Grande-Bretagne
Grande-Bretagne : La fin du vandalisme social?
La conférence annuelle du Parti travailliste s’est tenue du 23 au 26 septembre. Jeremy Corbyn, à la tête du Parti depuis 2015, y a livré un discours et un programme qui détonnent à côté de ceux de la gauche institutionnelle européenne.
Kevin Tynan Bowe
Pendant plus d’une heure, Corbyn a proposé des politiques s’opposant ouvertement à celles que prône depuis des années le Parti conservateur au pouvoir. Il a critiqué, dénoncé, accusé une minorité au mieux arrogante et élitiste, au pire xénophobe et raciste, chérissant la haine et les divisions. Mais loin de ressasser les graves manquements de ses adversaires, le discours de Corbyn les a dépassés. Aujourd’hui, l’agenda politique des travaillistes offre un contraste saisissant avec celui des autres partis de la gauche institutionnelle européenne: plutôt que de jouer sur la contestation de façade, il est force de proposition.
Au programme: la reconstruction et la transformation de la Grande-Bretagne, minée par des décennies de privatisations et de mesures d’austérité dans l’éducation, la santé, l’assistance sociale ou les transports.
Des mesures ambitieuses
Concrètement, le Parti promet une augmentation salariale et l’amélioration de la formation du personnel des crèches, qui offriront jusqu’à 30 heures de garde gratuite par semaine pour les enfants entre deux et quatre ans ; la distribution gratuite de repas scolaires aux enfants entre cinq et sept ans ; une meilleure représentation (un tiers des sièges) des travailleurs et des travailleuses au sein des conseils d’administration des entreprises afin de créer un rapport de forces plus équilibré, et le soutien des syndicats ; la création de 400 000 postes dans les nouvelles industries énergétiques, qui s’inscrivent, elles, dans une réduction de 60% des émissions de gaz à effet de serre avant 2030 ; la renationalisation du rail et la déprivatisation du système de santé publique ; le recrutement de 3000 pompiers ; la garantie d’une prise en charge aux urgences ne dépassant pas quatre heures (contre parfois douze aujourd’hui) et un financement adéquat du système de soins et du care, qui passe par l’augmentation des impôts des 5% les plus riches et des assurances maladie privées. Sur le plan international, Corbyn a promis la reconnaissance d’un État palestinien et la fin des interventions militaires à l’étranger, comme en Iraq ou en Libye.
Les propositions travaillistes ne sont pas révolutionnaires, mais elles font trembler les médias et les parlementaires de droite, qui se trouvent obligés de les relayer pour la première fois depuis longtemps. Mais rien n’est encore gagné: sans des revendications venant d’en bas et des mobilisations de masse, Corbyn ne pourra tenir ses promesses. Pour continuer à surfer sur la Corbynmania, les Britanniques n’ont pas d’autre choix que de continuer à créer des vagues.
Ursula Rouge