Échec des (vidéo-) surveilleurs

Le 29 juin dernier, la population veveysanne a refusé à 60,6% un projet qui visait à installer 44 caméras de surveillance autour de la gare de Vevey, dans le but affiché de lutter contre le deal de rue. 

Le projet s’inscrivait dans la continuité des politiques répressives et sécuritaires sur la question du deal de rue qui se retrouvent dans d’autres villes de Suisse et notamment à Lausanne.

Entretien avec nos camarades de décroissance alternatives (da.) qui ont participé à la campagne victorieuse contre ces mesures. 

Portrait d'Yves Christen devant une affiche contre les caméras de surveillance à Vevey
L’ancien syndic radical Yves Christen s’est engagé pour le non au caméras de surveillance

Vevey subit un important deal de rue actuellement concentré autour de la Gare. Une partie de la population s’en plaint régulièrement et ressent un sentiment d’insécurité, sous-tendu par des préjugés racistes et attisé à dessein par la droite qui en a fait depuis 2021 – avec la défense de la voiture en ville – son thème favori.

La Municipalité, sous pression, a communiqué en mars 2024 une liste de neuf mesures de compétence communale1, dans le cadre de la politique fédérale des quatre piliers en matière de drogue. Certaines ont été mises en œuvre: l’action des polices s’est accrue; l’appel des trois syndics des villes de Lausanne, Yverdon et Vevey devrait permettre un appui supplémentaire du Canton sur les plans policier, judiciaire et sanitaire; un test de médiation urbaine s’est déployé jusqu’au 31 janvier 2025 et devrait être pérennisé par un renforcement du travail social de proximité, pour lequel un budget est déjà disponible et devrait permettre d’engager 2,1 équivalents plein temps. Par contre, le développement du dispositif socio-sanitaire, la communication ou l’aménagement et l’animation de l’espace public n’ont pas encore été concrétisés.

La vidéosurveillance était la dernière mesure envisagée. Elle a été favorisée, sans réelle étude sur son efficacité, car elle aurait démontré de façon visible que l’exécutif était déterminé à agir. Il faut souligner que c’est la seule mesure qui a été débattue et finalement rejetée. Les autres ont fait l’objet d’un large consensus dès le début et nous demandons leur mise en place sans délai.

Il faut préciser qu’il s’agit d’un «référendum spontané», proposé par le PLR après consultation de tous les partis sauf da. Le but était de convaincre la partie hésitante du Conseil communal, puisque seul un projet validé peut être soumis à référendum. La vidéosurveillance a ainsi été acceptée par une majorité d’environ ⅔, allant de l’UDC au PS.

Le comité Non aux caméras s’est alors formé, sous l’impulsion de da., mais intégrant des personnes de divers horizons, engagées ou non en politique, notamment l’ancien syndic radical de Vevey et ancien président du Conseil national Yves Christen.

La vidéosurveillance était soutenue, outre par la majorité de la Municipalité, par une large alliance de la plupart des partis, PLR et PS en tête. Vevey-libre et les Vert-e-s sont restés neutres. Seul En avant Vevey! appuyait le non aux côtés de da.

La campagne du comité – et celle parallèle de da., avec une lettre adressée à 2000 électeur·ices et signée entre autres par le syndic – a consisté à faire comprendre que la vidéosurveillance est à la fois inutile, intrusive et d’un coût disproportionné, en s’appuyant sur toutes les études montrant qu’elle ne fonctionne pas dans les conditions prévues. Il a aussi fallu démonter le mensonge du camp du oui, qui prétendait que le vote concernait un paquet caméras et mesures sociales, à accepter ensemble, ou à refuser et ne plus rien faire. Nous avons réussi à éviter que la majorité de la population tombe dans ce piège.

Ce résultat prouve qu’il est possible de faire passer un message informatif et non simpliste à la population. Mais il ne permet pas de tirer hâtivement des conclusions pour les élections à venir, car rien n’est jamais acquis. Le rejet d’un dispositif technique ou l’adhésion à un programme politique ne répondent pas forcément aux mêmes motivations.

Cependant, ce net refus devrait être un sujet de réflexion pour les partisan·es du oui, PS compris, qui, trop sûrs de l’approbation populaire, y voyaient une occasion rêvée de marginaliser da. Caramba, encore raté!

Propos recueillis par Noémie Rentsch