Quand Barak et Natanyahu plaident pour l'Apartheid

Quand Barak et Natanyahu plaident pour l´Apartheid

A la mi-décembre, pour la deuxième fois, le gratin
israélien tenait une conférence sur le thème « Bilan
de la puissance israélienne et de la sécurité nationale ».
Cette rencontre était organisée par le Dr. Uzi
Arad, ancien conseiller pour la sécurité politique
de Natanyahu et ancien responsable de la recherche
du Mossad. Parmi les orateurs, on remarquait
notamment le chef d’état-major Shaul Mofaz, les
anciens Premiers ministres Ehud Barak et
Binyamin Netanyahu, le Ministre de la défense
Binyamin Ben Eliezer, le Directeur du Mossad
Ephraim Halevy, le Ministre des affaires étrangères
Shimon Peres, ainsi que l’ancien Directeur de
la CIA Jim Welsey. « La réunion la plus réactionnaire
à laquelle j’aie jamais participé », note Gershon
Baskin, responsable de l’IPCRI, présent dans l’assistance.
Il en fait le bref compte-rendu suivant,
qui souligne l’étonnante convergence des positions
de Barak et Natanyahu. Cela donne, sans
aucun doute, « une très bonne image de la pensée
dominante en Israël aujourd’hui ». Ce plaidoyer en
faveur d’un véritable apartheid, montre combien il
est urgent de relancer un vaste mouvement de
soutien au peuple palestinien.
Réd.

« Le 11 septembre marque un tournant dans les
relations internationales dont l’Etat d’Israël a déjà
bénéficié et continuera à bénéficier. Les Etats-Unis et
le monde occidental ont aujourd’hui une compréhension
claire des dangers du terrorisme et mènent une
guerre mondiale pour l’éliminer de la surface de la
terre. Les Etats-Unis ont maintenant adopté et soutiennent
la position d’Israël sur le terrorisme (…) La
guerre mondiale contre le terrorisme va se poursuivre
après l’Afghanistan, en direction de la Somalie, du
Soudan, du Liban et de la Syrie. L’Irak et l’Iran sont
aussi sur les écrans radars des Américains et leur sort
sera aussi réglé d’une manière ou d’une autre. Il est
inconcevable que Saddam Hussein soit encore en place
lorsque la guerre contre le terrorisme sera achevée.
Grâce à la position des Etats-Unis, le monde entier
comprend aujourd’hui qu’il n’y a pas de « bon » et de
« mauvais » terrorisme. Tous les terrorismes sont mauvais
et aucun Etat ne devrait faire de compromis avec
eux. Le terrorisme doit être détruit. Il n’y a pas de
mesures de dissuasion efficaces contre les attentats
suicides. La dissuasion passe par l’attaque des Etats et
des régimes qui soutiennent et encouragent le terrorisme.
Ceux à qui l’on ne peut pas faire comprendre qu’ils
doivent arrêter de soutenir le terrorisme et détruire ses
infrastructures vont en payer le prix en cessant d’exister.
La politique des Etats-Unis et les actions contre les
Talibans devraient contribuer à dissuader d’autres régimes,
y compris l’Autorité Palestinienne (…)

Pas de paix avec Arafat

Israël doit prendre conscience que la conclusion d’un
accord de paix avec les Palestiniens est peu probable
en ce moment et dans un futur prévisible. Arafat n’est
pas un interlocuteur. Il ne veut pas accepter l’existence
de l’Etat d’Israël comme il se définit lui-même, c’est-àdire
comme un Etat Juif. Quand Arafat revendique le
droit au retour, cela signifie qu’il veut un Etat palestinien
dans les frontières de 1967 et un Etat bi-national en
Israël. Pour Israël, ce n’est pas un point de départ
acceptable. Tant que les leaders palestiniens ne décideront
pas vraiment d’accepter Israël comme un Etat Juif
et de renoncer explicitement au droit au retour, il n’y
aura pas d’accord mettant fin au conflit. Comprendre
qu’il ne peut pas y avoir d’accord de paix qui mette fin
au conflit requiert d’Israël une prise de responsabilité
directe pour sa propre sécurité et son avenir.

