Un «nouveau militantisme»? A propos de quelques idées reçues

Un «nouveau militantisme»? A propos de quelques idées reçues

Périodiquement, des ouvrages de journalistes viennent proclamer
l’avènement d’une nouvelle génération
de militant·e·s, aux projets et pratiques radicalement
innovants, et dont l’efficacité tiendrait
précisément à leur aptitude à bousculer les
routines contestataires, à inventer des formes d’action
collective inédites, misant notamment sur l’humour et le
spectaculaire1. A l’opposé de leurs
aîné·e·s aux pratiques protestataires
sclérosées, les «nouveaux
militant·e·s» sauraient peser dans les rapports de
force par leur usage judicieux des médias et leur
capacité à transmettre un message positif auprès
de l’«opinion publique ». Alors que les
«anciens militant·e·s» —
c’est-à-dire, en premier lieu, des syndicats — et
leurs formes d’action « traditionnelles» —
prioritairement la grève — pècheraient par leur
caractère routinier, leur absence d’humour et, bien
sûr, la gêne qu’ils·elles occasionnent aux
usagers·ères (pardon : des client·e·s)2,
les «nouveaux militants» se remarqueraient par leur
capacité à mettre en scène les motifs de leur
indignation et à mener des actions souriantes, comme les
fêtes improvisées lors de visites de logements de «
Jeudi noir », destinées à stigmatiser les carences
du parc immobilier des grandes villes, ou les déguisements de la
BAC — la «Brigade activiste des clowns» —
pendant les manifestations.

Les « manifestations de papier »

Que, par un magnifique mouvement circulaire, les journalistes
considèrent comme les plus efficaces, comme les plus
sympathiques et surtout comme les plus dignes
d’intérêt les mouvements dont les actions sont
directement réalisées à leur intention — ce
que Patrick Champagne appelle des «manifestations de papier
», conçues pour la presse et qui n’existent
qu’à condition de trouver un écho dans la presse3
— ne sera pas au centre de notre propos. Ce que l’on
souhaite interroger est une série de traits fréquemment
associés au «nouveau», et spécialement
l’un d’entre eux qui contribuerait à rendre les
jeunes générations militantes supérieures à
leurs aînées : le caractère «informel»
ou  horizontal» de leur (in)organisation interne. Au temps
des structures rigides, hiérarchisées et
bureaucratisées — et dont les partis se revendiquant du
communisme ou les syndicats seraient le paradigme et la triste
survivance — aurait succédé celui des
«collectifs», des «réseaux»,
marqués par l’égalité des statuts et le
libre choix de ses modalités et intensités
d’engagement.

Il ne s’agit pas seulement d’une idée de
journalistes : certains sociologues ont eux-mêmes
développé cette thèse d’une mutation des
formes de l’engagement. Telle qu’elle est par exemple
exposée par Jacques Ion, elle oppose un militantisme «
total » du passé au militantisme «
distancié» du temps présent4. Le premier
se caractériserait par un investissement intense dans la cause,
à laquelle une large part de la vie familiale et des loisirs
serait sacrifiée: réunions plusieurs soirs par semaine,
distributions de tracts et vente du journal le dimanche, auxquels
s’ajouteraient cotisations élevées, docilité
à l’égard de la hiérarchie et fort
attachement identitaire au mouvement (parti, syndicat…).

Le second se singulariserait à l’opposé par les
fluctuations de l’engagement, conçu comme « à
la carte»: chacun·e choisirait ses propres rythmes,
degrés et modalités de participation au groupe, et se
méfierait comme de la peste des structures bureaucratiques
hiérarchisées perçues comme menaçantes pour
son autonomie et sa liberté. De même, ces nouveaux
militant·e·s n’hésiteraient pas à
passer d’une cause à une autre au gré de leurs
envies et disponibilités (de la défense d’un site
menacé à celle des sans-papiers, par exemple).

Au militantisme total correspondrait le timbre de la carte
d’adhérent (qui suppose qu’on adhère
fortement au groupe militant auquel on appartient), tandis que le
militantisme distancié serait symbolisé par le post-it,
que l’on peut successivement apposer sur une multiplicité
de supports, et qui, facilement décollable, ne suppose pas un
attachement solide et durable.

