Stop aux marchands de mort non aux exportations d'armes!

Stop aux marchands de mort non aux exportations d’armes!

Le 30 avril à Berne, le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) a décidé de lancer une initiative contre l’exportation d’armes. Nous avons rencontré notre camarade Luc Gilly, présent à l’assemblée générale qui a voté le lancement de cette initiative. Rappelons que Luc est membre de solidaritéS et est engagé au GSsA, dont il a été secrétaire, pendant plusieurs années.

Pour quelle raison le GSsA a-t-il décidé de lancer une initiative contre l’exportation d’armes?

On a observé que depuis l’initiative du PS contre les exportations d’armes – refusée par le peuple en 1997, à plus de 75% – la révision de la loi sur le matériel de guerre de 1998 a encore assoupli la pratique de la Suisse en matière d’exportations d’armes. Malgré certaines restrictions, de plus en plus de permis d’exportation sont concédés pour exporter de l’armement dans les régions en conflit.
L’été dernier, le Conseil fédéral voulait exporter des chars en Inde, au Pakistan, et en Irak, via l’Arabie Saoudite. Face au tollé et aux pressions de la gauche et de l’opinion publique, il a du reculer! Entre 2001 et 2004, plus du quart des exportations s’est fait en direction des pays participant à la prétendue «guerre contre le terrorisme». Depuis 1998, les exportations se sont accrues de 81%. Officiellement la Suisse a exporté pour 260 millions de francs l’an dernier, mais ce chiffre est largement sous-estimé. Pour des raisons indépendantes de la volonté des autorités fédérales, la Turquie a refusé d’acheter des avions Pilatus, prétendument civils, pour un montant d’un demi-milliard. Ces avions sont destinés traditionnellement à un usage militaire. Une vielle histoire qui démontre la volonté de notre gouvernement d’accroître les exportations d’armes. La société d’armement RUAG, propriété de la Confédération, a exporté 32 avions Tiger aux USA; une entreprise helvétique collabore également avec Israël pour développer des drones, qui serviront par exemple aux exécutions dites ciblées de l’armée israélienne.

Est-ce que la question du rôle des banques suisses dans le commerce d’armes est posée? Amnesty international a récemment épinglé une société israélienne opérant depuis la Suisse avec un partenaire commercial basé en Suisse, pour exporter des armes en direction de l’Irak, l’Afghanistan, etc.

L’initiative est très concrète. Mais à l’heure actuelle, le financement des ventes d’armes, le courtage, est très difficile à vérifier. L’initiative interdit le courtage et le commerce de matériel de guerre lorsque leur destinataire a son siège ou son domicile à l’étranger.

Quelles sont les forces prêtes à soutenir l’initiative?

Le GSsA a formé une coalition autour de cette initiative. Elle regroupe les Jeunesses socialistes suisses, A gauche toute (PST, Listes alternatives et solidaritéS), Christliche Friedensdienst. Les Verts devraient l’approuver prochainement. Et on espère l’adhésion du PS, et de nombreuses organisations progressistes et pacifistes, ainsi que des syndicats.

Ne crains-tu pas un score aussi décevant qu’en 1998?

Non, évidemment! La grande différence avec l’initiative précédente, c’est que l’article de loi pour l’interdiction du matériel à double usage (civil et militaire) a été supprimé. Les milieux favorables à l’exportation d’armes avaient fait l’essentiel de leur campagne sur ce sujet, avec parfois l’aide des syndicats. La droite avait brandi l’«argument de la vis», qui peut aussi bien servir à la construction de chars qu’à la fabrication de montres… Avec cet exemple, elle faisait planer une menace sur des dizaines de milliers d’emplois. Aujourd’hui, un millier d’emplois pourraient être mis en cause si l’initiative passait, mais la Confédération serait tenue de soutenir, pour une période de dix ans, les régions et les emplois des industries menacées en faveur d’une reconversion civile. Il est piquant de voir que la droite crie au scandale dès qu’il s’agit de places de travail liées à l’armement et à la guerre, mais qu’elle justifie toujours les licenciements liés à des restructurations, à des délocalisations, à des privatisations, etc.

Le contexte politique a bien changé depuis 1998, lors de la première guerre d’Irak, une très large coalition de pays s’était laissé entraîner derrière Georges Bush senior, les bombardements contre la Serbie se faisaient sous le couvert de «guerres humanitaires»…

Ces opérations n’ont pas fait recette, elles se sont soldées par des échecs, le monde n’est pas devenu «plus sûr», bien au contraire! Depuis le 11 septembre 2001 les gouvernements justifient leurs augmentations de budgets militaires au nom de la lutte contre le terrorisme. La Suisse est en complète contradiction avec sa volonté revendiquée d’aide au développement, de désarmement, de politique de paix, de droits humains, de politique solidaire, etc, alors qu’elle participe indirectement aux conflits en exportant des armes et entrave donc les processus de paix. La Suisse est également en contradiction avec les conventions internationales qu’elle a ratifiées après son entrée à l’ONU. Plus fondamentalement, il faut rappeler qu’il est inadmissible de profiter des guerres, pour vendre des armes et de s’enrichir.

Quel est le calendrier de récolte de signatures?

En principe, la récolte débutera fin juin, début juillet, et nous appelons tout le monde à y participer activement pour réunir plus de 100 000 signatures en dix-huit mois.

Propos recueillis par Daniel KÜNZI

Adresse de contact pour soutenir les activités du GSsA et la récolte de signatures: gssa@gssa.ch, tél.: 022 3204676. Pour se documenter: http://www.gssa.ch/