Un plan d’apartheid

Tout en combattant activement le terrorisme, Israël
devrait mener une politique unilatérale de séparation
« nous ici et eux là-bas ». Ce plan doit être mis en oeuvre
dans un délai de 4 ans. Il doit être détaillé et
annoncé au monde entier. Si les Palestiniens l’acceptent,
il peuvent collaborer et trouver des moyens d’en
tirer profit; s’ils ne collaborent pas, Israël doit le réaliser
selon sa propre conception. Le plan vise à créer 5
colonies séparées sur 12 à 13% du territoire de la
Cisjordanie. La vallée du Jourdain, qui représente
environ 12% de la Cisjordanie, resterait entre les
mains d’Israël. Toutes les colonies isolées seraient
évacuées, mais pas tant que la violence continue.
L’objectif serait de reloger tous les colons déplacés,
sur une période de 4 ans, nécessaire à la construction
de nouvelles maisons et au rétablissement du calme
et de la tranquillité, avant qu’Israël n’évacue la moindre
colonie.Les 5 zones prévues regroupent déjà 80%
des colons. Les colonies isolées représentent les 20%
restants. Israël construira les barrières, barrages,
murs et points de passages nécessaires pour assurer
sa sécurité et celle de sa population. Il est concevable
d’imaginer qu’une main-d’oeuvre palestinienne puisse
continuer à travailler en Israël après la mise en oeuvre
du plan de séparation (…)

Un Bantoustan en Palestine?

Les Palestiniens peuvent proclamer un Etat sur les territoires, derrière les barrières. Israël ne renoncera pas
au droit de veiller à sa propre sécurité dans un périmètre à prévoir autour de l’entité palestinienne. Israël
contrôlera les frontières internationales de l’Etat palestinien. Israël doit toujours laisser une porte largement
ouverte à des négociations, lorsque le leadership palestinien sera capable de relever le défi de revenir à la table
de négociations. Cela ne pourra être qu’après que les
Palestiniens auront mis fin avec succès au terrorisme
contre Israël. Il faut provoquer l’effondrement du régime palestinien. Arafat doit comprendre ce qu’il en
coûte de rompre des accords, et le seul prix qu’Arafat
et ses partisans comprennent c’est la perte de leur régime. Aucun régime qui se développerait après Arafat ne
pourrait être pire qu’Arafat. Le niveau de la sécurité ne
peut pas être pire qu’aujourd’hui. Si Hamas prend le
pouvoir, une possibilité dont Natanyahu doute, la
marge de manoeuvre d’Israël serait étendue par rapport à l’opinion publique internationale.

Pas de droit au retour

Israël devrait exprimer son sincère désir de réouvrir
des négociations avec les Palestiniens. Le premier
point serait la question des réfugiés. Si les
Palestiniens refusent de déclarer explicitement qu’ils
acceptent de renoncer au droit au retour pour les réfugiés palestiniens, alors il n’y aura pas de négociation
sur d’autres points. Si Israël construit une barrière,
elle devra être à sens unique: les Palestiniens ne pourront pas entrer en Israël, mais Israël conservera le
droit de pénétrer dans les territoires palestiniens si les
Palestiniens ne combattent pas effectivement le terrorisme. Une barrière est un moyen et non une alternative à une solution politique ou diplomatique. Ce
moyen doit être pris en considération, mais la question la plus importante c’est le tracé précis de cette
barrière. En aucun cas, elle ne devrait être établie le
long des frontières de 1967, ce qui rapprocherait les
Palestiniens d’Israël. Tant qu’il n’y aura pas un régime palestinien digne de confiance, la question de l’Etat
palestinien ne pourra être posée. Un Etat palestinien
souverain supposerait qu’Israël lui laisse contrôler
son propre espace aérien, ses ressources en eau, ses
frontières extérieures, etc. Toutes ces questions constituent une menace stratégique existentielle pour l’Etat
d’Israël, (…)
»

(Propos rapportés par Gershon Baskin, co-directeur du Israel/Palestine
Center for Research and Information (IPCRI). Extrait d’un e-mail du
19.12.01. Traduction, titre et intertitres de la rédaction.)