L'incroyable faillite de l'usine Tornos
L’incroyable faillite de l’usine Tornos
Laurent Graenicher, réalisateur genevois, nous gratifie d’un splendide documentaire sur la faillite de l’usine Tornos à Moutier. Un exemple révélateur du cynisme des actionnaires et dirigeants d’entreprises pour lesquels, seuls leurs s profits à court terme comptent. (réd)
En 1995 l’usine Tornos, à Moutier, entre dans une intense euphorie économique. Grâce à la fabrication et à la commercialisation d’une machine outil «révolutionnaire» (la Deco 2000), l’usine sort du marasme dans lequel elle se trouvait au début des années 1990. Les bâtiments ont pu être rénovés et l’usine engage massivement du personnel. Le nouveau directeur parvient à inspirer la confiance dans le potentiel de l’entreprise.
Un groupe d’investisseurs anglais devient le principal actionnaire de Tornos en 1999. L’entrée en bourse, qui aura lieu en mars 2001, fait partie de leurs objectifs. Le climat d’euphorie est tel que certains ouvriers achètent des actions, encouragés par une campagne d’affichage efficace.
Mais en 2001, les marchés financiers sont instables et les commandes de la machine baissent. L’usine se trouve rapidement au bord de la faillite. Les vagues de licenciements se succèdent en l’espace de 13 mois : plus de 600 employés sont renvoyés. Les plans sociaux ne font pas partie des stratégies de recapitalisation proposées par la direction.
Le cas de Tornos fait partie de la chronique récente des débâcles industrielles dues aux stratégies financières. Ces chroniques sont communiquées au quotidien par les médias et elles ne sont pas sans effets sur la perception confuse que chacun se fait du monde économique, des succès et des échecs industriels. Ce film interroge le sens de «l’enthousiasme» véhiculé par l’économie néo-libérale, mis en pratique par le management et subi par les travailleurs.
« Un directeur qui joue au patron, un ouvrier que l’on baptise opérateur responsable, un lieu de travail que l’on appelle maintenant îlot de production, le nom d’une usine qui devient le nom d’une action à la bourse J’ai l’impression de me perdre dans un jeu où l’on manipule allégrement des mots comme famille, responsabilité, confiance, autonomie ».
Sortie le 28 septembre à Genève au BIO et à Lausanne au ZINEMA. Distribué dans les salles de Suisse romande dès cet automne.