Economies dans la formation: les élèves de 9e «préprof» et moderne trinquent

Economies dans la formation: les élèves de 9e «préprof» et moderne trinquent



Jusqu’il y a peu, le canton de
Neuchâtel figurait parmi les meilleurs de Suisse en
matière de formation des jeunes dans des écoles à
plein temps pour la scolarité post obligatoire (secondaire II).
Ce temps est révolu. « Trop cher pour le
canton de Neuchâtel ».

L’existence d’une université (la plus petite de
Suisse avant que ne s’ouvre celle du Tessin), mais aussi les
besoins de l’industrie horlogère, expliquaient pour une
grande part la proportion élevée de jeunes qui entraient
dans une filière à plein temps du secondaire II
(lycées, écoles de diplômes, technicum…)

30 millions à gagner sur le dos des élèves

Mais, ainsi que le Conseil d’Etat l’a annoncé dans
son Programme de législature 2009–2013, l’objectif
est de faire des économies dans la formation à hauteur de
30 millions d’ici 2013. Pour ce faire, l’un des moyens
prévus est de diminuer de 10 % le nombre
d’élèves accédant à une formation
dans une école à plein temps.

    En d’autres termes, il s’agit de faire
grimper de 58 % à 68 % le nombre de jeunes qui
feront un apprentissage en formation duale (apprentissage chez un
employeur + cours en école professionnelle). Comment y
parvenir ? Rien de plus simple : il suffit
d’édicter de nouvelles conditions de promotion pour entrer
dans une filière à plein temps, et le tour est
joué !

    Douche froide pour les élèves de
« moderne » : ils viennent d’apprendre
que pour être acceptés dans une école à
plein temps à l’issue de leur scolarité, il faudra
qu’ils aient leurs « 18 points »
à la fin du premier semestre déjà (en janvier). Il
ne suffira plus d’être promu, en fin de scolarité,
en juin.

    Un semestre en moins pour « faire ses
preuves », un semestre en moins pour
« remonter ses moyennes », voilà qui
va faire mal. Les 9e «préfprof», et pire celles et
ceux qui sont en terminale, auront encore plus de peine pour trouver
une formation. Combien seront-ils·elles à être
laissés pour compte ? Maintenant déjà
ils·elles s’entendent dire par leur potentiel maître
d’apprentissage : « Il faut attendre, il y a
d’autres candidat·e·s mieux
préparé·e·s que toi ». En
clair: les employeurs préfèrent souvent un·e jeune
sortant de « moderne »…

Où sont les places manquantes ?

Le Conseil d’Etat veut faire passer le nombre
d’apprenti·e·s en entreprise de 57 %
à 80 %, augmentant ainsi la proportion de formations
professionnelles duales au détriment d’une formation
professionnelle en école (diplôme ou maturité
professionnelle). Il estime qu’il faudra créer 400
nouvelles places d’apprentissage pour y parvenir. On pourrait
s’en réjouir s’il n’avait pas, comme à
son habitude, mis la charrue avant les bœufs : ces places
ne sont pas encore créées que déjà les
filières à plein temps sont fermées à une
partie des élèves qui, hier encore, pouvaient
accéder à une école à plein temps si tel
était leur choix. Le Conseil d’Etat dit avoir mis en place
70 places supplémentaires par rapport à l’an
passé. Très bien, mais où pense-t-il trouver
d’ici le printemps 2011 les 330 places manquantes ?

    Interpellé à ce sujet par le groupe
parlementaire PopVertsSol au Grand Conseil, le Conseil d’Etat est
resté bien vague. Pressé par les questions des
député·e·s il a promis que
« personne ne sera laissé à la
rue » et que ces élèves pourront faire une
10e année « de raccordement »
s’ils·elles le veulent. On n’en croit pas ses
oreilles: celles et ceux qui n’auraient pas leurs moyennes au
semestre se verraient ainsi infliger une année de
scolarité en plus ? Combien de classes de raccordement
faudra-t-il ouvrir en plus si on ne veut pas les faire
déborder ? Ou y aura-t-il, là aussi, de nouvelles
conditions d’admission ? Parents,
adolescent·e·s et enseignant·e·s
s’inquiètent avec raison. Quant à
solidaritéS nous continuons à défendre
l’idée que le plus important et le plus motivant pour les
jeunes serait de leur donner les moyens de choisir leur voie et de se
former en école ou en entreprise selon leurs aspirations
personnelles.


Marianne Ebel

Extrait de la lettre d’une maman d’élève
de 9e année, adressée au Conseil d’Etat et à
tous les député·e·s

«Ce que je déplore c’est qu’à nouveau,
les jeunes sortant de préprofessionnelle vont se retrouver
à la rue, car les places vacantes d’apprentissage seront
à coup sûr repourvues par des modernes, voire des
maturités. Et ces jeunes ?

    La question a été posée
à la soirée des parents quant à savoir si un
enfant n’a pas les fameux 18 points au 1er semestre et
qu’il s’inscrit aux examens qui ne seront finalement pas
réussis, aura-t-il le temps de trouver une place
d’apprentissage ? On nous répond que des places
d’apprentissage pour maçon étaient toujours
disponibles. Sans rien dénigrer, tout le monde ne veut
peut-être pas devenir maçon et les arguments sont
très légers comme celui de nous dire de garder notre
jeune une année de plus à la maison. En tant que
mère, travaillant à 100 %, je ne peux pas imaginer
laisser mon fils à la maison à 15 ans en attendant une
place. Que va-t-il devenir ? »


A vos jeux, rien ne va plus…

Depuis que la Confédération a autorisé
l’ouverture de deux casinos supplémentaires, les
promoteurs se poussent au portillon et les spéculations vont bon
train. Interpellé à ce sujet par le groupe PopVertsSol
qui s’inquiète de l’implantation d’un casino
en ville de Neuchâtel, le Conseil communal a ouvert la
discussion. Douche froide : à l’image de ce qui
s’était passé à l’exécutif,
seul PopVertsSol s’est opposé à cette
réalisation. « Puisque ça se fera, autant en
profiter… on pourra louer la Rotonde plus cher, c’est
aussi bon côté impôts…». Que
c’est un lieu où se concentrent les mafias, où se
recycle l’argent sale et qui envoit à la dérive des
personnes qui se font plumer, n’inquiète visiblement pas
grand monde. Sans illusion, mais pour que le débat
s’élargisse, solidaritéS soutient
l’idée d’une pétition.
HV