Opération séduction du gouvernement: les femmes ne sont pas dupes

Opération séduction du gouvernement: les femmes ne sont pas dupes

A la veille de la journée internationale des femmes, le conseiller d’Etat socialiste Jean Studer, responsable de l’Office de la politique familiale et de l’Egalité (OPFE), tenait conférence de presse, entouré pour l’occasion (!) de plus de femmes que d’hommes… Quelle était la bonne nouvelle? «Le Conseil d’Etat entend appliquer une véritable politique familiale et d’égalité au sein de l’administration cantonale» et corriger les inégalités les plus flagrantes. La représentation féminine parmi les cadres devra, à l’avenir, être renforcée. Assouplissement de l’horaire pour permettre de mieux concilier tâches éducatives et travail salarié, encouragement des candidatures féminines au niveau des offres d’emploi, postes à temps partiel accessibles aussi aux hommes. Bref, le Conseil d’Etat annonce une série de mesures «réalistes et peu coûteuses».

Dans l’administration cantonale, 87% des chefs de services sont des hommes. C’est dire le retard pris sur le plan de la promotion des femmes et de l’égalité des chances. Mais la mise en œuvre des mesures sensées apporter un coup de fouet à l’égalité est confiée au chef du Service des ressources humaines et non à la déléguée de l’OPFE (Bureau de l’égalité). Une (habile?) manière d’avoir l’air de faire ce qu’il faut…

Autre inquiétude. Le 24 février 2006, on pouvait lire dans la Feuille officielle, que dorénavant, l’action de l’OPFE se réduira au personnel de l’administration cantonale. Sous prétexte qu’il veut «montrer l’exemple» (à qui? aux autres employeurs?), le Conseil d’Etat fait fi des intérêts de toutes les femmes et familles qui ne relèvent pas de l’administration cantonale. Comme le dénonce Catherine Laubscher Paratte (cheffe du premier Bureau de l’égalité fermé en 1995, par décision du Conseil d’Etat neuchâtelois): «En 1995, la population a imposé la réouverture d’un bureau de l’égalité par la voie d’une initiative populaire. La loi cantonale qui en a résulté «a pour but de favoriser la recherche de solutions permettant de contribuer en priorité à la mise en œuvre de la politique familiale et de promouvoir l’égalité entre hommes et femmes» (article premier). Cette loi instaure un office pour toutes les femmes et familles du canton. Restreindre le champ d’intervention de l’OPFE à la seule administration est contraire à la loi. C’est inadmissible.»

Hostile aux femmes

Depuis qu’il est en place, le nouveau gouvernement s’est distingué par des mesures hostiles aux femmes:

  • août 2005: annonce de la non prise en charge par l’Etat des frais occasionnés par une mammographie, un examen préventif, essentiel pour les femmes;
  • décembre 2005: suppression de l’allocation maternité cantonale destinée aux mères qui disposent d’un revenu mensuel de moins de 2500 francs (3500 francs pour les couples). En 2005, 200 femmes avaient bénéficié de cette allocation versée pendant la première année après la naissance de l’enfant;
  • Diminution des subventions cantonales pour l’assurance maladie (une perte importante pour les familles les plus pauvres du canton);
  • Diminution de l’aide sociale, mesure qui touche lourdement les femmes, puisque parmi les plus pauvres, on compte, chacun le sait, plus de femmes que d’hommes.
  • Blocage du plan d’équipement cantonal en matière de structures d’accueil de la petite enfance.

La Marche Mondiale proteste

Le groupe neuchâtelois de la Marche mondiale des femmes a adressé une lettre de protestation au Conseil d’Etat, lui demandant:

  • de mettre concrètement en œuvre le plan d’équipement cantonal en matière de crèches;
  • de renoncer immédiatement à toutes les mesures négatives qui touchent les personnes et les familles les plus démunies;
  • de donner mandat à l’OPFE de mener des campagnes de sensibilisation à l’égalité tout en aidant – en collaboration avec les syndicats et les associations féminines – les femmes à faire valoir leurs droits, en particulier en matière salariale.

Avant les prochaines élections, il ne reste plus que 3 ans au Conseil d’Etat pour corriger ce qu’il a si mal commencé, mais cela impliquerait de rompre clairement avec les orientations libérales dominantes pour mener une politique… de gauche.

Marianne EBEL