9 juin

Oui critique aux énergies renouvelables

À part l’UDC, aucun parti ne s’oppose à l’augmentation de la production d’énergies renouvelables. Mais pour nous, pas question d’encourager le productivisme à tout va. La loi sur les énergies renouvelables soumise au vote le 9 juin pose problème.

Travaux exploratoires du barrage du Gorneli
La construction du barrage du Gornerli, avec une voûte de 85 m de haut et de 245 m de large, est rendue possible… par le retrait du glacier du Gorner, près de Zermatt. Il fait partie des 16 projets hydroélectriques inscrits dans l’annexe de la Loi sur les énergies renouvelables. Forages exploratoires, été 2023.

En octobre 2023 le parlement a adopté la «Loi fédérale relative à un approvisionnement en électricité sûr» ou «Loi sur les énergies renouvelables» dite aussi Mantelerlass, un ensemble de modifications législatives censées répondre à la grande crainte des dirigeant·es de toute nature: la pénurie d’électricité.

Le projet facilitera la construction de grandes installations hydrauliques, photovoltaïques, éoliennes et de pompage-turbinage. Leur installation primera sur la protection de la nature et du paysage.

Au final, 177 conseiller·es nationaux·ales socialistes, vert·es, des Vert’libéraux, du PLR et du Centre ont voté la loi. Les 19 oppositions venaient des rangs de l’UDC qui était divisée. Ce consensus impressionnant pour produire toujours plus ne se retrouve malheureusement pas quand il s’agit de poser la question des économies d’énergie.

Quelles sont les oppositions?

Pour les partisan·nes de ce projet (les dirigeant·es globaux·ales du pays) il ne faisait aucun doute qu’il y aurait un référendum et ils·elles craignent comme la peste la fondation Franz Weber. Même si le patriarche est décédé, la fondation reste puissante et les défenseur·ses de la nature nombreux·ses. En conséquence, le Conseil fédéral a décidé d’écarter la question de l’énergie nucléaire du Mantelerlass, car ajouter les anti­nucléaires aux défenseur·ses de la nature était beaucoup trop risqué. Cela a provoqué l’ire de l’UDC qui ne jure que par les centrales nucléaires et l’envoi des déchets dans quelque lointain pays (c’est à ça qu’on reconnait les bons patriotes). D’où le rejet d’une partie de ses élu·es et la décision de son assemblée d’appeler à voter non. En tout cas, ce n’est pas l’UDC qui a porté le référendum abouti de la fondation Franz Weber. 

Le productivisme en actes

Ce projet correspond bien à l’idéologie des Verts-Libéraux: produire un maximum d’électricité d’origine renouvelable avec le recours à toutes les innovations technologiques à disposition pour promouvoir la croissance verte. Par contre, la question de la sobriété, des économies d’énergie, de la réduction de la production, bref de toute forme de décroissance, n’entre pas dans le cadre de pensée de cette loi. Les champs de panneaux solaires seront importés de Chine sans qu’on se pose de question sur les conditions de production ni sur le coût écologique des transports. Le tout électrique signifiera une accélération de l’extractivisme  meurtrier dans les pays du sud.

En repoussant la question nucléaire (mais on ne perd rien pour attendre !), les auteurs du projet mettent les antinucléaires dans leur camp, car ces dernier·es sont à juste titre très inquiet·es de la tendance internationale à vouloir reprendre (ou poursuivre) la construction de centrales. Nous partageons leurs inquiétudes.

Le libéralisme vert camoufle les problèmes

Notre position est connue: sortir des énergies fossiles et exclure l’énergie d’origine nucléaire qui, en plus de son danger, laisse des déchets radioactifs pour plusieurs milliers de siècles. Un tel programme n’est réalisable que par l’augmentation de la production d’énergie dite renouvelable couplée à une réduction de la consommation. La voiture individuelle électrique doit être questionnée. Un plan d’économies dans la mobilité, la production et la consommation doit être établi et discuté sinon, Mantelerlass ou pas, on court à la catastrophe. 

Augmenter la production d’é­ner­gie renouvelable est une nécessité urgente, mais la réduction de notre consommation l’est tout autant. N’oublions pas que la Suisse importe 70% de son énergie, toutes origines confondues.

Les antinucléaires qui croient voir dans Mantelerlass un outil contre les centrales nucléaires vont bien vite déchanter, car il y a maintenant clairement une majorité du parlement qui veut prolonger l’existence des centrales existantes et relancer la construction de nouvelles. Pour nous, toute loi sur l’électricité qui ne prévoit pas des mesures d’économie d’énergie et qui n’est pas conçue dans une perspective de sobriété est contestable. 

La Loi sur les énergies renouvelables n’est pas la nôtre, mais c’est sur elle que l’on doit se prononcer. La nécessité de produire de plus en plus d’énergie d’origine «renouvelable» (solaire, éolien, hydraulique…) nous pousse à appeler à voter oui le 9 juin. L’absence de tout projet d’économies nous pousserait à rejeter le texte. 

Ce oui critique est un signal que nous voulons sortir des énergies fossiles, mais nous nous opposerons à la croissance débridée du tout-électrique. La section vaudoise de solidaritéS appelle d’ailleurs à rejeter cette loi.

Henri Vuilliomenet