Les salarié-e-s de Swissair jetés à la casse


Les salarié-e-s de Swissair jetés à la casse


Dès le début de cette année, nous avons imaginé le pire. Nous avons dénoncé l’aventurisme de la stratégie «du chasseur» et ses effets dévastateurs sur les finances du groupe.

Rémy Pagani

Nous avons mobilisé le personnel pour construire tous ensemble une nécessaire riposte. Nous avons dénoncé l’incompétence des dirigeants du groupe et exigé du Conseil fédéral des mesures adéquates pour la poursuite des activités de Swissair et, surtout, le contrôle de cette activité dans la direction d’un service public. Forts de ce début de mobilisation, nous avions envisagé des moyens d’action contre les baisses de salaire et contre les licenciements, en imaginant naïve-ment que la loi serait respectée.


Les contribuables offrent une compagnie d’aviation…


Aujourd’hui, le cynisme et le mépris des banques et des milieux politiques de droite qui dirigent ce pays ont atteint leur comble. En effet, après le renflouement de la compagnie à coups de milliards grâce à un accord passé entre les pyromanes, dirigeant de l’économie, et des pompiers, au demeurant conseillers fédéraux, il est clair que le personnel licencié (5000 à 6000 personnes en Suisse), n’aura même pas droit aux délais de congé usuels et que les employés qui resteront chez Swissair (15’000 personnes en Suisse) devront se fondre dans la formule «Crossair Plus», en subissant une baisse de salaire de plus de 30%, sous peine d’une pénalité auprès de l’assurance chô-mage, sans parler du traitement inique qui est réservé aux préretraités de 1996-97 (370 personnes en Suisse), depuis un mois jetés à l’assistance publique. Tout cela grâce à une interprétation de la loi pour le moins discutable.


…à l’économie privée


Résultat des courses: si l’on fait le compte de ce que la Confédération, les communes et les cantons vont mettre comme argent sur la table, soit un milliard à fonds perdu pour faire voler Swissair jusqu’à fin mars et encore 1,05 milliard pour recapitaliser l’entreprise, en comparaison de l’effort que va fournir l’économie, en tout et pour tout 1,8 milliard pour la recapitalisation de «Crossair Plus»; le contribuable va faire la plus grosse partie de l’effort pour offrir, sans la moindre condition, un cadeau somptueux – une compagnie d’aviation – aux grands capitaines d’industrie. Mieux encore, le personnel qui servira tout ce beau monde verra son salaire baisser, en moyenne, de 4500 Fr. à 5000 Fr. par mois à 3500 Fr. à 4000 Fr. par mois (salaire moyen actuel de Crossair). Et, cerise sur le gâteau, pour ceux parmi les employés de Swissair qui refuseraient ce marché de dupes, une pénalité de deux mois de salaire auprès de l’assurance chô-mage sera leur récompense pour avoir refusé un salaire jugé «convenable».


Scénario froidement décidé


Répondant à un journaliste du journal Le Matin du dimanche du 28 octobre, M. Mathias Mölleney, chef du personnel de Swissair, lui-même licencié, est le premier à trouver «inimaginable» que le financement du plan social n’ait pas été inclus dans l’accord passé entre le Conseil fédéral et les milieux économiques. Il sait que, dans un autre pays européen, cette décision serait impossible, la législation l’interdisant. Il est bien placé pour le savoir car c’est lui qui a dû licencier 12’000 personnes chez Lufthansa il y a quelques années. En ce début de nouvelle récession économique, ce qui est en jeu c’est de savoir si les salariés de ce pays accepteront de voir leur salaire diminuer une nouvelle fois, après les baisses subies pendant les années 90. Il faudra plus que des cris et de la fureur pour résister à cette nouvelle attaque néo-libérale fomentée par Rainer Gut et Ospel dirigeants de grandes banques et de transnationales du pays.


Véritable déclaration de guerre contre le personnel de Swissair


Lors d’une réunion de la «dernière chance» à Berne le 7 novembre, entre les syndicats et les acteurs économique de la débâcle de Swissair, les nouveaux dirigeants de la futur compagnie d’aviation ont clairement dit comment ils entendaient respecter les lois sur le travail: les fouler aux pieds. En effet, non seulement il n’entendent pas respecter l’art. 333 du Code des obligations qui impose en cas de transfert d’entreprise le maintien des conditions de travail et de salaire durant une année, mais pire encore ils vont «démissioner» plus de quinze milles employé-e-s de Swissair pour les réengager aux conditions de Crossair. C’est-à-dire que ces nouveaux employeurs vont contourner allègrement la loi même, si ces licenciement seront considérés comme abusifs par tous les tribunaux du pays.

Arrogant, manipulateurs, sans scrupules ces personnages ont même imaginé résoudre le problème des préretraités (370 personnes en Suisse) qui n’ont plus que leur yeux pour pleurer depuis le 1er novembre en leur demander de faire des offres d’emplois par l’intermédiaire d’une entreprise de travail temporaire. Ne savent-ils pas qu’il est quasiment impossible de retrouver un travail dans ce pays lorsqu’on a plus de 62 ans? Et en ce qui concerne le plan social pour eux la question ne doit même pas se poser puisqu’il n’y a pas d’argent. Voilà comment dans ce pays on traite les salarié-e-s qui, au demeurant, n’ont aucune responsabilité dans cette déroute. Le scénarios Phoenix ou Crossair plus c’est selon, ont été sciemment élaborés contre les salarié-e-s avec la volonté de leur faire accepter des baisses de salaires de 30%. Cela ne vous rappelle-t-il rien? Il était question dans le petit livre blanc de De Pury des salaires trop élevé en Suisse en comparaisons internationale… aujour-d’hui on y porte remède. (rp)