Ukraine
De l'Ukraine à la palestine, l'occupation est un crime!
Nous reproduisons une lettre ouverte du Comité Ukraine Vaud à l’attention du POP-Vaud en réaction à leur invitation du journaliste et essayiste français Michel Collon à Lausanne mercredi 30 octobre. Une prise de position et une mise en garde que nous partageons.
Refusant une vision uniquement binaire d’affrontement entre l’OTAN-Occident et la Russie, nous affirmons que la guerre impérialiste russe du régime de Poutine vise les peuples qui défient les régimes autocratiques. Dans cette lutte pour le contrôle des ressources et pour préserver l’emprise de l’oligarchie sur la Russie, il est crucial de reconnaître la capacité d’action du peuple ukrainien et le soutenir. C’est cela, notre anti-impérialisme.
C’est pour défendre cet anti-impérialisme que, par exemple, nous organisions en mars de cette année une conférence publique intitulée Palestine, Syrie, Ukraine: résister à l’oppression et à l’occupation. Nous avons pu y discuter des liens et des solidarités possibles en faveur de l’autodétermination et l’émancipation des Palestinien·nes, Syrien·nes et Ukrainien·nes.
Chères amies, chers amis,
C’est avec surprise que nous avons appris l’organisation par le POP d’une conférence au Cazard, le 30 octobre 2024, avec Michel Collon intitulée «Palestine, Ukraine: comment décoder la propagande de guerre».
Depuis maintenant des décennies, Michel Collon s’est distingué par une vision binaire des relations internationales où la division fondamentale du monde est celle entre les États occidentaux, sous hégémonie des États-Unis, et leurs «adversaires». Cela le conduit à un «anti-impérialisme borgne», pour utiliser une formule charitable, passant sous silence, minorant en tout cas, le caractère répressif, autoritaire des États n’appartenant pas au «camp occidental» ainsi qu’à relativiser leurs massacres.
Michel Collon n’a jamais varié ni dans son «campisme», ni dans ses méthodes. De l’implosion de la Yougoslavie, en passant par sa participation au colloque «Axis for Peace» à Bruxelles en novembre 2005 à son soutien, même s’il est parfois «qualifié», des régimes Kadhafi et al-Assad, la même technique, les mêmes obsessions sont à l’œuvre. Sous couvert d’une critique des «médiamensonges», Collon sème le doute, met bout à bout des déclarations et des faits, souvent tronqués, instruisant uniformément à charge le «camp occidental» et à décharge une série d’États prétendument opposés à l’Occident.
Ainsi, pour ce qui a trait à l’Ukraine, dans ses conférences aux côtés de l’inénarrable «agent» helvétique Jacques Baud, il met en doute autant le massacre de Boutcha que la brutalité de l’attaque sur Marioupol (faisant fond sur les… médiamensonges russes concernant l’attaque de l’une des maternités de cette ville). Cette technique odieuse consistant à relativiser, voire à nier, des crimes de guerres et contre l’humanité opère, en revanche, de manière inverse lorsqu’il s’agit de condamner, à juste titre, les crimes de même nature commis par l’État d’Israël. C’est précisément le cœur de notre critique: le bombardement d’un hôpital ne peut jamais être relativisé, à Gaza, comme à Grozny, Alep ou Marioupol. C’est là une attitude internationaliste conséquente, qui est la nôtre.
Donner la parole à Michel Collon, c’est donc renoncer à tout internationalisme, c’est accepter sa vision du monde binaire et campiste, celle d’une planète semblable à un vaste «jeu d’échec» où deux équipes asymétriques se feraient face, mais duquel les peuples et les sociétés, dans leur complexité et leur capacité d’agir contre l’oppression, sont absentes. C’est aussi se rendre complice d’une relativisation de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, en Ukraine, en Syrie et ailleurs.
Plutôt que de se livrer à une attaque complaisante et à bon marché des guerres menées par les États-Unis (lesquels sont invariablement condamnables, pour autant que l’on ne renverse pas la réalité en faisant d’un agresseur un agressé comme c’est le cas en ce qui concerne la Fédération de Russie), pourquoi ne pas entendre les syndicalistes et les militants de la société ukrainienne ainsi que ceux et celles qui s’efforcent de rendre compte de la complexité d’une situation qui réclame notre solidarité? Une solidarité qui, par principe, doit être dirigée envers les peuples et non se mettre à la remorque d’États autoritaires, répressifs, auteurs de crimes de guerre et contre l’humanité.
Nous ne pouvons que réclamer l’annulation de cette conférence indigne et suggérer de la remplacer par des discussions sur les solidarités concrètes et internationalistes, autant envers le peuple palestinien qu’envers le peuple ukrainien.
Salutations préoccupées.
Comité de solidarité avec le peuple ukrainien et les opposant·es russes à la guerre (Vaud)