Turquie: syndicalistes et féministes en procès

Turquie: syndicalistes et féministes en procès



Le 19 novembre, le procès de
plus de 30 activistes turcs a commencé dans la ville
d’Izmir en Turquie. Il est suivi par une délégation
internationale de 40 personnes, comprenant des membres de la
Confédération syndicale internationale (CSI), de
plusieurs centrales de syndicats en Europe, de la Marche mondiale des
femmes et du réseau « Avocats sans
frontières », ainsi que par des centaines de
militants des mouvements syndical, des femmes et des droits humains en
Turquie.

Les militant·e·s ont été
arrêtés en mai et en juin dernier, sans accusation
formelle. Pendant tout ce temps, l’instruction a
été conduite dans le secret; ce n’est que
récemment que les avocats ont eu accès au dossier. Au
total, 22 personnes sont encore détenues (10 femmes et 12
hommes), les autres accusés ont été
libérés, dans l’attente du procès. Quatre
personnes accusées sont membres de la Marche mondiale des
femmes : Elif Akgul, ancienne secrétaire des femmes de
l’Union des Enseignants; Yuskel Mutlu, enseignante
retraitée et membre de l’Association des Droits humains et
de l’Assemblée de la Paix turque; Songul Morsumbul,
secrétaire des femmes du KESK (Confédération des
fonctionnaires – Syndicats turcs); Gulcin Isbert, membre de
Egitim-Sen, le syndicat enseignant.

    Miriam Nobre, coordonnatrice du secrétariat
international de la Marche mondiale des femmes (MMF), qui est à
Izmir, rapporte que, dans cette première partie du
procès, l’accusation a présenté comme raison
de l’inculpation l’organisation d’une centrale
syndicale dont les membres ont des liens avec des membres du PKK (Parti
des Travailleurs du Kurdistan), interdit en Turquie. Myriam Nobre
précise toutefois que la manière dont se déroule
le procès montre une volonté de restreindre les
activités syndicales : « toutes les
‘preuves’ que le procureur présente sont des listes
de passagers sur des vols, des rapports de réunions, des
courriels, des appels téléphoniques, des actions qui font
partie du quotidien de la vie syndicale ». Miriam souligne
aussi le fait que dans son résumé des arguments de la
défense, le juge a affirmé que faire une
« action » ou une action
“illégale”, c’était à ses yeux
la même chose.

    Dès le début, la défense a
demandé la suspension de ce procès qui viole toutes les
règles prévues au niveau européen, et a
déclaré qu’un appel va être
déposé devant la Cour européenne des Droits de
l’Homme. Le 18 novembre, la MMF européenne a
organisé des actions devant les ambassades et consulats de
Turquie sur tout le continent européen. Les manifestantes du
Portugal ont rapporté qu’elles ont été
reçues à l’ambassade par un fort contingent de
policiers, avec voitures blindées, et que certains d’entre
eux étaient armés de fusils. Une délégation
de quatre membres de la MMF a été reçue par la
deuxième responsable hiérarchique de l’ambassade.
Cette personne a tenu un discours montrant que sa conviction
était déjà faite.

    La MMF demande à tous ses membres et aux
mouvements alliés de maintenir la pression sur les
représentations diplomatiques et du gouvernement de la Turquie
pour exiger la libération des personnes emprisonnées (qui
sont des fonctionnaires avec une adresse fixe connue), pour exiger un
procès équitable et impartial et la fin de la
répression des mouvements d’opposition.

Marche mondiale des femmes/réd.


Communiqué de la Confédération syndicale internationale

[…] Finalement, 31 personnes devaient comparaître devant
un tribunal, accusées de terrorisme ; 22 d’entre
elles étaient emprisonnées. Dès ce moment, leurs
droits ont été violés à de nombreuses
reprises. […] Lors du procès lui-même, les droits
de la défense ont été constamment bafoués,
que ce soit par l’attitude du président du tribunal qui
menait lui-même les interrogatoires, ou parce que les avocats de
la défense n’étaient pas autorisés à
parler aux accusés, ou encore parce qu’il n’y avait
qu’une seule garde alors que dix femmes comparaissaient.

Pendant la nuit de vendredi passé (le 20 novembre, réd,),
le tribunal d’Izmir a décidé que tous les
prisonniers devaient être libérés. Même si le
mouvement syndical international salue bien évidemment cette
décision, il n’en reste pas moins grandement
préoccupé, car toutes ces personnes devront à
nouveau comparaître en mars de l’année
prochaine.[…]