EKZ: Privatisierung ? Nein danke !
EKZ: Privatisierung ? Nein danke !
«Les Zurichois ont le sort dAxpo entre leurs mains» titrait le Temps récemment 1 à propos du vote cantonal zurichois du 10 juin sur le statut de la compagnie électrique cantonale EKZ.
Les citoyen-ne-s ont tranché dimanche dernier en disant NON à 51,4 % à la transformation en SA de droit privé des EKZ, entreprise publique du secteur électrique, aujourdhui à 100% au mains du canton de Zurich, que les autorités avaient le projet de fondre rapidement dans une nouvelle entité dénommée Axpo. Cette société de droit privé, active depuis janvier 2000, est aujourdhui une simple entreprise de vente et de trading, au capital de 20 millions de francs, qui sest livrée en Suisse allemande à une débauche de marketing effrénée depuis des mois. Mais Axpo a surtout été conçue, comme nouvel avatar des NOK 2, dans la perspective de louverture du marché de lélectricité grâce à la la LME 3, pour phagocyter les entreprise de Zurich, Saint-Gall, Appenzel, Thurgovie, Argovie et Schaffhouse.
Concentration capitaliste
Il sagissait darriver à une «intégration totale et opérationnelle» avant 2003, conduisant à un chiffre daffaire annuel de départ de près de trois milliards de francs dans la perspective dune extension agressive, y compris en Suisse romande, et de pouvoir jouer dans la cour des grands à léchelle européenne, en entrant en bourse et en se liguant avec lune ou lautre des multinationales géantes qui visent la domination du marché continental ainsi que les profits juteux quelles en escomptent. Signalons au passage quà fin 1999 au moment de la mise en route de ce qui devait être le rouleau compresseur Axpo, lex-conseiller dEtat zurichois, placé à la tête des EKZ et annoncé comme futur président dAxpo, dévoilait le volet «écologique» de sa philosophie en termes on ne peut plus clairs: «Les programmes déconomie dénergie et le marché ne vont pas ensemble. La politique se prononce pour le marché et relègue ainsi automatiquement les objectifs déconomie à larrière plan.» Pour lui, cest clair: «Le marché implique la promotion de la consommation de courant».4
Mais ce projet néolibéral et anti-environnemental, vient dêtre ébranlé par le tremblement de terre constitué par le vote zurichois. Les NOK actuels ne pourront aujourdhui être dissous dans Axpo comme prévu et la fusion projetée des compagnies locales est compromise. Le commentateur du Temps, avant ce vote, le présentait, comme: «un précieux indicateur de laptitude de la population à accepter les enjeux de louverture du marché, qui passe obligatoirement par un transfert de pouvoir politique à des entités économiques souples…» déplorant en outre qu«une partie de la population se sent émotionnellement dépossédée dun bien public, comme elle a le sentiment de lavoir été en perdant la régie des PTT».
La Bourse aux commandes ?
Et en effet, il semble que le démontage des PTT et en particulier loffensive actuelle, visant à démanteler le réseau des bureaux de poste, ait amené des larges couches de citoyen-ne-s à refuser linéluctabilité prétendue des privatisations et leur cortège de conséquences négatives pour le service public et la sécurité de lapprovisionnement. Dans Le Temps on pouvait lire encore: «Les enjeux économiques dun simple refus politique du passage à une structure de société anonyme (SA) sont énormes. De cette nouvelle forme juridique dépend le dynamisme et la capacité concurrentielle dune société […] les Elektrizitätswerke des Kantons Zürich (EKZ) pourront échanger des actions et conclure rapidement des alliances en fonction de lévolution du marché de lélectricité dont une partie de plus en plus importante se traitera en Bourse comme nimporte quelle matière première».
Et cest bien une manifestation du refus du primat absolu de la logique marchande «dynamique et concurrentielle» conduisant lélectricité à faire lobjet de spéculations en bourse «comme nimporte quelle matière première», qui sest produite à Zurich. Du côté des partisans du projet on cherchait, au lendemain du vote, à présenter celui-ci comme simplement émotionnel, irrationnel, etc. Or, au contraire, le vote zurichois, qui vient renforcer le vote communal de lan dernier refusant la privatisation des EWZ, lentreprise électrique municipale de la Ville de Zurich, est parfaitement rationnel. En particulier, au feu de cette campagne, les sophismes des libéraux à étiquette «socialiste», qui cherchent désespérément à distinguer louverture des marchés prévue par la LME et la privatisation des entreprises publiques, a volé en éclats.
Privatisations et libéralisation: un même processus
Cest en effet bien dans la logique de la LME que la privatisation en question a été initiée, et cest bien au nom du refus de la marchandisation de lélectricité, dont la crise californienne illustre bien les résultats, que le rôle direct de lEtat et du service public a été confirmé par une majorité de citoyen-ne-s. Bien au-delà des secteurs syndicaux ou de gauche traités avec mépris par certains d«ar-chaï-ques» ou de «conservateurs». Nous publions ici , une brève interview, réalisée à chaud au soir du vote, de notre ami Niklaus Scherr, de lAlternative Liste de Zurich, qui a été lun des piliers de la campagne référendaire zurichoise, comme il lest du combat national contre la LME. Nous reviendrons par ailleurs prochainement sur lautre vote «électrique» de ce week-end, celui par lequel les Fribourgeois-e-s ont malheuerusement accepté, dans un contexte différent de celui de Zurich, la transformation en SA des Entreprises Electriques Fribourgeoises (EEF).
- Le Temps du 7.6.01
- NOK: Nordostschweizerische Kraftwerke société électrique intercantonale, comme lest EOS en Suisse romande. Les NOK sont lexploitant de la centrale nucléaire de Beznau.
- LME: Loi sur le Marché de lélectricité
- Citations de C. Rogenmoser tirées du TagesAnzeiger du 25.11.99