Venezuela

Venezuela : L'anti-impérialisme est davantage qu'un slogan

Cette lettre de lecteur poursuit le débat sur la situation au Venezuela que nous avons initié dans le cahier émancipationS du numéro 343.


Cancilleria Venezuela

«Ni Guaidó, ni Maduro!» titrait solidaritéS dans son numéro 343, reprenant le mot d’ordre du dirigeant de Marea socialista, Gonsalvo Gomez. La défaite cuisante infligée le 23 février par le peuple bolivarien aux forces impérialistes a permis au journal de se sortir d’une position potentiellement intenable.

Imaginons une seconde que les provocations de Guaido et la mise en scène des médias aient réussi à entraîner temporairement le pays dans le chaos, les affrontements armés massifs, voire l’embrasement général de la région. Quelle position aurait pris notre mouvement?

L’anti-impérialisme ne saurait être qu’un slogan tracé à la peinture sur l’écran d’une révolution rêvée. La question est très pratique. Quels que soient ses éventuels doutes, mécontentements, critiques, agacements, dénonciations, le peuple vénézuélien en lutte l’a bien compris: scrutin après scrutin, mobilisation après mobilisation, dans son organisation quotidienne, il a «choisi son camp».

Heureusement. Car, semble-t-il, Gomez et ses camarades ne feraient guère le poids pour offrir une quelconque résistance aux menées impérialistes. Juste après les présidentielles de mai 2018, Gomez claironnait: «68% du corps électoral n’a pas voté pour Maduro». Or, selon le même calcul, ce sont 99,8234% qui n’ont pas voté pour «l’unique candidat de gauche non maduriste», issu de cette «marée socialiste». Par de quoi terroriser les Yankees et les forces fascisantes de l’opposition! D’autant que le guignol de Washing-ton s’était à peine auto-proclamé, que ce même Gomez s’était empressé de répondre, le 5 février déjà, à son invitation à discuter de l’avenir du pays.

Certes tout soutien doit être critique, vigilant. Surtout quand on a affaire à un pays comme le Venezuela où, depuis près d’un siècle, la rente pétrolière joue un rôle si central dans le développement ainsi que dans les rapports entre classes et internationaux. Qui adopte la perspective d’une (longue) transition, souhaitable mais aussi pratique, vers le socialisme doit tenir compte des réalités concrètes des lieux, moments et contextes de chaque lutte. Et si puiser à plusieurs sources est une bonne chose, certains courants de la «gauche de la gauche» européenne accordent un fort crédit aux unes et n’ouvrent guère leurs pages aux autres.

Or, ne serait-ce qu’en français, les textes et interviews abondent. Il suffit de faire quelques re-cherches pour avoir d’autres sons de cloche sur le Venezuela: Thierry Deronne, Romain Migus, Maurice Lemoine, Alfred de Zayas (rapporteur onusien), ou encore les sites comme Medelu, Venezuela–infos, Investig’action, pour ne citer qu’eux.

Florian Rochat