Honduras: « normalisation », répression et résistance
Honduras: « normalisation », répression et résistance
Circulez, il ny a plus rien
à voir ! voilà la vision dominante en ce qui
concerne la situation au Honduras : avec un nouveau
président, la démocratie serait de retour, et le coup
dEtat de juin 2009 semble navoir jamais existé.
Les médias font silence sur une répression qui se
poursuit et sur une résistance populaire qui ne baisse pas les
bras.
Les commanditaires du putsch de juin 2009 (loligarchie
hondurienne et les USA) peuvent se targuer davoir
empêché le retour du président Zelaya et
assuré la transition grâce à Porfirio Lobo.
Phénomène inquiétant, le Honduras est le prototype
du « coup dEtat du 21e
siècle » : contre un exécutif
favorable à des réformes sociales, loligarchie
utilise un autre pouvoir (législatif) pour légaliser un
putsch militaire, sans junte de généraux sur le
modèle chilien ou argentin des années 1970. Ce
scénario pourrait bien être utilisé au Paraguay
contre Fernando Lugo (vainqueur des dernières élections
présidentielles), qui coexiste avec une majorité
parlementaire de droite.
Le 27 janvier 2010, Porfirio Lobo a donc
remplacé Roberto « Goriletti » (promu
député à vie). Le Parlement hondurien a
amnistié les putschistes et voté la rupture du Honduras
avec lALBA (Alliance bolivarienne des peuples de notre
Amérique), signal du retour au statu quo ante.
La répression continue
La « démocratie à la sauce
putschiste » implique la répression. Le
Comité hondurien des familles de détenus disparus
(COFADEH) a dénoncé les menaces dattentat
quil a reçues par téléphone le 7
février.
Quelques cas dénoncés par les organisations de défense des droits humains :
- Le 2 février, 2 photographes Manuel de
Jesús Murillo Varela et Ricardo Rodriguez furent
séquestrés pendant plusieurs heures par des policiers en
civil dans une prison clandestine ; le même jour, deux
résistants Ariel Lobo et Richardo Dominguez
furent aussi séquestrés (quelques mois auparavant, Ariel
Lobo avait déjà été enlevé par des
soldats et des civils armés) ; - Dans la nuit du 3 février, fut retrouvée morte une
jeune infirmière, Vanessa Zepeda (militante du Syndicat des
travailleurs de lInstitut hondurien de sécurité
sociale), enlevée la veille après avoir subi de
nombreuses pressions de la part de sa hiérarchie pour son
opposition au coup dEtat.
Ces cas ne font pas la « une » des
médias européens et étatsuniens. Ils
démontrent la vraie nature dun régime, qui a
réactivé les « escadrons de la
mort » des années 1980, peut-être avec le
renfort de paramilitaires colombiens, prétendument
démobilisés.
La Résistance ne baisse pas les bras
Le Front national de résistance populaire (FNRP) reste pourtant
mobilisé pour une lutte de longue durée. Le 27 janvier,
des centaines de milliers de manifestant·e·s
défilaient à Tegucigalpa et à San Pedro Sula pour
dénoncer le président fantoche et lamnistie des
militaires, en réaffirmant lobjectif stratégique
du mouvement populaire : une Assemblée constituante
souveraine. A Tegucigalpa, 350 000 personnes (estimation
modeste) se sont rendues à laéroport pour saluer
le départ de Manuel Zelaya (momentanément exilé
à Saint Domingue, mais qui devrait se rendre prochainement au
Mexique). Signe des temps : aucun président navait
jamais reçu un tel témoignage de popularité en fin
de mandat. « Aujourdhui, le peuple nest pas
venu simplement prendre congé du président Manuel Zelaya,
il est venu demander la refondation du pays » (Bertha
Caceres, dirigeante du COPINH, Conseil civique des organisations
populaires et indigènes du Honduras). Parmi les
manifestant·e·s, signalons la présence du
collectif les « Féministes en
Résistance », et ses slogans : « Ni
coup dEtat, ni coups contre les femmes ! »,
« Brûlons luniforme des militaires
putschistes et violeurs ! »
(référence directe aux méthodes répressives
de ceux-ci).
Face au silence médiatique,
contre-information et solidarité avec la résistance
populaire restent indispensables.
Hans-Peter Renk
Lalliance du sabre et du goupillon
Pour le soutien de la hiérarchie catholique au putsch (les
communautés de base appuient le FNRP),
larchevêché de Tegucigalpa avait
récolté un tag : « Cardenal
golpista ! ». Vu la présence du Vatican le
27 janvier, on peut rajouter : « Papa
golpista ! ».
Ce serait encore gentil pour Josef Ratzinger (alias
Benoît XVI), si lon pense aux propos virulents du
révolutionnaire italien Giuseppe Garibaldi en 1869 contre le
comte Giovanni Maria Mastaï Ferretti (dernier roi des Etats de
lEglise sous le pseudonyme transparent de Pie IX). Garibaldi
navait pas hésité à traiter le souverain
pontife de « mètre cube de
fumier »
HPR
Le festival des hypocrites
Présents à linvestiture de Porfirio Lobo :
les présidents du Panama, de la Colombie, de la
République Dominicaine et de Taïwan ; pays
représentés : Australie, Colombie, Etats-Unis,
Canada, Inde, Israël, Japon, Liban, Malte, Vatican, Pérou,
Turquie
et la Suisse (qui ne pouvait pas manquer à
lappel, vu le manque de courage politique de
« nos » gouvernants).
LUnion européenne
saligne : lEspagne, la France, lItalie et
lAllemagne ont rétabli les relations diplomatiques. Par
ailleurs, le parti libéral allemand FDP a soutenu la nomination
de Roberto « Goriletti » à la
vice-présidence de lInternationale libérale (dont
le Parti libéral-radical suisse est membre).
La secrétaire dEtat US Hillary Clinton
a annoncé la reprise dune aide interrompue pour donner le
change sur les intentions des USA commanditaires
avérés du coup dEtat, à linsu du
plein gré de Barack Obama.
HPR