicat ont voté pour Trump. Il espère ainsi conserver cette base au sein de sa coalition alors qu’il se prépare à affronter Biden pour la deuxième fois en novembre 2024. 

Biden, Musk et «l’approche verte»

Pour Biden, l’accent mis par son gouvernement sur les véhicules électriques fait partie de son objectif de renforcer les États-Unis dans un contexte de concurrence avec la Chine. Le président actuel tente de ramener l’industrie manufacturière aux États-Unis et fait don d’énormes cadeaux aux constructeurs automobiles électriques comme Tesla, qui utiliseront probablement cet argent pour établir des usines débarrassées des syndicats. En effet, l’aide massive de Biden à l’industrie ne garantit en rien que les nouvelles usines seront syndiquées. 

Trump comme éco-activiste

Ironiquement, Trump, bien que négationniste du changement climatique, à tenter de présenter des arguments écologistes contre l’idée de Biden de promotion des véhicules électriques, notamment en soulignant les dommages environnementaux causés par l’extraction du lithium.

Le fait que l’ancien président n’a rien à offrir à la classe ouvrière devrait être évident non seulement par son bilan en tant que président (et en tant que magnat des affaires), mais aussi par le simple fait qu’il a lancé son appel à la classe ouvrière dans une usine non syndiquée et à l’invitation d’un patron antisyndical. 

L’UAW est un acteur central

Utiliser la classe ouvrière de cette manière, comme le font Biden et Trump, ne fait que souligner que ni les républicains ni les démocrates n’ont de véritables réponses aux aspirations des travailleurs·euses. Nous devons suivre l’exemple des ouvriers·ères de l’UAW et exiger plus : plus que ce que l’un ou l’autre parti ne pourra jamais nous donner, plus que ce que le capitalisme ne pourra jamais nous donner. 

La grève de l’UAW a déjà radicalement modifié la course électorale et placé la classe ouvrière au centre de la scène politique. Le défi n’est pas seulement d’assurer le triomphe de la grève, mais aussi qu’elle reste indépendante des deux principaux partis du capital. Il s’agit notamment d’étendre et d’approfondir l’intervention active de la base tant dans les prises de décision que dans les actions sur le terrain.

Conserver l’indépendance 

Ce qui est en jeu, c’est l’indépendance politique et organisationnelle des travailleurs·euses de l’automobile et de la classe ouvrière dans son ensemble, qui ne peut faire confiance ni à Biden ni à Trump. Les partis démocrate et républicain ne nous représentent pas et, comme Fain lui-même l’a dit, les travailleurs·euses ne devraient pas voter pour des millionnaires. 

Une partie de notre tâche consiste donc à créer un parti ouvrier indépendant qui doit adopter une perspective socialiste et lutter constamment contre le régime du bipartisme et ses institutions anti-ouvrières.

Enid Brain  activiste trans et travailleuse du secteur des services à New York
Initialement publié sur leftvoice.org, traduit et adapté par Nadia Badaoui

Le 6 octobre, UAW a mis fin à l’extension de sa grève après avoir remporté une avancée majeure en intégrant les usines de batteries de véhicules électriques au contrat national syndical (ndlr).