Pour un véritable service public d'accueil de l'enfance

La Loi sur l’accueil de jour des enfants (LAJE) dans le canton de Vaud est loin de garantir un réseau de crèches et garderies offrant un nombre suffisant de places pour tous les enfants qui en ont besoin, et qui soit accessible financièrement à tous les parents. Dans le cadre de la discussion d’un rapport d’évaluation du Conseil d’Etat sur la LAJE, le groupe La Gauche (POP-solidaritéS) au Grand Conseil a formulé un certain nombe de critiques et propositions, dont nous publions ici un extrait. Cette prise de position s’appuie très largement sur des données en provenance du terrain, récoltées par le Syndicat des services publics (SSP) – groupe Enfance. Ce texte reprend des extraits du Bilan présenté en octobre 2012 à l’AG du secteur enfance du SSP.  

 

 

La LAJE est un système trop complexe avec une Fondation qui verse des subventions à près de 30 réseaux, eux-mêmes composés de nombreuses communes. Le nombre de places est toujours largement insuffisant et inégalement réparti sur le territoire. La part que payent les parents varie également selon où l’on habite, alors que la part de l’Etat est faible, l’effort reposant essentiellement sur les parents et les communes. Le cadre de référence a été attaqué et les pressions pour faire baisser les coûts sont incessantes. Les conditions de travail du personnel sont inégales, car il n’existe toujours pas de CCT et pas même de partie patronale avec qui la négocier, tant le système est complexe et la volonté politique absente.

Comme pour l’école, hormis son caractère obligatoire, un service public de l’accueil de l’enfance devrait être organisé par l’Etat, financé solidairement via l’impôt, garanti à chaque enfant ayant besoin d’une place et accessible sur l’ensemble du territoire, que ce soit dans les villes ou à la campagne. Le modèle vaudois est bien loin de cet objectif et cela alors même que Harmos et l’article 63a de la Constitution vaudoise sur l’« Ecole à journée continue  » sont venus renforcer le principe de l’accueil de jour non seulement pour les enfants de 0 à 12 ans, mais pendant toute la scolarité obligatoire.

 

Un enfant – une place

En 2005, alors que les discussions sur la nouvelle loi étaient en cours, le SSP comme La Gauche avaient souligné que revendiquer une place d’accueil pour chaque enfant est une condition nécessaire à l’insertion professionnelle des femmes. Les syndicats estimaient, que pour répondre aux besoins, il fallait créer, dans les 5 ans, au moins 7500 places supplémentaires. Le Conseil d’Etat – tout en affirmant qu’il manquait, à l’époque, plus de 1000 places pour les enfants de 0 à 3 ans et 6000 places dans le parascolaire – avait préféré s’en tenir à un objectif très modeste, soit 2500 places.

L’accueil parascolaire collectif, qui comprend les cycles initial (5-6 ans), primaire (7-10 ans), et de transition (11-12 ans), s’est davantage développé, mais il faut tout de même rappeler que l’on partait d’un niveau très bas. L’objectif fixé en 2005 était de 1130 places. Finalement, en 2010, le canton comptait 5545 places dites standard, soit des unités d’accueil pour éco­liers·ières (UAPE) ou des accueils pour enfants en milieu scolaire (APEMS), dont 325 non subventionnées. Cela donne une augmentation de 1983 places. Pourtant, sur ce point aussi, le résultat reste modeste par rapport aux besoins. Ainsi, près de la moitié des places créées l’ont été sur la seule commune de Lausanne. De plus, les prestations et la qualité de l’accueil parascolaire sont très inégales sur le territoire vaudois. Il faut souligner aussi que l’offre pour les enfants de 11-12 ans est pratiquement inexistante, sans parler de celle pour les 12-16 ans.

Par ailleurs, il est vraisemblable que les nouvelles places pour les bébés et les petits enfants de moins de 30 mois ont proportionnellement encore moins augmenté. Ce n’est pas un hasard puisque ce sont les places les plus chères, puisqu’elles nécessitent, à juste titre, le taux d’encadrement le plus élevé. En ce qui concerne l’accueil parascolaire, le bilan est également mitigé puisqu’environ la moitié des 1900 places nouvellement créées sont à Lausanne et de grosses lacunes persistent pour les enfants de 11-12 ans et plus grands.

 

Nos revendications

La Gauche va s’engager, avec le SSP, pour relancer le processus visant à obtenir une CCT cantonale. Aujourd’hui l’accueil collectif des enfants représentent 2523 équivalent plein temps, essentiellement des femmes, qui méritent que leur travail soit reconnu et valorisé au moyen d’une CCT et d’un cadre de référence assurant une dotation suffisante et veillant à maintenir le niveau de formation du personnel.

La Gauche exige que l’Etat s’investisse davantage dans le financement de l’accueil des enfants, en particulier des bébés. Il faut en effet relever que le rapport entre le nombre d’EPT et le nombre d’enfants (taux d’encadrement) est plus élevé pour les structures subventionnées (0,32) que pour les structures non subventionnées (0,12) : c’est que dans le secteur subventionné, l’offre pour l’accueil des tout-petits est prédominante, soit 8 places sur 10 pour les moins de 3 ans, alors que le secteur privé accueille davantage des enfants plus grands. Cela n’est pas un hasard, les places d’accueil en nurserie sont les plus chères, car elles nécessitent une dotation en personnel plus importante.

Pourtant, le fait d’avoir une place d’accueil à la fin du congé maternité, dont la durée normale en Suisse est d’à peine 14 semaines, est un élément clé pour la poursuite d’une activité professionnelle de la mère. Le risque est grand dès lors de voir les jeunes mères renoncer à leur emploi ou alors réduire fortement leur taux d’activité, en s’arrangeant avec des grands-parents ou autres proches pour la garde du bébé. Un « choix » qui va peser sur le restant de leur vie professionnelle et après, puisque le niveau de la rente de vieillesse en dépend.