Coopération solidaire avec le Nicaragua

Coopération solidaire avec le Nicaragua

Agé de 46 ans, directeur de la radio «La Primerisima» (l’une des plus écoutées du Nicaragua), William Grigsby Vado a derrière lui une vie intense de militant sandiniste et mène une activité professionnelle débordante. Directeur administratif (1997-2003) de la Fondation pour le développement municipal POPOL NA, ce journaliste réputé est un interlocuteur reconnu en matière de coopération internationale. Lors de sa tournée en Suisse, durant le mois d’avril 2005, il est revenu sur la situation actuelle au Nicaragua (cf. solidaritéS,
67). Sergio Ferrari revient ici sur le message qu’il nous a transmis concernant plus particulièrement le sens d’une coopération solidaire.

Dans les années 1980, le mouvement de solidarité avec le Nicaragua sandiniste avait été l’un des plus forts de ces dernières décennies. Depuis les années 90, les choses ont cependant bien changé.

Un projet solidaire pour une radio d’avenir

Les différents acteurs de la solidarité (et de la coopération solidaire) avec le Nicaragua se proposent d’appuyer un projet en faveur de la radio «La Primerisima», une voix sandiniste, indépendante, critique et progressiste. Cette proposition, discutée lors d’une rencontre à Berne le 16 avril (ainsi qu’avec le secrétariat du syndicat COMEDIA et d’autres interlocuteurs rencontrés par William Grigsby durant sa tournée de 17 jours en Suisse) a été annoncée publiquement lors de l’assemblée du 21 avril à Genève.

Ce projet (estimé à 50000 fr. suisses) devrait doter «La Primerisima» de la base technique nécessaire pour passer d’un système d’ondes moyennes (AM) à la fréquence modulée (FM: Un changement qui permettra à cette radio de mieux pouvoir défendre la 2ème place qu’elle occupe dans les taux d’écoutes au Nicaragua, voire d’aspirer à la première place! «Le public, surtout les jeunes, écoute de préférence la FM et actuellement nous sommes hors-course puisque nous n’émettons pas sur cette fréquence». William Grigsby estime que, malgré un investissement coûteux pour passer à la FM, «nous pourrions économiser 1000 dollars par mois sur les frais de fonctionnement». (sf)

La solidarité n’est pas morte

En Suisse, il ne reste qu’un assez maigre dispositif, même si cela n’est pas négligeable: l’Association Nicaragua-El Salvador, de Genève, le Jumelage Bienne San-Marcos, le Jumelage Delémont-La Trinidad, quelques associations comme l’ex-Centrale sanitaire suisse ou AMCA (Aiuto Medico per il Centroamérica) au Tessin, ainsi que le Zentralamerika Sekretariat (ZAS), qui publie le « Correos de Centroamérica» et impulse quelques projets nationaux.

Plusieurs ONG développent des projets ou envoient des volontaires (E-Changer et GVOM, en Suisse romande; Inter-Agire au Tessin et Interteam en Suisse allemande), maintenant ainsi sur pied une coopération solidaire. William Grigsby s’est ainsi déclaré surpris de rencontrer, le 16 avril, dans le local du syndicat COMEDIA à Berne, une quarantaine de représentant-e-s de cette solidarité: «Je ne m’imaginais pas que continuaient à se faire tant de choses en faveur du Nicaragua», s’est-il écrié.

Renforcer la conscience populaire

Ce moment de surprise passé, il a donné son sentiment sur les défis qui se posent à de tels mouvements:«A mon avis, l’appui extérieur le plus important est celui qui favorise les conditions internes pour renforcer la conscience des gens. En d’autres termes: l’éducation populaire, dans toute l’acception du terme. Il me semble que c’est le grand défi pour les révolutionnaires nicaraguayens et celui de la solidarité internationale».

Habituellement, ce type d’efforts ne jouit pas d’une grande sympathie dans certains secteurs de la coopération institutionnelle, parce qu’ils ne débouchent pas sur des résultats tangibles et parce qu’il n’y a aucun moyen d’en photographier le succès. Certains membres de la solidarité populaire soupçonnent même que ces efforts pourraient être capitalisés par des opportunistes. «Il y a des raisons pour penser cela, mais je crois que nous sommes suffisamment intelligents, des deux côtés de l’océan, pour savoir construire des mécanismes qui garantissent la transparence dans le bilan des comptes et l’efficacité du travail réalisé».

Semer pour récolter dans 7, 8 ou 10 ans…

En ce qui concerne la solidarité matérielle, il a ajouté: «Elle est importante, vu que nous vivons dans un pays appauvri, avec d’énormes besoins en tout genre. Mais il est aussi vital de résoudre le problème de la faim, de la santé ou du logement, que de stimuler les gens impliqués, des deux côtés, pour changer leurs consciences, pour regagner le respect d’eux-mêmes, pour stimuler leur autonomie, pour promouvoir des idées créatives sur le type de société dont nous avons besoin». Cela signifie que la solidarité matérielle doit être liée à la transformation de la conscience des bénéficiaires et des donateurs.

Il ne sert à rien de continuer à donner des maisons, des parcs, des rues ou tout autre type de construction, si par ailleurs les gens n’assument pas un rôle actif dans la transformation de la société à laquelle ils appartiennent. De la réalité au rêve il n’y a qu’un pas. Petit dans le temps historique, énorme dans l’effort humain. «Il s’agit de semer pour récolter dans 7, 8 ou 10 ans. Mais la récolte sera si abondante qu’elle produira une autre révolution».

Sergio FERRARI

ASSOCIATION NICARAGUA – EL SALVAVOR GENEVE
Case Postale 1135, 1211 Genève 1
CCP 12-15 578-6 Genève (mention: radio la Primerisima).