Initiative pour une véritable politique d’accueil de la petite enfance, Un point de vue critique

Initiative pour une véritable politique d’accueil de la petite enfance, Un point de vue critique



Dans un article publié au no
143 de solidaritéS, Pierre Vanek invitait les lectrices et
lecteurs du bimensuel à signer l’initiative pour la petite
enfance. Car, comme le soulignent les auteurs de cette initiative,
trouver une place dans une garderie est un exploit, cette situation
pénalise l’activité professionnelle des femmes, il
y a d’énormes différences de qualité entre
les garderies, de sorte qu’actuellement, il y a
« inégalité de prestations, selon le lieu
d’habitation dans le canton de Genève ».

Fortes de cette analyse pertinente, les initiantes proposent un nouvel
article constitutionnel cantonal pour une véritable politique
d’accueil de la petite enfance. « Chaque enfant en
âge préscolaire à droit à une place
d’accueil de jour. Subsidiairement à la famille,
l’Etat et les communes sont tenus de réaliser ce
droit… ». Est-ce donc à la famille de
créer les places d’accueil pour garantir ce droit aux
enfants (puisque l’Etat et les communes n’interviennent que
subsidiairement) ?
    Le texte indique que les communes étudient
les besoins, planifient et concrétisent la mise en œuvre
de dispositifs d’accueil. Est-ce possible que les initiantes, qui
soulignent que le système actuel amène à une
inégalité de traitement en raison du lieu de
résidence, proposent une solution qui renforce cette situation
de non droit ? En outre, il est précisé que ce
sont les communes qui assurent le financement. Donc, aucune
péréquation financière n’est prévue, que celle liée
à la péréquation intercommunale entre les
« belles » communes (Vandoeuvres, Cologny,
etc.) et les quartiers populaires urbains ou suburbains.
    Il est aussi indiqué que les communes peuvent
déléguer cette tâche (de mise en œuvre de ce
droit) à des fondations. Ce seront alors ces dernières
qui engageront, formeront ou ne formeront pas le personnel. Sans parler
de son statut et de la rémunération des
salarié-e-s de la petite enfance, femmes et hommes. Avec le
risque que chaque fondation éduque les enfants avec ses valeurs,
pas nécessairement dans un esprit de laïcité et de
solidarité.
    Laisser les communes organiser les garderies, leur
laisser la faculté de déléguer cette tâche
à des fondations, est-ce vraiment la meilleure façon
d’organiser l’accueil de la petite enfance ? A
Genève, nous avons une  bonne école publique. Notre
système du parascolaire (devoirs surveillés, cantines)
est certes perfectible, mais il sert de modèle à
d’autres cantons. Tout comme l’enseignement obligatoire
relève de la compétence du canton, l’accueil de la
petite enfance devrait l’être aussi.
    Conscients des problèmes de la petite
enfance, je ne peux que féliciter les initiantes qui veulent
introduire à la constitution cantonale un droit social. Je
regrette cependant que leur proposition n’ait pas
été soumise à une discussion préalable. En
effet, elle ne me paraît pas une réponse adéquate.

Anna Spillmann-Andréadi