Palestine

Le «Prisonnier de Jérusalem» en Suisse

Ancien prisonnier politique, l’avocat franco-palestinien Salah Hammouri a passé près d’un quart de sa vie derrière les barreaux de l’occupation israélienne en raison de son engagement indéfectible en faveur des droits des Palestinien·nes. Expulsé de Jérusalem en France fin 2022 en violation du droit international, il viendra partager son expérience lors d’une tournée de conférences en Suisse à la mi-mars. Entretien.

Salah Hammouri est accueilli à Paris après son expulsion d’Israël
Rassemblement pour accueillir Salah Hammouri après son expulsion d’Israël, Paris, 19 décembre 2022

Elles essayent de garder le calme en prison. Mais c’est surtout en raison du fait qu’il n’existe pas de grèves de la faim qui ne soient pas coordonnées avec les partis politiques, avec les mouvements de solidarité. Elles savent bien qu’une grève de la faim ne restera pas que dans la prison, mais aura une ampleur politique à l’extérieur. 

Nous pouvons nous appuyer sur le droit international pour deux raisons. Premièrement, pour montrer que ce monde capitaliste occidental a deux poids, deux mesures. Deuxièmement, pour essayer de renforcer l’appui à notre cause. En France, par exemple, des partis politiques appuient la Palestine en faisant référence au droit international. La reconnaissance de l’existence de l’apartheid dans le rapport d’Amnesty International de 2022 nous a beaucoup aidée. 

D’abord, ce génocide en cours est déjà – stratégiquement et géopolitiquement – une perte pour Israël, malgré tous ces massacres de notre peuple. Israël a tué juste pour le plaisir de tuer. Politiquement et militairement, il n’a rien gagné et ne va rien gagner. 

Pour arrêter le génocide, il existe cette formule qui fonctionnait dans les décennies précédentes et qui est en train de fonctionner, et qui consiste en trois éléments. Premièrement, la résistance palestinienne, légitime selon le droit international. Deuxièmement, la résilience du peuple palestinien entier qui a empêché une deuxième Nakba en décidant de ne pas fuir de Gaza malgré tout. Troisièmement, la solidarité internationale. Tant que ces éléments fonctionnent et s’intensifient, cela aidera à arrêter le génocide en cours.

Il y a malheureusement eu un énorme recul du mouvement national palestinien traditionnel, surtout de la gauche, après les accords d’Oslo de 1993. Il y avait d’autres raisons pour ce recul aussi: la fin de l’URSS, la montée de l’islam politique, etc. Pour l’instant, il n’y a pas de mouvement national unitaire. 

À long terme, il faut souligner un facteur très important. C’est le plan politique interne palestinien, ce bordel qui existe depuis la division de 2006 et qui s’est de plus en plus compliqué. 

Les Palestinien·nes doivent se sortir de cette impasse politique par la reconstruction de l’OLP (Organisation de libération de la Palestine) qui doit être la représentante des 14 millions de Palestinien·nes et s’appuyer sur son ancienne charte de 1968. On doit renforcer l’OLP et pas l’Autorité Palestinienne (AP), car si cette dernière a été créée par l’OLP en 1994, elle ne représente pas toutexs les Palestinien·nes, notamment les réfugié·es, les Palestinien·nes de Jérusalem, les Palestinien·nes de 1948 (citoyen·nes d’Israël). C’est l’OLP et non pas l’AP qui a créé l’identité nationale palestinienne, basée sur un combat national. 

On doit adopter un programme politique qui parle de libération nationale, arrêter toute négociation avec l’occupant et tout genre de normalisation avec lui. 

Il faut qu’on avance vers un front unitaire rassemblant le maximum de forces palestiniennes – gauche, droite, nationalistes, islamistes – réuni·es sur un programme politique. Ceci pourrait se faire dans le cadre de l’OLP qui possède des mécanismes politiques déjà établis. 

On ne peut exclure de ce projet aucun mouvement politique palestinien car il faut assurer l’unité de l’ensemble des 14 millions de Palestinien·nes et l’inclusivité sans discrimination selon l’appartenance religieuse. Le Hamas, par exemple, a été démocratiquement élu en 2006 par la majorité de votes, mais la «communauté internationale» n’a pas accepté le résultat de ces élections. L’unité interne de tout le peuple et l’inclusivité permettra de créer un rapport de force contre l’occupant israélien et de lui imposer notre choix.

Propos recueillis par Rébecca Mathieu

Tournée de conférences de Salah Hammouri :

Genève
je 14 mars
18 h 30 Unimail
salle MS150

Lausanne
ve 15 mars
19 h La Fraternité

Neuchâtel
sa 16 mars
16 h Théâtre
de la Poudrière