Réponses à quelques questions concernant nos initiatives «Pour le droit à un salaire minimum»

Réponses à quelques questions concernant nos initiatives
«Pour le droit à un salaire minimum»

A Genève, la récolte de
signatures en faveur
de l’initiative de solidaritéS «Pour le droit à un salaire minimum» a commencé le 20 juin. En deux semaines et demie, au moment où nous mettons sous presse, plus de 4500 paraphes ont déjà été récoltés… sur les 12000 (10000 + 2000 de marge de sécurité) que nous devons recueillir en 4 mois. C’est dire si nos stands rencontrent du succès dans la rue! Si la plupart des gens signent sans discussion, nous avons voulu répondre ici à quelques questions qui reviennent souvent…

1. Pourquoi ne pas avoir indiqué le montant du «salaire minimum» dans l’initiative?

L’initiative vise à construire un rapport de forces pour fixer dans un premier temps le principe d’un salaire minimum qui garantisse des conditions de vies décentes. Imposer la reconnaissance de ce principe d’abord est à nos yeux la meilleure base pour ensuite discuter et faire adopter de bonnes lois d’application, qui en fixeront le montant et les mécanismes de mise à jour en fonction de différents éléments comme le «coût de la vie» par exemple. A moyen terme, pour nous, la bataille lancée aujourd’hui dans plusieurs cantons (TI, VD, GE, VS…) devrait aussi être relayée, au niveau de la Confédération, par une initiative fédérale…

2. Quel sera le montant du salaire minimum?

Comme l’indique le libellé de l’initiative, toute personne exerçant une activité salariée doit disposer d’un salaire lui garantissant des conditions de vie décentes. La déclaration universelle des Droits de l’Homme énonce la même chose depuis plus de 60 ans, malheureusement sans beaucoup de succès. Avec cette définition, le salaire minimum à Genève devrait se situer aux environ de 4000 Fr. bruts par mois. Aujourd’hui, 1 salarié-e sur 8 ne les gagne pas! Et pourtant, un salaire inférieur ne permet pas de jouir de conditions de vie décentes. Rappelons encore une fois que le montant devra être fixé dans une loi d’application et qu’il dépendra aussi de la capacité de conviction des salarié-e-s et de leurs organisations au moment de la discussion de cette loi.

3. L’existence d’un «salaire minimum» ne risque-t-elle pas de tirer l’ensemble des salaires vers le bas?

Cette idée a été défendue longtemps par les syndicats allemands par exemple. Mais les expériences d’autres pays ont montré que cela n’était pas le cas, bien au contraire: en Angleterre, après l’introduction du salaire minimum en 1999, la tendance a été l’inverse… C’est pourquoi, aujourd’hui, les syndicats allemands ont changé d’avis et réclament un salaire minimum légal. D’ailleurs, 18 pays de l’UE sur 25 disposent déjà un salaire minimum légal. Avec l’introduction d’un salaire minimum légal en Suisse, les syndicats seraient aussi encouragés à négocier systématiquement des salaires minimaux dans les conventions collectives, ce qui n’est souvent pas le cas, et à prévoir des montants supérieurs au minimum légal.

4. Le salaire minimum concerne-t-il tous les gens quel que soit leur lieu de résidence?

Le salaire est lié au travail. Il rétribue une prestation et est indifférent du lieu de domicile. Ainsi, tout travail pour une entreprise du canton ou sur le territoire du canton pourra prétendre à un salaire au moins égal au salaire minimum. C’est pourquoi, cette initiative concerne tous les salarié-e-s, autant les Suisses que les étrangers-ères, les résident-e-s que les frontaliers-ères, les travailleurs-euses «en règle» que les sans papiers… Elle permet à l’ensemble des salarié-e-s de combattre ensemble le dumping salarial, contre les préjugés xénophobes et racistes.

5. Le salaire minimum a-t-il une influence quelconque pour les chômeurs?

Comme son nom l’indique le salaire minimum concerne celles et ceux qui ont un emploi, puisqu’il s’agit d’un salaire. Cependant, il est clair que le salaire minimum aura aussi une influence sur les indemnités chômage qui sont calculées à partir du montant du salaire. Par ailleurs, il donnerait également des indications pour fixer des seuils décents pour les mesures cantonales en matière de chômage, comme les salaires de l’économie «sociale et solidaire» et les autres revenus de réinsertion.

6. Et les gens qui sont dépendants de l’aide sociale?

Comme l’initiative le définit, tout-e salarié-e doit pouvoir jouir de conditions de vie décentes. Pour celles et ceux qui ne peuvent travailler ou pour celles et ceux qui ont épuisé leurs droits à des prestations de sécurité sociales, il devrait en être de même par le biais d’un revenu minimum garanti, invariable quelque soit la catégorie de personnes à laquelle ils appartiennent. En fait, dans la majorité des cas, l’aide sociale est inférieure aux montants nécessaires à la couverture des besoins sociaux. Elle se cantonne de plus en plus à la satisfaction du minimum vital. Il est donc impératif de combattre la dynamique actuelle qui consiste à réduire les prestations d’aide sociale et à défendre le principe d’un revenu minimum cantonal d’aide sociale qui permette de subvenir à ses besoins vitaux sociaux et à ceux de sa famille. Enfin, le premier effet, de l’introduction d’un salaire minimum garanti sera de faire sortir de l’aide sociale le 4 % de dossiers qui en dépendent aujourd’hui pour cause de bas salaire et de permettre aux familles à faibles ressources de mieux «joindre les deux bouts».

7. Si je gagne plus que
le «salaire minimum», quel sera l’effet de l’introduction d’un salaire minimum sur mon salaire?

Dans l’immédiat aucun. Il faut cependant considérer que la présence d’un salaire minimum va entraver la sous enchère salariale que pratique la majorité des entreprises, notamment dans la perspective de la prochaine extension des accords bilatéraux. Or, cette sous enchère affecte l’ensemble des salaires. Plus concrètement, si vous tombez au chômage, vous pouvez être contraint à accepter un emploi avec un salaire inférieur. Dans ce cas, le salaire minimum fixe une limite inférieure au dumping salarial. Enfin, la fixation d’un salaire minimum concerne l’ensemble des contribuables, qui doivent actuellement financer des compléments d’aide sociale pour les working poor, en majorité des femmes, qui ne peuvent tourner avec le salaire dont ils-elles disposent. Est-il normal que nous subventionnions ainsi indirectement les entreprises qui sous-payent leur personnel?

8. Quel salaire minimum pour les personnes qui travaillent à temps partiel?

Ce point doit également être négocié dans les lois d’application. Le plus simple consiste à fixer le salaire au pro rata du temps travaillé. Le salaire d’un travail à 50% doit correspondre au minimum à 50% du salaire minimum pour un temps complet.

Jacques François