Kim et Trump? What the f***?!

Déclaration conjointe des deux Corées, sommet RPDC-USA, suspension d’exercices militaires USA-Corée du sud, discussion d’un traité formel de paix: un tournant radical sur la question coréenne en quelques mois?

Comme expliqué dans un précédent numéro, la stratégie internationale nucléaire de la République populaire démocratique de Corée (RPDC) de ces 30 dernières années est étonnamment stable pour des raisons économiques et sécuritaires.

Son dernier essai nucléaire fin 2017 a démontré sa capacité d’atteindre les USA, soit l’aboutissement d’une longue phase de préparation à des négociations. La tactique politique est la suivante: détenir un objet suffisamment menaçant pour prévenir toute intervention militaire, tout en proposant de s’en défausser pour exiger des garanties de sécurité, d’indépendance et de coopération économique.

La RPDC, OK, mais les États-Unis?

Une avancée sur le dossier coréen constituerait un haut fait pacifique pour la diplomatie trumpiste, à première vue à l’opposé de son bilan politique international: le pacte nucléaire iranien, l’ambassade des États-Unis à Jérusalem, son retrait du Conseil des droits humains de l’ONU, de l’UNESCO et de l’accord de Paris sur le climat, etc.

Ce coup diplomatique répond aussi aux exigences de la restructuration nationaliste du capitalisme étasunien pour se réaffirmer à l’égard des autres capitalismes, le fameux «America First». La reconfiguration de sa stratégie internationale et commerciale illustre sa réponse à deux buts contradictoires des relations entre États capitalistes: (1) garantir l’organisation et le fonctionnement des capitalismes à l’échelle mondiale, (2) tout en dominant les autres. Naïf celui qui croit que la domination s’exerce seule, aveugle celui qui croit au développement égalitaire des capitalismes.

Pour les USA, cette avancée a plusieurs fonctions. Elle permet de présenter le pays non seulement comme un acteur mondial incontournable tout en rejetant les institutions internationales multilatérales, mais aussi comme un acteur de paix. Elle ouvre d’ailleurs la porte à l’inclusion de la RPDC dans le marché mondial, qui expérimente depuis plusieurs années l’intégration de mécanismes de libre-­marché à son économie planifiée. Enfin, elle distrait des autres enjeux politiques brûlants auxquels Trump est confronté, enjolivant sournoisement l’impérialisme étatsunien.

Une première pierre pour la paix

Au sud du pays, une écrasante majorité soutient cette dynamique pacifique. En témoignent les sondages nationaux et les communiqués de nombreuses organisations, associations et syndicats. Au nord, la levée de l’état de siège serait forcément bénéfique au peuple. Matériellement, mais aussi politiquement, avec pour conséquence la libération de la circulation de l’information et dès lors, l’organisation de la lutte contre l’autoritarisme de l’État.

Quoi qu’il en soit, notre position de solidarité internationaliste doit s’inscrire en soutien sans faille à la pacification et à la démilitarisation de la péninsule coréenne, comme étape pour la paix, pour les droits démocratiques et des conditions de vies dignes pour toutes et tous.

Thomas Joo-Young Feron