On trouve un constat relativement similaire chez Luc Boltanski et Eve
Chiapello lorsqu’il et elle interprètent le
développement des nouveaux modes de militantisme à la
lumière des mutations du capitalisme. La contestation d’un
capitalisme devenu «réticulaire », basé sur
des connexions rapides entre petites unités flexibles, exigerait
une critique isomorphe, organisée elle aussi sur le mode du
réseau et amenant différentes unités
contestataires à se coaliser ponctuellement dans la visée
d’un «projet»5. De la même
manière que les nouvelles méthodes de management du
«nouvel esprit du capitalisme» valoriseraient les rapports
davantage «horizontaux» entre collaborateurs ·trices
— les «petits chefs» ont disparu des entreprises, le
tutoiement  st de rigueur entre membres d’une même
«équipe», etc. — les mouvements sociaux
adopteraient eux aussi la forme souple et flexible du
«réseau» dépourvu de centre directeur et de
bureaucratie6.

Un militantisme dépassé?

On peut, comme l’a fait Annie Collovald, remarquer que ce genre
d’hypothèse n’est pas dépourvu de
connotations normatives: le «total» de l’ancien
militantisme voisine avec le «totalitaire », tandis que le
militantisme «distancié » se
révèlerait davantage respectueux de l’individu et
de son autonomie.

La distinction débouche ainsi sur la disqualification — en
les présentant comme dépassées ou contraignantes
— des formes de militantisme considérées comme
propres aux classes populaires, et spécialement de celles
posées comme spécifiques aux organisations de
l’ancien écosystème communiste7.
L’opposition ne serait de ce point de vue pas tant entre un
« ancien» et un «nouveau» types
d’engagement qu’entre militantismes supposés
spécifiques, respectivement, aux classes populaires et aux
classes moyennes cultivées8. Considérer
«dépassé» et «révolu» le
militantisme «total» au profit de son successeur
«distancié» participe de ce point de vue de la
disqualification et de l’invisibilisation politiques du monde
ouvrier et, plus largement, des classes populaires.

On peut également remarquer  que cette thèse,
séduisante a priori, d’une mutation du militantisme
n’est guère confirmée lorsqu’on la confronte
au « sol raboteux » de la réalité empirique.
Trois exemples en attestent. L’historienne Axelle Brodiez a bien
montré dans son étude du Secours populaire, organisation
caritative liée au PCF, combien parvenir à
fidéliser des effectifs très instables a, dès les
années 1950, constitué une des principales
préoccupations de ses responsables9. En
d’autres termes, on trouvait des engagements fluides,
temporaires, bref du militantisme «distancié», en
plein coeur de l’écosystème communiste, au moment
même où celui-ci, alors au sommet de sa puissance,
était supposé dominé par un militantisme
«total». Deuxième exemple, contemporain
celui-là: la Coordination des intermittent·e·s et
précaires d’Ile-de-France (CIP-IDF), au sein de laquelle
l’engagement, en dépit du discours tenu par ses animateurs
·trices, apparaît à l’examen bien loin
d’un «militantisme distancié ». Plusieurs
entretiens réalisés auprès de ses membres
décrivent un militantisme accapareur de temps et
d’énergie, au point de mettre en péril la situation
économique et les perspectives de carrière de
militant·e·s qui se dévouent sans compter à
leur cause10.

Un engagement aussi intensif, qui amène
certain·e·s à sacrifier vie familiale et
professionnelle à la défense de la cause, met à
mal la thèse du nouveau «militantisme post-it»:
c’est au coeur de ce qui se pose comme une forme exemplaire de
militantisme distancié que se repèrent des remises de soi
et des formes de soumission aux exigences de la lutte
considérées comme révolues car supposées
spécifiques au «militantisme total» des «
anciennes» organisations bureaucratiques. Dernier exemple, le
mouvement altermondialiste, posé comme paradigmatique du
militantisme «en réseau », dépourvu de centre
dirigeant et où les décisions se prendraient au
consensus. Si l’image peut correspondre à certains
secteurs limités du mouvement, elle ne convient guère
à ce qui constitue en France sa principale organisation, Attac,
dont la direction nationale a souvent été
critiquée comme excessivement bureaucratique et
hiérarchisée.

