Murad est enfin libre !

Murad est enfin libre !

Nous publions ici le rapport de la
délégation internationale qui est allée assister
au procès du syndicaliste genevois d’Unia Murad Akincilar
le 3 juin à Istanbul à l’issue duquel notre
camarade a été libéré !

Pour rappel, Murad Akincilar a été arrêté le
30 septembre 2009 à Istanbul, devant son domicile, par des
agents en civil, en présence de son épouse. Il est
accusé d’appartenance à une organisation
dénommée Devrimci Karargah (ci-après le
Commandement révolutionnaire).

    La campagne pour la libération de Murad
Akincilar a débuté dès son arrestation. Elle a
mobilisé plusieurs pétitions, manifestations, saisine des
organismes de défense des droits humains et des parlements
suisses et européens ainsi que des membres des gouvernements
cantonal et fédéral. Du 25 au 27 octobre 2009, une
délégation s’est rendue à Istanbul et
à Ankara et a rencontré les autorités politiques
et judiciaires turques.

Mauvais traitements…

Murad a été opéré des deux yeux au mois
d’octobre, après s’être plaint durant
plusieurs jours de perte de la vue. Il s’agissait de
décollements de rétines qui ont eu lieu après des
heures d’interrogatoire, au cours duquel ont été
utilisés des spots puissants, occasionnant un stress
particulièrement violent. Il semble également
qu’à cause du retard de l’intervention chirurgicale,
sa capacité de récupération ait été
sérieusement amoindrie. Par la suite, il a subi une
deuxième opération aux yeux pour les mêmes
troubles. Il est à noter que ni Murad ni aucun membre de sa
famille n’avait souffert de décollement de rétine
dans le passé.

    Le 3 juin 2010, une importante
délégation a pu assister à l’audience de
Murad. Elle était composée de Rui Tavares,
député au parlement européen (Groupe
confédéral de la Gauche unitaire européenne/Gauche
verte nordique), Rémy Pagani (conseiller administratif, maire de
Genève), Ernst Balzli (Consul général de Suisse),
Nazan Sadikoglu (assistante au consulat suisse à Istanbul),
Jean-Michel Dolivo et Hüsnü Yilmaz (représentants des
Juristes Démocrates de Suisse et de l’Association
européenne des Juristes pour la démocratie et les droits
de l’homme dans le monde), Rita Schiavi, Jacques Robert, Semih
Kutluca et Jamshid Pouranpir (syndicat Unia), Pierre Fouqueray (Ligue
suisse et internationale des droits de l’homme), Françoise
Fort (Collectif Urgence Palestine) et des dizaines de membres de la
famille et des amis de Murad…

Un très large soutien

Objectifs de la délégation :

• Montrer que le soutien à Murad Akincilar regroupe de larges milieux en Europe et en Turquie

• Veiller au déroulement du procès dans le strict respect des droits fondamentaux

• Assurer la poursuite de la campagne jusqu’à l’acquittement de Murad

Le 3 juin 2010, la délégation a pu entrer dans la petite
salle du procès vers 13 h, au lieu de 10 h
annoncé précédemment du fait, semble-t-il, de la
présence de la forte délégation suisse et
européenne. Assis au premier rang, Murad semblait très
maigre, fatigué et souffrant, tout comme les autres
détenus. Il a pu exposer au tribunal qu’il n’avait
aucun lien avec une organisation terroriste et qu’il était
un intellectuel et syndicaliste d’Unia, rentré en Turquie
pour une visite privée. Ensuite, il a soumis sa
déposition écrite aux juges. Le chef
présumé du Commandement révolutionnaire, Ulas
Erdogan a affirmé qu’il ne connaissait pas Murad. En
outre, il a raconté les mauvais traitements physiques et
psychiques que lui-même avait subis durant les premiers jours de
sa détention.

Des accusations fantaisistes

L’acte d’accusation mentionne que Murad Akincilar avait
écrit dans la revue Transformation Démocratique, qui
utilisait pour son site Internet une même adresse IP que
l’organisation Commandement Révolutionnaire. Cette revue
serait une publication légale de cette organisation ; les
empreintes digitales de Murad Akincilar auraient été
trouvées dans la maison occupée par les militants de
l’organisation, à Pendik, Kurtköy. En
réalité, seule une partie de l’empreinte digitale
de l’index de Murad a été découvert par la
police. Son avocat a pu démontrer que ce n’était
pas avec l’index que l’on pouvait manipuler un livre et que
des dizaines d’empreintes d’autres personnes
découvertes par la police sur la même publication
n’ont pas été exploitées !

    A la fin de cette journée d’audience,
le Procureur a demandé la mise en liberté de Murad et de
3 autres prévenus. Le tribunal l’a suivi. Murad a
été informé par le tribunal que la 2e audience de
son procès aura lieu le 26 juin, pour juger le fond de cette
affaire. Au vu de la vacuité du dossier, nous sommes confiants
que la justice turque prononcera l’acquittement définitif
de notre camarade.

Libre !

Après avoir été emmené à 300
kilomètres d’Istanbul, Murad a pu retrouver la
liberté devant la prison de haute sécurité
d’Edirne vers 23 h.

    Alors que les médias turcs avaient largement
relayé l’arrestation de 17 prétendus terroristes en
automne 2009, l’intérêt de ce procès
semblait, pour la presse du pays, s’être très
réduit ce 3 juin 2010.

    La mobilisation a sans doute eu un impact important
sur les conditions de détention, sur le déroulement du
procès de Murad et de sa mise en liberté. Il y a lieu de
présenter nos plus chaleureux remerciements à toutes
celles et à tous ceux qui se sont engagé-e-s dans cette
campagne. 

Rui Tavares, Rémy
Pagani, Jean-Michel Dolivo, Hüsnü Yilmaz, Rita Schiavi,
Jacques Robert, Semih Kutluca, Jamshid Pouranpir, Pierre Fouqueray,
Françoise Fort


Titre et intertitres de notre rédaction