Baraques à frites VS Baroque

Après une défaite juridique, la ville de Genève relance le projet du Baroque pour libérer l’espace de la pointe de la Jonction afin d’en faire un espace pour food trucks. Samedi 17 décembre, une action rappelait que les habitant·e·x·s ne veulent pas de ce projet à but lucratif.  

Qu’est-ce que la gentrification ?

Terme né dans les années 1960 à Londres, il vise à mettre en lumière un processus complexe qui transforme un quartier donné et sa population, au profit d’une population de classe supérieure – gentry faisant référence à l’aristocratie rurale anglaise qui cherchait un ancrage dans la ville. Souvent utilisé pour qualifier le changement de locataires, c’est également tout l’environnement du quartier qui se trouve modifié, des commerces à l’espace public.

C’est souvent par la venue d’une classe moyenne possédant un haut capital culturel qu’un quartier dit «populaire» se transforme en opportunité d’investissement, se retrouve en proie à la spéculation financière, ce qui mène à une augmentation généralisée des loyers. Cette quête de profit relègue peu à peu les populations les plus précarisées en périphérie, leur niant l’accès à la centralité, aux biens et aux services.

Et la Jonction ?

En Suisse comme partout, la gentrification est à l’œuvre dans de nombreux quartiers. À Genève, les quartiers de Saint-Gervais, des Pâquis, de Carouge ou de la Jonction en sont de bons exemples. 

C’est au sein de ce dernier que l’Uni Mail s’est installé et que le MAMCO a remplacé la Société genevoise des instruments physiques. Cafés branchés et galeries d’art s’y sont multipliées. Depuis peu, c’est la Pointe de la Jonction qui se trouve au centre des transformations. En effet, la Ville de Genève a remis la majorité de l’endroit à une société anonyme connue dans le milieu de la restauration chic et de l’événementiel : Spices SA, auparavant Le Baroque. 

Les associations de quartier et habitantexs qui utilisaient le lieu jusqu’alors ont été contraintes à cesser activités socioculturelles et sportives pour laisser la place à des grillages doublés d’agents de sécurité protégeant des hangars vides qui abriteront prochainement un festival de food trucks. Reléguées dans une maigre parcelle, les associations se voient obligées d’attendre la fin des travaux pour continuer leurs activités et devront ensuite respecter les heures d’ouverture du Baroque. 

«Pas de quartier pour le Baroque !» 

C’est sous ce slogan que 200 à 300 personnes se sont retrouvées ce samedi 17 décembre au cœur des hangars, dans le cadre d’une «fête foraine gratuite et populaire». Entre découpe de grillages, peinture de banderoles, pêche aux canards, taureau mécanique, free shops et stands de nourriture prix libre, la bonne humeur était présente ainsi que l’envie de lutter contre un projet commercial témoignant de la logique marchande de la Ville. Ville qui ne peut supporter un espace qui, bien que riche sur les plans sociaux, communautaires et culturels, ne profiterait pas sur un plan économique.

Alice Dubois