Modes d’organisation et démocratie

Il se pourrait bien, d’ailleurs, que la bureaucratie et la
hiérarchie explicites soient dans la pratique gages de davantage
de démocratie que l’informalité et
l’horizontalité proclamées. Une illustration en est
une nouvelle fois fournie par l’étude du fonctionnement de
la CIP-IDF qui se veut un collectif égalitaire ouvert à
tou·te·s et où chacun·e peut, au cours des
assemblées générales régulières
garantes de la démocratie des décisions, exprimer
librement son point de vue. L’observation de ces
assemblées montre qu’à l’inverse de ce qui
est espéré et proclamé, tout le monde n’est
pas a priori égal devant la prise de parole en public. De fait,
l’informalité et
l’«horizontalité» fréquemment promues
comme garantes de plus grande «ouverture» et
«accessibilité» aux militant·e·s se
révèlent dans les faits hautement sélectives, car
accessibles aux seuls individus disposant de suffisamment de
compétence militante pour se sentir autorisés à
intervenir dans les débats. Cet exemple ne fait que confirmer le
constat ancien de la sociologue américaine Jo Freeman, qui avait
remarqué que l’«informalité» promue par
les groupes de parole féministes des années 1970 tendait
dans les faits à exclure les femmes qui se sentaient les moins
légitimes à prendre la parole, et reproduisait tout en
les niant les rapports de pouvoir et de monopolisation de la parole
qu’ils prétendaient pourtant neutraliser11.

Cette question des compétences et aptitudes (à parler en
public, notamment) requises pour pleinement participer à un
groupe militant rejoint celle de la sélection sociale de ses
membres. En valorisant ou en sollicitant certaines dispositions ou
propriétés sociales, et en en disqualifiant
d’autres, les groupes militants produisent, souvent sans le
vouloir ni en être conscients, la relative
homogénéité de leurs effectifs, et induisent une
exclusion des postulant·e·s par trop différents.
On peut ainsi avancer, à la suite de Frédéric
Sawicki, que «les associations choisissent leurs membres autant
que ces derniers les choisissent»12.

C’est en effet en proposant certaines formes d’action
plutôt que d’autres (plus ou moins perturbatrices ou
pacifiques, ludiques ou sérieuses, etc.), et certains modes
d’organisation et de débat internes (direction pyramidale
ou collégiale, leadership charismatique ou
rationnel-légal, etc.), que les groupes militants
sélectionnent leurs membres. Cette sélection, bien
sûr, n’opère pas de manière explicite, mais
s’accomplit le plus souvent dans et par la sociabilité
militante, et s’exprime au travers de la capacité de
l’aspirant activiste à «trouver sa place» au
sein du groupe qu’il souhaite rejoindre. Les propos suivants,
recueillis en entretien, d’un militant de la CIP-IDF signalent
bien, tout en recourant au vocabulaire de la «sympathie» et
de l’« accueil», la sélection de ses
militant·e·s potentiels qu’opère la
Coordination : « Il n’y a jamais eu d’exclusion, on
n’a jamais exclu personne, mais en même temps aussi, il y a
une manière de se comporter avec les gens qu’on
n’aime pas qui fait qu’au bout d’un certain temps,
ils ne reviennent plus. (…) Il y a plein de gens qui sont venus
des fois, et qui sont repartis parce qu’on ne les a pas
accueillis. Il y a aussi plein de gens qui ne pensaient pas tout
à fait comme ce qui reste maintenant et qui n’ont pas
trouvé leur place, et qui sont repartis.»

«Trouver sa place» dans une organisation n’est pas
forcément chose aisée lorsque règne la norme (car
c’en est une) selon laquelle « chacun·e fait ce
qu’il veut ». Ceux et celles les moins dotés en
compétences militantes risquent alors de ne pas savoir quoi
faire, et de s’effacer assez vite d’un groupe dont la
logique, les codes, la sociabilité, les pratiques, leur restent
étrangers.

Dans d’autres cas, ils·elles se «feront une
place» en «choisissant» de s’investir dans des
pratiques de second plan, ne nécessitant pas une grande culture
militante mais dans lesquelles peuvent se transposer des dispositions
ou savoir-faire — de service, notamment — d’ordre non
militant. Les féministes l’ont montré depuis
longtemps: il n’y a pas besoin de contrainte, ni même de
formuler une demande explicite, pour que dans les groupes militants
(entre autres types de groupes) ce soient
«spontanément» et «comme naturellement»
les femmes, et spécialement celles les moins pourvues en
expérience militante, qui s’occupent des tâches
d’entretien (nettoyage des lieux après la réunion)
ou de service (non seulement préparer et servir le café,
mais penser à acheter du café, des filtres et du
sucre…)13.

