Session extraordinaire, Business as usual
Depuis le début de la pandémie, Ensemble à gauche Genève a présenté une série de revendications à court, moyen et long terme pour faire face à la crise sanitaire et à la crise économique qui l’accompagne, tant au niveau cantonal que national.
Gros plan, interview de la présidente du Conseil national, mise en scène des systèmes de sécurité pris pour les parlementaires, bâtiment imposant, pupitres (pas moins de trois) et distanciation sociale, tout y était pour laisser entendre à la population que les quelque 3,5 millions de francs investis pour cette session extraordinaire allaient effectivement accoucher de mesures extraordinaires. Mais force est de constater que le Conseil national, dans son écrasante majorité, a choisi le business as usual.
Il ne s’est rien passé ou presque
Les Chambres ont voté une série de mesures exceptionnelles, chiffrées à plusieurs dizaines de milliards mis à la disposition des entreprises par l’État pour assurer leurs profits, sans qu’aucune garantie sanitaire, écologique et sociale ne soit exigée, notamment en termes d’interdiction des licenciements ou de versement des dividendes.
En même temps, les mesures en faveur de la majorité de la population, classes populaires, personnes précaires, salarié·e·s, chômeurs·euses ou personnes en RHT, ont été cantonnées à des rallonges en faveur de mécanismes préexistants, assurance chômage ou perte de gain (APG), rendues nécessaires par l’augmentation du nombre de personnes prises en charge par ces dispositifs. Aucune disposition exceptionnelle pour cette majorité de la population, dont une partie n’a même pas eu accès à des prestations ordinaires du fait de l’absence d’un statut légal.
Durant la session, EàG a réclamé des mesures sociales d’urgence en déposant trois amendements demandant la garantie des revenus à 100 % pour les personnes au chômage ou en réduction d’horaire de travail (RHT), l’élargissement des Allocations pour perte de gain (APG) aux personnes sans-papiers et aux petit·e·s indépendant·e·s précaires, ainsi qu’une augmentation des aides d’urgence en faveur des acteurs et actrices culturelles. Ces propositions ont été rejetées par le Conseil national.
Un même sort a été réservé à une série d’amendements déposés par le PS et les Vert·e·s et que nous soutenions, sur le gros dossier des conditions-cadres des crédits dans le secteur aérien. Les garanties climatiques liées au cautionnement, l’engagement des compagnies aériennes à réduire les vols internes, l’interdiction de tout licenciement ou encore le conditionnement des prêts à l’introduction d’un salaire minimum… tous ces amendements de la gauche ont été balayés par une droite déterminée à signer un chèque en blanc aux compagnies aériennes.
Sans parler de l’aide à la petite enfance réduite de 100 millions (soit un douzième de la somme demandée pour Swiss) à 65 millions de francs.
La lutte continue
À l’issue de la session, Ensemble à gauche a déposé plusieurs interpellations et motions réclamant notamment un prélèvement de solidarité sur les grosses fortunes, des mesures de réquisition d’urgence – en particulier dans le secteur hospitalier privé – une augmentation et un élargissement des aides publiques en faveur des personnes précarisées par la crise ou encore la régularisation collective des sans-papiers.
La crise actuelle est l’occasion de mettre en cause la logique productiviste/consumériste du capitalisme (chaînes de production mondialisées, agrobusiness, élevages industriels en batterie, obsolescence programmée des biens de consommation durables, destruction de la biodiversité, etc.), de même que les politiques néolibérales (réduction notamment du financement de la santé publique) ; elle doit aussi permettre d’approfondir la réflexion sur les impasses d’une vie vouée au travail salarié sans maîtrise de sa finalité.
Notre réponse de classe à la dépression économique du capitalisme, déclenchée et brutalement aggravée par Covid-19 (même si elle se préparait avant la pandémie), passe par l’augmentation des investissements publics sociaux et écologiques, par le maintien des salaires directs, indirects et sociaux. La défense du bien commun contre le profit privé demeure notre fil à plomb. Nous allons continuer à faire avancer nos objectifs écosocialistes et féministes et notamment la réduction massive du temps de travail et la gratuité des biens et services fondamentaux. Des revendications qui, aujourd’hui plus que jamais, font écho aux besoins réels de l’écrasante majorité de la population laborieuse.
Stéfanie Prezioso