Trois propositions passent, contre l'avis du Conseil d'État

Réuni en session les 26 et 27 juin, le Grand Conseil neuchâtelois a vu se manifester sa courte majorité à gauche sur trois points.

Suite au refus du budget au mois de décembre et à l’adoption d’une deuxième mouture en février – plus dommageable encore pour les plus précarisé·e·s – le comité de crise s’est mobilisé. Réunissant la gauche, les syndicats et les mouvements associatifs, il a organisé une grande manifestation le 10 mars pour dénoncer les mesures d’économie proposées par le Conseil d’État, puis a déposé deux motions populaires et une pétition. Les deux motions, qui demandaient l’urgence, ont été traitées en juin.

Augmentation du nombre de contrôleurs·euses fiscaux

La première exige une augmentation du nombre de contrôleurs·euses fiscaux. Selon la droite, s’efforcer de faire respecter le principe républicain qui veut que chacun·e paie l’impôt en fonction de ses capacités c’est non seulement nuire à l’image de notre canton, mais dissuader des contribuables (autant dire des fraudeurs·euses) de s’installer dans notre canton. Pour le PLR, l’UDC et les Verts libéraux, la fraude fiscale est entrée dans les mœurs. Selon eux, il est apparemment plus dommageable pour l’image du canton d’engager des contrôleurs·euses fiscaux que de fermer des filières de formation professionnelle, de baisser les prestations des résident·e·s des EMS ou de couper les subventions culturelles. Heureusement, à 57 voix contre 56, cette première motion a été acceptée, malgré leur opposition.

Abolition du frein à l’endettement

La deuxième motion demandait l’abolition du frein à l’endettement. Très contraignant pour le Parlement, le frein à l’endettement impose des restrictions budgétaires automatiques (sans votation par le parlement) lorsque certaines conditions sont réunies, comme c’est le cas à Neuchâtel, où les comptes sont dans le rouge depuis plusieurs années. 100 millions d’économie, c’est l’objectif du Conseil d’État d’ici 2021 pour redresser les finances. À part supprimer des prestations, le gouvernement neuchâtelois ne semble pas avoir beaucoup d’autres idées. Le gouvernement est clair: des coupes, oui, mais des recettes supplémentaires du côté des fortuné·e·s, non. À l’heure où une nouvelle réforme de l’imposition des entreprises est en discussion, la situation nous ferait presque rire (jaune). Abolir le frein à l’endettement permettrait non seulement d’investir et de soutenir les plus affaibli·e·s par les coupes budgétaires déjà consenties, mais aussi de remettre en cause les diminutions de prestation en tout genre. Votée à 58 voix contre 56, cette mesure est également acceptée, contre l’avis du Conseil d’État.

Contre l’exportation du matériel de guerre


La Suisse exporte des armes vers l’Arabie Saoudite, qui bombarde le Yémen

Dernier objet, la résolution concernant l’ordonnance fédérale sur l’exportation du matériel de guerre. Elle stipule qu’il est interdit d’exporter du matériel d’armement dans un pays en conflit interne ou international. Cosignée par les groupes Pop-Verts-solidaritéS, PS et Vert-Libéraux, elle enjoint le Conseil fédéral à renoncer à l’assouplissement de la législation en vigueur. Dans les faits, notre pays est loin d’appliquer cette interdiction au sens strict puisque l’exportation est autorisée dans le cas où le conflit n’a pas lieu sur le sol du pays importateur, vaste nuance! Notre pays fournit des armes à des pays qui violent les droits humains, et à des pays en guerre; ce n’est pas digne des valeurs humanitaires défendues par la Suisse, c’est aussi contraire au principe de neutralité. Nous ne pouvons tolérer que des motivations commerciales soient plus fortes que le respect de la paix et des droits fondamentaux.

Portée au parlement neuchâtelois par solidaritéS, la résolution est acceptée avec 74 voix alors qu’il en fallait… 74!

Une courte majorité à gauche (+ un élu) s’est manifestée lors de la session du mois de juin. Que cela continue! Notamment pour la pétition demandant une contribution de solidarité sur les revenus ou fortunes les plus élevés du canton, qui sera prochainement soumise au Grand Conseil.

Zoé Bachmann