Les travers de l’informalité

L’étude conduite sur la CIP-IDF fournit là encore
une bonne illustration. Les aspirants militants — et, surtout,
les aspirantes militantes — désireux de contribuer
à l’action collective mais qui se sentaient les moins
aptes et autorisés à exercer les activités
qu’ils·elles percevaient comme les plus exigeantes se sont
repliés sur des activités secondaires, pas tant relatives
à l’action proprement militante qu’à la
marche quotidienne du collectif et à sa sociabilité
interne.

De manière significative, ce sont des activités de
service et engageant des compétences relationnelles (le bar,
l’accueil), socialement construites comme féminines, qui
ont alors été privilégiées par ceux, et
surtout celles, qui considéraient les activités les plus
«politiques» comme inaccessibles ou impossibles pour
eux·elles. Par leur retrait dans des activités de second
plan, ces militant·e·s ont implicitement abandonné
les tâches les plus valorisantes, et spécialement celles
de direction et d’élaboration programmatique, à des
virtuoses du militantisme maîtrisant beaucoup mieux ses formes,
enjeux et expressions. Ce faisant, ils·elles ont
involontairement contribué à une reproduction des
rapports de domination d’autant plus efficace que ceux-ci sont
officiellement niés par l’idéologie
«horizontale» du groupe.

L’enjeu n’est pas ici de dénoncer ou de
démasquer les leaders des groupes qui prétendent en
être dépourvus. Le plus souvent, l’ensemble des
membres d’un groupe militant sait qu’en son sein certains
occupent une place plus importante que les autres, notamment parce
qu’ils ont davantage de disponibilité et peuvent faire
plus de choses, sont plus souvent présents au local, sont plus
fréquemment sollicités comme porte-parole par les
médias parce que déjà identifiés par eux,
etc. Ce n’est  ’ailleurs pas toujours à
l’avantage de ces «leaders implicites» qui, du fait
de leur position centrale dans le fonctionnement du groupe, se trouvent
fréquemment en charge d’une masse de
responsabilités et de tâches qu’ils souhaiteraient
pourtant partager. Mais, comme le leader est celui qui est davantage au
courant ou le plus compétent, c’est toujours vers lui que
le reste du groupe se tourne pour obtenir une information, c’est
de lui que l’on attend les initiatives ou sur lui que l’on
fait porter les responsabilités.

Comme cette position confère un certain pouvoir en contrepartie
d’un travail plus important, le «leader implicite»
est souvent déchiré entre son désir de partager sa
charge et la crainte que ce partage réduise sa capacité
d’influence ou sa marge de manoeuvre — d’où sa
fréquente ambivalence à l’égard de son poste
et sa vive susceptibilité lorsqu’on lui reproche ses
«excès de pouvoir» ou son
«égocentrisme».

L’enjeu est davantage d’être conscient que tout
fonctionnement collectif est susceptible d’induire des
phénomènes de concentration de l’information, de la
représentation extérieure, des responsabilités
— bref : du pouvoir —, et de ne pas être dupe de sa
propre volonté, même la plus sincère, de
fonctionner de la manière la plus égalitaire et
collégiale possible. Et il se trouve que ce sont bien souvent
les procédures les plus formelles qui permettent
d’accéder à cette — toujours relative —
égalité de participation et de traitement :
présidence de réunion, tours de table plutôt que
prise de parole spontanée, limitation du temps
d’expression, diffusion aux absent·e·s de
comptes-rendus de réunions, ou encore élection
d’un·e porte-parole (éventuellement tournant),
permettent beaucoup plus que la simple proclamation
d’horizontalité et d’égalité de parer
à la concentration des pouvoirs et à l’institution
de petits chefs d’autant plus puissants qu’ils sont
niés. Toutes ces procédures ne sont certes pas une
panacée (le tour de table peut être vécu comme une
violence par celles et ceux qui ne souhaitent pas parler, la
rédaction des comptes rendus est souvent fastidieuse et ceux-ci
ne sont pas nécessairement lus, etc.), mais elles peuvent
garantir contre les dévoiements de la démocratie interne
bien mieux qu’une confiance naïve dans l’égale
compétence militante de tou·te·s.

