Tractebel électrise le Pérou!

Tractebel électrise le Pérou!


Etat d’urgence, suspension des libertés publiques, mobilisation de l’armée, de la police, de blindés, mort d’homme, arrestations massives… le gouvernement péruvien a mis le paquet pour réprimer le vaste élan de protestation populaire qui a mis en mouvement des milliers d’hommes et de femmes à Arequipa, la seconde ville du Pérou, dans les Andes, à 750 km au sud-est de Lima, après l’annonce de la privatisation de deux sociétés électriques publiques Egasa et Egsur, dont la production alimente une grande partie du sud du pays. Cette transaction passait outre à une décision de justice s’y opposant. Hausses de prix et suppressions d’emplois étaient à l’ordre du jour…



Les deux entreprises électriques ont été vendues le 14 juin pour 167.4 millions de dollars au groupe belge Tractebel, filiale de Suez-Lyonnaise des Eaux, qui fait par ailleurs l’objet au Pérou depuis plusieurs mois d’une procédure judiciaire pour corruption. La société belge en question aurait en effet versé des pots-de-vin de plus de10 millions de dollars au président destitué Alberto Fujimori entre 1996 et 1998.



Dans un premier temps, le président péruvien Alejandro Toledo, dont la cote de popularité est descendue à 20%, annonçait qu’il ne reviendrait pas sur sa décision et qu’au contraire d’autres opérations similaires étaient en préparation par la gouvernement. Ceci malgré que le bradage d’Egasa et Egsur soit contraire à un «engagement solennel» de ne jamais privatiser ces deux sociétés, pris l’an dernier au moment des élections.



Ces déclarations ne firent que renforcer la mobilisation populaire et l’étendre à d’autres villes, dont Tacna à la frontière chilienne. Grève générale de deux jours transformant tout le sud du pays en région morte, barricades, cacerolazos quotidiens, barrages de routes et de chemins de fer, grève de la faim d’élus locaux… le Pérou a vécu une riche semaine de lutte de masse ! Toledo a été contraint d’annuler un voyage prévu aux Etats-Unis… Le mouvement anti-privatisation dans le Sud a en outre coïncidé avec une grève des transports de passagers largement suivie pendant 48 heures dans l’ensemble du pays.



Le 20 juin, on apprenait que le gouvernement péruvien – forcé et contraint -avait pris la décision de suspendre les privatisations contestées et que le président Toledo présentait des excuses publiques à la population d’Arequipa…



Et il y en a qui considèrent que la déréglementation et la privatisation du secteur électrique sont une fatalité et que des groupes comme Suez- Lyonnaise des Eaux et ses filiales sont incontournables dans le paysage énergétique helvétique. C’est aussi en solidarité …avec le peuple péruvien, qu’il faudra le 22 septembre dire NON à une LME qui ouvre grand la porte aux requins multinationaux du secteur énergétique. Pour que nos régies publiques du secteur électrique, de Genève à Lausanne, en passant par Zurich et le Tessin, ne prennent pas le chemin sur lequel on a tenté de pousser Egasa et Egsur…

(os)