Inde

Inde : Le combat d'Arundhati Roy contre Goliath

A l’instar du gouvernement turc – qui mène actuellement une campagne de répression contre les universitaires s’opposant aux crimes que le gouvernement commet contre la population kurde dans le sud-est du pays –, l’Inde s’est lancée dans une série d’attaques frontales contre la liberté d’expression.

Depuis quelques mois, les universités indiennes, contrôlées par les castes supérieures et pro-­nationalistes hindoues, ont été le théâtre de purges contre des étudiant·e·s ou des professeurs. Que ce soit dans les cours ou sur les campus, elles·ils sont déclarés «anti-­nationaux» sous de fallacieux prétextes et expulsés, parfois arrêtés. Des lettres de la part du gouvernement Modi pour les autorités universitaires ont révélé que ces dernières étaient sous une pression constante d’agir contre «l’extrémisme et la politique anti-­nationale».

Soulèvement et répression

En décembre passé, la High Court de Mumbai a ordonné l’ouverture d’une procédure pour outrage à l’encontre d’Arundhati Roy, écrivaine à succès (auteur du livre Le Dieu des petits riens) et militante active, à propos d’un article paru en mai 2015 consacré au professeur Saibaba, détenu pour de prétendus liens avec la guérilla maoïste. Prétendant que Roy fait dans son écrit des déclarations scandaleuses à l’égard du gouvernement ainsi que de la police, le tribunal a décidé de la poursuivre dans un procès qui pourrait mener à l’enfermement.

En réalité, Roy dénonce l’incarcération de Saibaba, gravement handicapé, enlevé par la police et emprisonné sans accès à un minimum d’encadrement médical. Roy souligne ironiquement que, si les associés de Modi condamnés pour des dizaines de meurtres peuvent être libérés sous caution, la moindre des choses serait de rendre cela possible également pour un homme en fauteuil roulant dont la santé se détériore rapidement. S’étant démarquée pour son soutien officiel à l’indépendance du Cachemire en 2010, l’écrivaine représente désormais une importante épine dans le pied du gouvernement et des castes supérieures.

Le mois dernier, Rohith Vemula, un étudiant à l’université d’Hydera­bad, s’est donné la mort après avoir été accusé d’opinions politiques «anti-nationales». Roy fut montrée du doigt comme ayant fait partie d’un complot ourdi par les missionnaires chrétiens, afin de tuer Vemula et de briser l’Inde. Aucun doute d’où peuvent provenir pareilles rumeurs… Apportons-lui tout notre soutien dans le combat qu’elle a lancé contre un gouvernement de répression, qui n’a pas l’intention de lui laisser le dernier mot!

Aude Martenot