De «Femmes en Suisse» à «l’émilie»


De «Femmes en Suisse» à «l’émilie»


Lancée le 14 juin 2001, la nouvelle formule provoque le débat. «Trop intellectuel», «graphisme déconcertant», «nouvelle équipe jeune à soutenir», «bon espoir»… Le sujet passionne les féministes et c’est tant mieux! Faire souffler ce vent frais et prendre la relève n’est pas chose facile. La rédactrice en cheffe a pris la plume pour nous séduire.

Comité de rédaction l’émilie

Fin 2000, le plus vieux journal féministe d’Europe, entreprend de changer de fond en comble. Un an avant de fêter ses nonante ans, le mensuel Femmes en Suisse décide de renouveler son équipe rédactionnelle, sa maquette et son nom. Cette décision s’est prise lors d’une séance extraordinaire réunissant les membres du comité pour une discussion décisive sur les orientations du journal. Il s’agissait de définir le rôle, les objectifs du mensuel et les stratégies envisageables pour les réaliser.


Un coup de théâtre s’est produit lorsque des rédactrices ont suggéré de passer la barre aux jeunes du groupe. Une discussion animée suivie d’un vote à l’unanimité ont entériné cette proposition qui allait changer l’horizon du journal. Dans un même élan, la sortie officielle du nouveau journal a été fixée à la date symbolique du 14 juin, pour commémorer quelques moments charnières en Suisse: les trente ans du suffrage féminin, les vingt ans de l’adoption de l’article constitutionnel sur l’égalité, les dix ans de la Grève des femmes et les cinq ans de l’entrée en vigueur de la loi sur l’égalité (LEg).


Mutation


Lorsqu’il a été décidé de faire confiance aux nouvelles pour la reprise du journal, on leur a également donné carte blanche pour réformer le contenu et la forme du journal. C’est ainsi qu’il a été décidé d’engager une nouvelle graphiste et d’adopter la quadrichromie. Pour compléter la transformation, le nom de Femmes en Suisse a été remplacé par un nom moins connoté XIXe siècle. Le nom retenu, l’émilie, a fait l’unanimité parce qu’il marque le changement dans la continuité: le journal change de peau, certes, tout en gardant en mémoire l’héritage de celles qui nous ont précédées, notamment celui d’Emilie Gourd qui, en 1912, fondait Le Mouvement féministe devenu Femmes Suisses, puis, Femmes en Suisse.


Défendre un féminisme actuel et radical


L’objectif général du journal est de toucher un lectorat, que nous souhaitons le plus large possible, au-delà des quelques militantes averties du sens et de la portée du féminisme. Les membres du comité de l’émilie manifestent la volonté de maintenir un discours, un langage et des idées clairs, axés sur le quotidien et la réalité vécue d’une majorité de femmes, et accessibles à n’importe qui. En aucun cas, le journal ne voudrait être jugé trop intello ou élitiste. Il veut mettre en avant des idées logiques, qui relè-vent du bon sens pour quiconque réfléchit au monde qui l’entoure et à la vie en général.


l’émilie envisage de défendre un féminisme moderne et radical (du latin radix: racine), c’est-à-dire qui réclame des changements sociaux fondamentaux et non pas que des réformes apportées ici et là qui ne suffisent pas pour transformer les mentalités. Chan-ger le système à la racine signifie redéfinir ce que représente être une femme ou un homme. Que le fait d’être l’une ou l’autre ne détermine pas arbitrairement le rôle, les qualités, les comportements, les responsabilités, les devoirs de chaque personne. Même si les sexes sont égaux, les femmes seront toujours des femmes et les hommes resteront des hommes. La peur de l’indifférenciation sexuelle est sans fondement: seule l’angoisse que suscite l’émancipation féminine (chez les femmes comme chez les hommes) l’explique.


Il s’agit de viser l’abolition de la ségrégation sexuelle et de donner la possibilité aux hommes comme aux femmes de profiter pleinement de leur potentiel humain et non pas de se cantonner dans un carcan attribué à l’un des deux sexes. Naturellement, les sexes sont plus semblables que différents, c’est la société patriarcale et capitaliste qui exacerbe les différences artificielles entre les sexes pour maintenir le statu quo. Oui à la plus grande diversité possible, non à la différence qui hiérarchise.


L’émilie


Case postale 1345


1227 Carouge


Tél: 022 310 62 61 www.lemilie.org


Abonnement d’un an: 65.- (jeunes, AVS et personnes au chômage: 52.-)


L’émilie est en vente dans toute les bonnes librairies de gauche …aux côtés du journal de solidaritéS



Profil de la red en cheffe


Le plus vieux magazine féministe se paie une jeune femme, paradoxe amusant et rassurant à la fois puisque Andrée-Marie Dussault n’avait pas 30 ans quand elle a commencé à assumer cette lourde tâche. Arrivée à Genève il y a trois ans, par amour et pour y faire un post grade à l’Institut de développement – qu’elle termine ces jours – elle s’est très vite investie dans l’aventure du journalisme. Fémi-niste, elle l’était bien avant d’arriver de Montréal où elle venait de terminer ses études de sociologie. Sa mère a probablement été, comme pour la plupart d’entre nous, la personne déterminante dans son parcours féministe. Son enfance passée aux quatre coins du monde a fortement contribué à la sensibiliser aux injustices, et à celles en particulier que vivent les femmes. (ac)