Pour léligibilité des immigré-e-s dans le canton et les communes
Pour léligibilité des immigré-e-s dans le canton et les communes
Une initiative populaire demandant le droit déligibilité des immigré-es aux niveaux communal et cantonal vient dêtre lancée à Neuchâtel. Compte tenu des nombreux revers enregistrés sur ce front dans dautres cantons, la démarche est courageuse. Elle nest pas pour autant téméraire, comme on va le voir, car elle sinscrit dans un contexte intéressant à plus dun titre.
La démarche est intéressante tout dabord en raison de son origine: lidée de lancer cette initiative émane en effet des immigré-e-s eux/elles-mêmes. Auteurs de plusieurs pétitions sur ce thème par le passé, les immigré-e-s font ainsi usage pour la première fois des nouveaux droits que leur confère la Constitution entrée en vigueur en janvier 2002, soit le droit de vote (et donc celui dinitiative et de référendum) au niveau cantonal. Avec raison, ils/ellles ne veulent plus se contenter dêtre des «citoyens au rabais». Ils/elles sont nombreux à être nés dans ce canton; ils/elles y ont été scolarisés, y ont acquis leur formation professionnelle et sont aujourdhui parfaitement intégrés dans le tissu social, culturel et économique. Il leur incombe tous les devoirs que la société impose à chaque citoyen. À ces devoirs doivent aussi correspondre tous les droits, en particulier celui de pouvoir être élu-e dans un Conseil général (législatif communal) ou au Grand Conseil.
Un large soutien
La démarche est intéressante ensuite en raison du très large soutien quelle a recueilli. Traditionnellement à la pointe de ce combat, les associations de limmigration italienne sont désormais rejointes par des organisations espagnoles et portugaises, ainsi que par des groupes dimmigré-e-s kurdes, turcs, congolais et bangladeshis. Au total, ce ne sont pas moins dune quarantaine dorganisations de limmigration, ainsi que lensemble des forces de la gauche politique et syndicale qui ont apporté leur soutien à cette initiative. Gage de succès pour la récolte de signatures, cette large unité est surtout réjouissante pour lavenir de la collaboration entre les organisations suisses et immigrées sur dautres questions politiques et syndicales touchant lensemble du mouvement ouvrier.
Pour développer lunité
La démarche est intéressante enfin en raison du contexte historique et politique dans lequel elle sinscrit. Au milieu du XIXe siècle, le canton de Neuchâtel a fait uvre de pionnier en octroyant le droit de vote aux immigré-e-s sur le plan communal. Aujourdhui, il est le dernier canton dans lequel lUDC na pas encore délu. Ceci explique-t-il cela? Il est évidemment impossible de le dire, mais ce qui sûr, cest que le droit de vote est un puissant moyen dintégration et que lintégration est la meilleure façon de lutter contre la peur de létranger, donc contre la xénophobie et contre les divisions à lintérieur du mouvement ouvrier. À lheure où lUDC tente de prendre pied dans le canton en se présentant aux élections fédérales, SolidaritéS a décidé de lancer toutes ses forces dans cette bataille. Plus que jamais, il sagit de démontrer que Suisses et immigré-es ne forment quune seule et même communauté de destin et que cest seulement ensemble quils/elles pourront se forger un avenir meilleur.
Daniel PERDRIZAT