L’AI dans une perspective de gauche

L’AI dans une perspective de gauche

Depuis quatre semaines, la presse
hebdomadaire alémanique compte un nouveau venu, antidot. Cet
«hebdomadaire des gauches qui résistent» veut
favoriser le dialogue entre les différents groupes et acteurs
pluriels du mouvement anticapitaliste, tout en marquant son
indépendance à l’égard des directions du PS
et des Verts. Dans son premier numéro, nos camarades
bâlois de la Sozialistische Alternative (SOAL), en collaboration
avec solidaritéS, ont publié un supplément
consacré à l’assurance-invalidité (AI). Nous
publions ci-dessous le point de vue défendu en matière
d’amélioration de l’AI.



Personne ne conteste le fait que l’AI doive être
révisée. Aujourd’hui déjà, elle ne
garantit pas à toutes les personnes touchées par
l’invalidité un revenu suffisant. La procédure
menant à l’obtention d’une rente est
décourageante et des difficultés financières
attendent les requérant-e-s qui ne disposent pas de
réserves suffisantes. Le développement des cas
d’invalidité renvoie à des problèmes en
matière de conditions de travail, d’environnement et de
rapports sociaux. Les causes de ces déficiences doivent
être analysées et supprimées. En même temps,
il faut obliger les employeurs — par le biais de la
réduction du temps de travail, de la diminution de
l’intensité du travail, d’un salaire minimum garanti
par la loi, etc. — à créer des emplois convenables
pour toutes et tous.

Mais ce ne sont pas l’amélioration de la situation des
personnes concernées ou la lutte contre l’augmentation des
cas d’invalidité qui figurent au centre de la
révision de l’AI. Comme lors de la révision de la
loi sur l’assurance-chômage, les partis bourgeois et la
direction du PS cherchent une nouvelle fois à réduire les
coûts et à maintenir le plus longtemps possible les
personnes concernées à la disposition du marché du
travail. Le cœur de la révision de l’AI
réside donc dans la réduction des rentes, liée
à des mesures ré-pressives (introduction de
l’obligation de «participation active»); s’y
ajoute la concentration dans les mains des offices régionaux de
l’AI des pouvoirs de décision en matière de
détection précoce, de définition de la
capacité de gain et sur les prestations et les
différentes mesures. La couverture sociale des sans-travail, des
malades ou des personnes touchées par la pauvreté pour
d’autres raisons, n’est pas envisagée comme un droit
à un revenu couvrant les besoins vitaux; la rente est bien
davantange conçue comme une couverture minimale octroyée
à certaines conditions, qui ont des répercussions
très négatives sur l’autodétermination et le
mode de vie des handicapés.

Couverture sociale contre exclusion

Nous exigeons à l’opposé un développement de
l’AI comme une assurance sociale couvrant les besoins vitaux et
des améliorations en particulier pour les femmes, les jeunes et
les migrant-e-s.

Comme l’AI est liée aux revenus provenant des
activités antérieures, les personnes ayant eu des
activités professionnelles intermittentes, partielles ou mal
payées ne sont pas correctement assurées actuellement. A
cause des obstacles bureaucratiques et de procédures
kafkaiennes, de nombreux intéressés renoncent en outre
à faire valoir leurs droits, en particulier en matière de
prestations complémentaires.

Nous attendons d’une assurance pour des personnes malades
qu’elle soit facile d’accès, qu’elle
fonctionne de manière simple et qu’elle accorde rapidement
ses prestations. En outre, les possibilités
d’autodétermination des intéressé-e-s
doivent être accrues et viser la suppression des barrières
qui se dressent devant la participation à la vie sociale des
invalides. Nous nous opposons aux mesures qui, en lieu et place,
augmentent la stigmatisation et l’exclusion.

Nous rejetons aussi fondamentalement les tendances autoritaires qui se
manifestent à travers l’obligation de participer
activement à certaines mesures (thérapies, cours,
examens) et sont masquées par des notions comme
«l’intégration» ou la
«réinsertion». Alors qu’en
réalité on décompte de plus en plus de personnes
malades, invalides ou sans travail, les autorités, par leurs
mesures de contrainte, contribuent à la marginalisation des
personnes concernées et à la dégradation de leurs
conditions de travail et de rémunération, ce qui
pèse négativement sur les conditions de vie et de travail
de tous les autres salarié-e-s.

Nos revendications

L’assurance-invalidité de l’avenir devrait répondre aux critères suivants:

  • Les rentes de l’AI doivent couvrir les besoins vitaux de
    tous les rentiers et les rentières. Des rentes minimales
    établies en fonction des salaires minimaux revendiqués
    par les syndicats sont indispensables.
  • Des mesures permettant la participation des personnes
    handicapées à la vie sociale s’imposent. Cela veut
    dire des emplois, des logements, des moyens de transport adaptés
    aux handicapés, la suppression des barrières
    architecturales, l’assistance individuelle, etc.
  • Une protection suffisante contre le licenciement, ainsi que des
    indemnités journalières jusqu’à
    l’obtention effective de la rente sont nécessaires.
  • Un financement public suffisant de
    l’assurance-invalidité par le biais d’impôts
    directs progressifs doit remplacer le système actuel, reposant
    sur l’imposition antisociale de la consommation,
    représentée par la taxe sur la valeur ajoutée
    (TVA).
  • Au lieu du développement du place-ment sélectif en
    homes et institutions spécialisées, coûteux et
    très souvent non souhaité par les handicapé-e-s,
    l’accent principal doit être mis sur les
    possibilités de maintien d’un mode de vie autonome dans le
    cadre habituel.

Pour une sécurité sociale

De manière générale, nous défendons
l’idée d’une sécurité sociale
permettant de vivre dignement dans différentes situations de
l’existence (la vieillesse, la maladie, le chômage, etc.).
Le transfert du deuxième et du troisième pilier de la
prévoyance professionnelle dans une sécurité
sociale généralisée en fait aussi partie.

Sozialistische Alternative (SOAL)