Contre un système patriarcal qui a fait son temps

Depuis quelques semaines, la question de la place des hommes dans la grève du 14 juin occupe le devant de la scène. S’y exprime une crainte à se voir assigner des tâches de second ordre, des tâches dites de care, des tâches féminines.

Action du collectif de la grÃve féministe à  Lausanne, mai 2019

A un mois de ce qui s’annonce comme une journée de mobilisations et de revendications historique à l’échelle de notre pays, l’inquiétude de certains hommes face à un discours qui leur demande simplement de se tenir en retrait, à disposition pour s’occuper des enfants, pour préparer des repas ou pour nettoyer ne fait que croitre.

Au-delà des débats et discussions stériles où la mauvaise foi côtoie l’antiféminisme pur et dur, c’est une conceptualisation du travail féminin comme d’un non-travail, comme d’une forme de non–participation, d’exclusion, dès que l’on demande à des hommes de l’assurer qui devrait nous questionner. Ce travail de soin, de care, invisibilisé, est nécessaire au bon fonctionnement de notre société et il devrait être reconnu comme tel.

Cependant, les hommes solidaires existent et ils n’ont pas attendu quelques articles polémique dans les médias pour se réunir et se questionner ensemble sur la meilleure manière de soutenir la grève. Le 14 juin, ils s’occuperont de l’accueil des enfants, du service du repas de midi ou des nettoyages en fin de journée. Des groupes existent dans les cantons de Vaud, Neuchâtel, Fribourg, Valais, Berne, Genève, sur des lieux de travail comme à l’OFS, l’UNIL-EPFL ou ailleurs.

Remise en cause permanente

Plus généralement, la remise en question permanente de la légitimité des femmes* à se réunir et à s’organiser entre elles, sans hommes, est épuisante. Non seulement parce que l’on ne trouvera personne pour s’offusquer sur les nombreux clubs intégralement masculins qui existent dans toutes les sphères de notre société, et bien souvent dans les sphères qui détiennent le pouvoir. Mais également parce que, depuis le mois de septembre, les collectifs de grève ont travaillé d’arrache-pied pour développer et visibiliser un nombre important de thématiques liées aux discrimination subies par les femmes en Suisse: inégalité sur les lieux de travail, violences sexistes, restriction du droit à disposer librement de son corps, etc. Face à ces enjeux, le débat sur la place que peuvent bien occuper les hommes dans ce mouvement ne figure pas dans les priorités.

Ce qui est demandé, ce qui est exigé par les femmes* qui sortiront dans la rue le 14 juin, c’est une égalité dans les faits. Cette grève n’est pas contre les hommes mais contre un système patriarcal qui a fait son temps!

Noémie Rensch

Nouvelles de la grève en Suisse alémanique

Du côté alémanique, les collectifs de grève se sont développés plus tard, mais ils ne demeurent pas moins actifs dans l’élaboration de nombreuses actions. Très décentralisés, ils ne disposent pas à ce stade d’une coordination alémanique qui les réunirait. Leurs revendications sont englobées dans des manifestes cantonaux. Toutefois, au niveau du contenu, les revendications sont quasi identiques à celles du manifeste romand.

Quid des avancées matérielles? La grève n’est pas licite partout. Celle du travail rémunéré est obtenue dans certains secteurs publics uniquement, tandis que les travailleuses du secteur privé comme de l’économie domestique ne pourront pas la suivre. Il en va de même pour la grève d’études. Tout·e·s les étudiant·e·s en Suisse alémanique ne seront pas logé·e·s à la même enseigne. À titre d’exemple, si l’ETHZ octroie le congé ce jour-là, il n’en va pas de même pour les autres lieux de formation comme l’Université de Berne.

Les collectifs ont déjà sorti des programmes riches pour le 14 juin. Les mobilisations et actions sont prévues dans tous les cantons alémaniques tandis que la capitale attend un fort afflux à la Bahnhofplatz. À un mois de la grève, les collectifs de tout le pays viennent de lancer un compte à rebours à travers des actions planifiées et cordonnées au niveau national.

Les différentes revendications et actions dans chaque canton sont présentées sur frauenstreik2019.ch et frauen-streiken.ch

Tamara KneÅević