Retraite ou débâcle d’un système imbécile

Retraite ou débâcle d’un système imbécile

Partout en Europe les rentes de retraites des actifs sont attaquées au profit des rentiers du capital. Les chantres du néo-libéralisme soutiennent que le système ne peut plus assurer les retraites au niveau actuel sans se rendre compte que si cette hypothèse ce vérifie, cela implique que ce système est inadéquat et doit donc être rejeté.


Jeudi 11 septembre 2003 n’était pas seulement pour nous l’occasion de commémorer le 30ème anniversaire de la mort de Salvador Allende. C’était aussi, à Neuchâtel, l’occasion d’un débat sur la question des retraites. Les AMD et le SSP avaient invité Madame Martine Bulard, journaliste au Monde Diplomatique, pour une conférence-débat sur ce sujet. Elle a très bien présenté les diverses facettes de la question dans le contexte de notre système politico-économique (dit «économico-politique»!).


L’essentiel de la duperie, qui tient dans un message sans cesse répété de telle sorte à ce qu’il devienne réalité incontestable parce que «tout» le mode le dit, réside dans l’affirmation qui veut que la croissance du rapport retraité sur actifs conduise à une impasse de financement des systèmes de retraites notamment par répartition. Cette affirmation souffre d’au moins deux erreurs ou, à choix, malhonnêtetés fondamentales.


La première consiste à prétendre que cette croissance sera constante. Les démographes un tant soit peu sérieux l’affirme clairement: la pyramide des âges n’est pas homogène. Cela signifie en gros qu’après un maximum dû au «baby boom» ce facteur régressera.


La seconde consiste comme d’habitude à considérer un seul facteur d’un système et à déduire un résultat en bloquant les autres termes. C’est une hérésie du point de vue mathématique, mais de cela les propagandistes de ces affirmations l’ignore pour la plus part. Leur démarche est plutôt motivée par leur idéologie: celle-ci impose le refus absolu de considérer qu’un partie quelconque de la croissance de la productivité aille aux salaires.


Or cette croissance de la productivité est, dans les pays industrialisés, de loin supérieur à celle de la croissance démographique. Ce rapport est encore plus grand si l’on considère la croissance dans les secteurs de production primaire et secondaire1. Cela signifie que même avec un ratio «non-productif»/actif croissant le volume de production de richesses concrètes croît. Et il faut même ajouter que cette dernière croissance est écologiquement insoutenable. L’horizon envisagé pour les prévisions dans cette question est situé vers 2040. En considérant une croissance nette minimaliste des productions matérielles de 3% cela conduit à une multiplication par 3 des volumes produits2. Imaginons, en 2040, 3 fois plus de produits alimentaires, de voitures, de téléviseurs et de gadgets. Que faire de nos poubelles! Pour que nos sociétés industrielles ne détruisent pas son substrat: la terre, il faut donc le volume d’activité humaine consacrée à la production matériel diminue.


Cette conclusion n’est évidemment pas compatible avec le néo-libéralisme ni même avec aucunes formes du capitalisme et surtout pas la forme financière que nous nous laissons imposer faute de solidarité.


A nouveau il faut rappeler qu’il n’est pas réaliste de chercher une solution à un problème réel perçu au sein d’un système sans considérer sont impacte sur le tout. Cette pratique analytique surannée est au mieux stupide au pire démagogique.


Sur le plateau du Larzac, José Bové a réaffirmé qu’un autre monde est possible. Mais il a ajouté qu’il «faudra que nous changions notre relation à la consommation,… notre relation à l’environnement,…». J’ajoute qu’il nous faut changer notre relation à l’argent, la richesse et au pouvoir, trois facettes d’un égocentrisme meurtrier.


Jacques SILBERSTEIN

  1. Le secteur primaire comprend l’agriculture et les matières premiéres. Le secondaire est produit par les industries en aval qui transforme les sources primaires en produits dit manufacturés.
  2. La formule est (1 + t/100)^n; t est le taux en % ici: 3; n est le nombre d’années.