Isoler Villepin, repousser le CPE

Isoler Villepin, repousser le CPE

Deux premiers enseignements peuvent être
tirés des manifestations
du 7 février contre le contrat première embauche (CPE) en
France. Il y a d’abord un décalage entre la bataille d’opinion,
qui tourne au désaveu clair et net du premier ministre Villepin, et
sa traduction dans un mouvement social déferlant, qui reste à confirmer.
Ensuite, dans les zones hors vacances scolaires, les manifestations ont été très
significatives: 15000 à Toulouse, 10000 à Montpellier, 15000 à Grenoble,
10000 à Lyon, avec un cortège dynamique de lycéen-ne-s,
1000 à Alès, 1000 lycéen-ne-s dans les rues de Cherbourg,
8000 à Brest, 3000 à Quimper, 3000 à Épinal dont
80% de lycéen-ne-s. Nous assistons au départ d’une lutte
qui doit raffermir ses bases et s’organiser pour durer.

Ce travail de
mobilisation et d’explication des enjeux liés au
CPE, les militant-e-s de la LCR (Ligue communiste révolutionnaire) l’ont
entamé dès le lendemain de la manifestation étudiante
et syndicale du 7 février. Les extraits du tract ci-dessous, intitulé «CPE
= permis de licencier. Il ne passera pas» en témoignent.

«La
journée du 7 février a construit dans la rue une
première coordination de lutte entre les jeunes et les salariés.
Et dans la nuit du 8 février, quelques dizaines de députés
UMP ont voté le CPE. Villepin ironise sur les chiffres des manifestants.
Mais il ne comprend pas qu’un mouvement populaire, unissant les classes
d’âge, et toutes les formes de précarité, est en
train de se construire contre son projet de destruction, pierre par pierre,
du droit du travail. Le contrat Villepin est minoritaire dans tous les sondages
d’opinion. Le mouvement antiprécarité commencé le
7 février va s’amplifier! Le CPE n’instaure pas un
vrai contrat de travail, mais un «permis de licencier» pendant
deux ans. Le représentant du Medef [organisation patronale, réd.]
de Paris le disait sans retenue à France-Info le 7 février: «Nous
ne voulons pas embaucher de jeunes en CDI [contrat de durée indéterminée,
réd.], car on ne peut pas les licencier»
. Avec le CPE, c’est
permis! Or licencier sans motif est contraire aux conventions internationales
du travail. Villepin nous rapproche des pays sans protection sociale! C’est
inacceptable!

CPE et CNE ne s’attaquent pas au chômage!

Le CPE copie le Contrat
Nouvelle Embauche (CNE) dans les entreprises de moins de 20 salariés.
CPE et CNE ne sont pas une solution au chômage.
Ce sont des instruments pour que la peur du chômage se fasse sentir à tout
moment. Ils exercent une menace constante pour que les jeunes ou les salariés
embauchés ne défendent pas leurs droits, n’aillent pas
voir les syndicats, acceptent les heures supplémentaires non payées,
et les surcharges de travail. Déjà, des exemples sont connus
de salariés embauchés en CNE et licenciés pour un oui
ou pour un non. Dans un magasin, un salarié en CNE qui faisait ses courses
hors de ses heures de travail a été viré, parce qu’il était
mal habillé! 25% des jeunes sortis du système scolaire sont au
chômage. Et les deux tiers des étudiants sont obligés de
se salarier pour payer leurs études. En vérité, l’avenir
est bouché. Les patrons utilisent les jeunes, comme par exemple les
stagiaires payés sous le SMIC, pour contraindre le monde du travail à accepter
la précarité générale. Il faut des années à un
jeune pour décrocher un vrai contrat CDI! Si on laisse faire, il n’y
aura plus de CDI.

Ce gouvernement détruit l’avenir

La génération des
18-25 ans sait qu’elle vivra moins bien
que ses parents. En effet, des réformes comme la loi Fillon sur les
lycées, abaissent le niveau des études. Et ce gouvernement relance
l’apprentissage dès 14 ans. Dans la même loi, il rétablit
le travail de nuit, comme au XIXe siècle, pour les adolescents
de 15 ans! Et pour ceux qui se révoltent, comme les jeunes des quartiers
populaires, où le taux de chômage atteint 30 ou 40%, c’est
la répression policière, ou l’expulsion s’ils ont
la malchance d’être étrangers. Madame Parisot, du Medef,
en demande encore plus: suppression de la durée légale du travail,
annualisation du SMIC, extension du CNE-CPE à toutes les entreprises
et tous les âges. Pourquoi se gêner quand on a un gouvernement à sa
botte!

Résistance et mouvement d’ensemble!

Jeunes et salariés,
chômeurs, temps partiels, il est temps d’agir
tous ensemble! Syndicats d’étudiants et de lycéens, syndicats
de salariés, associations de chômeurs, de précaires, de
jeunes stagiaires, partis politiques, mettons toutes nos forces pour un front
unitaire de résistance. Construisons des collectifs unitaires dans toutes
les villes! Mettons en place des coordinations interjeunes en lien avec les
salariés. Après le 7 février, pourquoi pas une vraie
grève générale interprofessionnelle? Villepin doit reculer,
comme Balladur avec le SMIC jeunes de 1994. Ce gouvernement a été plusieurs
fois battu dans les urnes. Combattons-le dans la rue et par la grève!
Sans attendre 2007.»

Daniel SÜRI