France

Les braises de la colère !

Juste après le passage en force du gouvernement Macron sur sa contre-réforme des retraites et, espérons-le, juste avant une amplification de la mobilisation pour empêcher la mise en œuvre de la Loi, notre camarade Joséphine Simplon, syndicaliste et militante du NPA, nous fait un point de la situation.

Manifestation contre la réforme des retraites à Paris
Journée de mobilisation du 23 mars à Paris. La plus grande mobilisation sociale depuis mai 1968 en France.

Depuis le 19 janvier, la France vit une mobilisation historique contre la réforme des retraites voulue par le seul exécutif. Des millions de salarié·e·s, de jeunes, de retraité·e·s sont dans la rue depuis deux mois à l’appel d’une intersyndicale nationale unie pour le retrait de cette réforme. Face à cela le gouvernement n’entend rien, il est plus que jamais isolé et minoritaire. Une crise politique d’ampleur vient de s’ouvrir !

Passage en force

Alors que les grèves reconductibles se poursuivent dans un certain nombre de secteurs depuis le 7 mars, Macron a voulu en finir en imposant son texte sur les retraites sans aucun vote à l’Assemblée nationale par l’utilisation du 49.3. Cet article de la Constitution permet de bâillonner les parlementaires en adoptant sans vote une loi. 

L’usage du 49.3 montre que la mobilisation contre la réforme des retraites a réussi à ce que Macron et son gouvernement ne puissent pas avoir de majorité, malgré le soutien affiché des Républicains et les accords passés notamment au Sénat. Rappelons que la «majorité présidentielle» ne dispose que de 250 voix alors que pour être majoritaire il en faut 287. Force est de constater que les Républicains ne sont plus vraiment un groupe écoutant leurs dirigeants surtout à la lumière de cette mobilisation. En effet, l’un des aspects importants de cette mobilisation, c’est qu’elle est ancrée dans l’ensemble des territoires en particulier dans les zones rurales et les petites agglomérations. 

Les élu·e·s membres des Républicains sont donc percuté·e·s de plein fouet par l’électorat populaire vent debout contre la réforme des retraites. La pression est donc très forte, bien plus forte que les « menaces » ou les « ordres » des dirigeant·e·s de parti. Le vote était donc risqué pour le gouvernement, il a préféré enjamber l’obstacle et s’asseoir sur la démocratie.

Détonateur

Force est de constater que l’utilisation du 49.3 le 16 mars a permis de redynamiser la mobilisation. En effet, le mouvement était arrivé à un essoufflement où l’objectif de mettre le pays à l’arrêt le 7 mars n’avait pas vraiment fonctionné et n’avait pas permis d’augmenter le niveau d’affrontement nécessaire, en particulier dans les secteurs les moins grévistes. 

Seuls les secteurs ayant appelé à la grève reconductible à partir du 8 mars se sont maintenus : SNCF, énergie, voirie, raffineries même si partout sur le territoire, il y a eu des journées d’actions, des blocages et des manifestations ; maintenant ainsi un climat social important. 

Dans cette situation, le 49.3 a donné un coup de fouet immédiat en ravivant toutes les mobilisations et les colères. Un certain nombre de secteurs qui jusque-là n’étaient pas arrivés à rentrer fortement dans la mobilisation se sont prononcés pour la grève reconductible. Par exemple, le secteur de la culture ou la jeunesse, qui sont tous les soirs dans la rue depuis le 16 mars. Ou encore, les blocages d’universités qui deviennent de plus en plus importants et massifs. 

Au scandale démocratique pour une majorité de la population est venue s’ajouter l’injustice sociale. Depuis le 16 mars, des manifestations spontanées ont lieu sur l’ensemble du territoire et, avec elles, la répression policière qui s’amplifie chaque soir avec des centaines d’arrestations, de garde à vue et de violences en tout genre.

Crise politique majeure

Lundi 20 mars, le gouvernement est passé à 9 voix près de la destitution par l’Assemblée nationale, prouvant une fois de plus sa faiblesse. Plus que jamais, l’heure est à la construction et l’amplification de la mobilisation. 

La journée de grèves et de manifestations du 23 mars appelée par l’intersyndicale doit être encore plus intense que la précédente pour gagner. Au-delà se pose aussi plus que jamais la question de l’alternative à ce système, avec entre autres la construction d’une plateforme revendicative à opposer à ce pourvoir : pour le retrait de la réforme, pour des augmentations de salaires, pour une transition écologique, des moyens pour les services publics. Mais aussi la nécessité d’en finir avec cette Ve République et la mise en place d’une assemblée constituante pour poser la question de qui décide, de quelles doivent être les priorités d’une organisation sociale au service de la majorité de la population. 

Depuis le 19 janvier, la mobilisation contre la réforme des retraites est devenue un conflit politique entre les classes possédantes et les classes populaires. Elle doit trouver une issue dans la victoire du monde du travail et de la jeunesse. C’est le sens de la mobilisation actuelle qui est loin d’être terminée !

Joséphine Simplon