L’enjeu est également, mais cette fois d’un point de
vue davantage analytique, de se méfier des proclamations de
nouveauté. «Tout nouveau tout beau » ne saurait
passer pour un principe d’analyse valable, d’une part parce
que — pardon de devoir rappeler ici un tel truisme —
l’histoire n’est pas nécessairement orientée
vers le progrès, et que certaines
«nouveautés» peuvent à
l’expérience se révéler d’authentiques
régressions, d’autre part parce que tout ce qui
apparaît à un moment donné du temps pour
inédit a souvent connu des expressions proches dans le
passé — « on recommence toujours par le milieu
», disait Deleuze. Même si la croyance en la
nouveauté peut par elle-même produire des effets et
induire des modifications de pratiques parfois notables, la recherche
sociologique s’expose en surestimant le poids de
l’inédit à «besogner par mégarde
quelques nouveautés verbales: le Nouvel An ou le Beaujolais
nouveau»14.

Lilian Mathieu
sociologue au CNRS

Cet article a été publié sur le tout nouveau site de la revue Contretemps (http://contretemps.eu). Les intertitres sont de notre rédaction.

1 Cf. pour exemple relativement ancien, Christian Losson, Paul Quinio,
Génération Seattle, Paris, Grasset, 2002, et pour un
autre plus récent Miguel Benasayag, Laurent Jeanneau,
Sébastien Lernould, Pierre-Emmanuel Weck, Les nouveaux militants, Paris, Les Petits matins, 2008.

2 Voir a contrario, sur l’actualité de l’action
gréviste, cf. Sophie Béroud et al., La lutte continue ?,
Broissieux, Le Croquant, 2008.

3 Patrick Champagne, Faire l’opinion, Paris, Minuit, 1990.

4 Jacques Ion, La fin des militants?,
Paris, L’Atelier, 1997. Une des ambiguïtés du travail
de J. Ion tient à ce que son ouvrage se voulait surtout
programmatique, destiné via l’élaboration
d’idéaux-types à tracer des pistes que la recherche
devait confirmer ou infirmer, et que nombre de lecteurs ont cru pouvoir
y trouver des résultats avérés et
définitifs.

5 Luc Boltanski, Eve Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, Paris, Gallimard, 1999.

6 Là aussi la précision s’impose : Boltanski et
Chiapello pointent davantage une croyance des acteurs sociaux dans les
vertus des formes d’organisation réticulaires que la
réalité de leur adoption.

7 Cf. Annie Collovald, «Pour une sociologie des carrières
morales des dévouements militants», in A. Collovald
(dir.), L’humanitaire ou le management des dévouements, Rennes, PUR, 2002.

8 Il ne s’agit d’ailleurs pas d’une idée
radicalement nouvelle : dès les années 70, une certaine
sociologie — représentée en France par Alain
Touraine et son équipe — entendait opposer l’«
ancien» mouvement ouvrier, propre à la
société industrielle et centré sur des enjeux
«matérialistes », aux «nouveaux mouvements
sociaux» significatifs de l’entrée dans
l’ère «post-industrielle » et aux enjeux
«post-matérialistes».

9 Axelle Brodiez, Le Secours populaire français 1945–2000, Paris, Presses de Sciences-po, 2006.

10 Ainsi ce réalisateur et chanteur : «Je
me suis impliqué à plein temps dans cette lutte, donc moi
de mai 2003 à mai 2004, je n’ai rien touché du tout
parce que je refusais de demander le RMI, donc j’ai vendu ma
discothèque, j’ai vendu mon appartement, je me suis
payé ma lutte en quelque sorte.
»

11 Jo Freeman, «The Tyranny of Structurelessness», Berkeley Journal of Sociology, XVII, 1972-1973, pp. 151-165.

12 Frédéric Sawicki, «Les temps de l’engagement», in Jacques Lagroye (dir.), La politisation, Paris, Belin, 2003, p. 126.

13 Xavier Dunezat a montré dans le cas du mouvement des
chômeurs combien le genre et la classe sociale
s’entre-croisent pour produire à l’intérieur
du groupe militant des rapports de domination et d’exploitation,
dont sont particulièrement victimes les femmes de fait
assignées aux tâches domestiques, et progressivement
conduites à s’effacer de l’action collective voire
à l’abandonner totalement au profit des seuls hommes;
«Trajectoires militantes de
chômeurs et chômeuses mobilisé·e·s: la
centralité des rapports sociaux de sexe
», communication au colloque Genre et militantisme, Lausanne, novembre 2005.

14 Jean-Claude Passeron, Le raisonnement sociologique, Paris, Nathan, 1991, p. 176.