Honduras: « ils ont voté et puis après...»

Honduras: « ils ont voté et puis après…»

Comme prévu, les élections organisées par le
régime de facto se sont tenues le 29 novembre au Honduras. Le
candidat du Parti national (conservateur), Porfirio Lobo,
l’emporte sur son concurrent libéral.

    Selon le Tribunal suprême électoral
(TSE), la participation serait de 61 % des votants. Mais une
organisation agréée par le TSE, « Hagamos
democracia », a dû mentir plus discrètement
en annonçant une participation de 47 %…

    Tous ces chiffres ont été formellement
démentis par le Front national de résistance, qui
confirme un taux de 65-70 % d’abstentions. Dans certaines
régions du Honduras, l’abstention atteignait même
75 %…

    Selon un sondage du CODEH (Comité de
défense des droits de l’homme au Honduras) à la
sortie des bureaux de vote, la participation au vote ne
dépassait pas 22 %.

    Le 29 novembre, une marche pacifique a
été réprimée dans la seconde ville du pays,
San Pedro Sula ; bilan de l’intervention
policière : 1 mort, 83 personnes arrêtées.

    A ce jour, 5 pays ont reconnu la validité du
scrutin : les USA, le Pérou, la Colombie, Panama et
Israël. Mais l’ONU, l’OEA et l’Union
européenne n’ont pas envoyé d’observateurs le
29 novembre : les « observateurs
internationaux » présents étaient des
parlementaires de droite US ou latino-américains, partisans du
putsch, et des contre-révolutionnaires cubains et
vénézuéliens.

Les putschistes persistent…

Le 2 décembre, le Congrès a refusé le retour de
Manuel Zelaya à la présidence. Lors de la session
extraordinaire de l’OEA, le 4 décembre, Patricia Rodas
(ministre des Affaires étrangères du gouvernement Zelaya)
a rappelé aux possibles adeptes
« réalistes » du fait accompli que
Porfirio Lobo ne représente que la continuité de Roberto
« Goriletti » : « Le vainqueur
des élections de dimanche passé selon le Tribunal
suprême électoral est le chef d’un groupe
parlementaire qui a ratifié le coup d’Etat le 2
décembre. Il a estimé que la position de son groupe
était correcte ».

… Et la résistance continue !

De passage à Buenos Aires, Berta Cáceres (dirigeante du
COPINH et de « Féministas en
Resistancia ») a expliqué au journal
« Pagina 12 » le contexte électoral et la
stratégie à long terme de la résistance :
« Les classes moyennes n’étaient jamais
allées voter si nombreuses. Dans les quartiers populaires, la
majorité des gens sont restés à la maison.
J’ai visité toutes les communautés dans l’Est
du pays jusqu’à Paraison (ville frontière avec le
Nicaragua). C’était un désert, les gens refusaient
ce cirque électoral. Dans certains quartiers, les urnes
n’ont pas pu être installées, dans d’autres
quartiers à peine 20/30 % des gens ont voté. Mais la
situation était très difficile. Durant la semaine
précédente, la répression fut très dure et
le jour même des milliers de soldats, de réservistes et de
policiers avaient été déployés. Dans mon
village – La Esperanza, une région indigène du
sud-est – trois semaines avant les élections, ils sont
venus avec des tanks et des mitrailleuses. D’abord, quelques
fonctionnaires putschistes ont renversé une plaque de
remerciement au peuple cubain pour l’aide que celui-ci nous avait
accordée lors de l’ouragan Mitch [1998]. Ils l’ont
remplacée par une autre en l’honneur de Micheletti et des
forces armées. Le lendemain, 800 réservistes sont
arrivés avec le général Romeo Vázquez
Velázquez et Micheletti pour inaugurer la nouvelle plaque. Deux
jours après, c’était le tour du candidat
libéral Elvin Santos, et 48 heures plus tard devait venir
Porfirio Pepe Lobo, mais nous avons organisé une grande
manifestation qui a empêché Lobo d’être
là… » Et Berta Cáceres de conclure :
« Nous devons réorganiser la force sociale et
l’expérience que nous avons acquise pour créer un
nouveau rapport de forces, permettant la convocation d’une
Assemblée nationale constituante populaire et
démocratique ». Une lutte de longue durée
donc, contrairement à l’échec rapide du putsch
d’avril 2002 au Venezuela.


Hans-Peter Renk